# 88th Fountain Avenue # Ombre et lumière [PV Matt]

[Enfin !!! THE TOPIC ! XD Bon, je rajoute une note, notre rencontre se passe avant que je décide de marquer ta fille, un ou deux jours avant.]

Minuit sur Los Angeles... Hollywood est plongé dans le calme le plus absolu. Même les voitures circulent très peu dans Fountain Avenue. Un silence reposant mais qui devient vite inquiétant si l'on sait ce qui sa trame dans l'Ombre depuis deux longues semaines. Les quelques êtres à le savoir sont les premiers à arriver à cette conclusion sordide : c'est le calme avant LA tempête... Aucun d'eux n'aura tort s'il dit ça. Cette nuit sera marquée par un évènement à la fois troublant et inquiétant. L'avènement de deux combats célestes entre deux Immortels, voilà ce que sera cette nuit... Dans toutes guerre, il y a les généraux qui disposent leurs armées et les soldats qui accomplissent le reste. Sauf que cette fois, le champ de bataille n'est autre que Los Angeles

Dans les rues d'Hollywood, même les chats préfèrent se faire tout petits... Quelques-uns se risquent à traverser pour se réfugier quelque part, comme si la menace était imminente. Elle l'est... Marchant tranquillement dans ce quartier avec un but précis, Darren réprésente à lui tout seul les forces les plus obscures de Satan. Son aura maveillante se répand autour de lui comme le feu dans une forêt. Il arbore un visage fermé, glacial, meurtrier. Vétu de noir, il n'apparait dans la lueur des lampadaires qu'un visage pâle, parcouru de quelques cicatrices éparses. Mais pour la première fois de sa vie immortelle, il n'a sur lui aucune arme, aucun couteau ni aucun silencieux.

Depuis qu'il sait que son frère est revenu dans la ville, il s'est longuement préparé à l'anéantir. Oui, car ce soir sa visite ne sera pas courtoise, comme vous l'auriez sans doute deviné aux premières lignes de cette histoire... La plus grande faiblesse de Matt était son amour pour les autres même pour lui. Car il était dans la nature d'un bras droit d'aimer le détestable... Dieu le lui avait montré lors de leur dernière entrevue, il avait eu mal malgré tout. Alors le bras gauche se plaisait à songer au désastre émotionnel qu'il allait causer chez son frangin... Faire souffrir ses proches ne le génait pas outre mesure et il allait prendre un malin plaisir à le faire.

Comme une ombre il s'approcha de la maison où son frère devait être. Il arriva sur le pas de la porte et par télékinésie, il débloqua la serrure. Il n'y avait personne à l'intérieur, son frère devait être sorti. Il referma rigoureusmeent derrière lui et jeta un oeil aux alentours. La première chose sur laquelle il tomba fut une photo... de lui. Il eut un sourire cruel et s'avança un peu plus dans la maison. Sur une bibliothèque il aperçut alors deux personnes... ce n'était que sa femme et sa fille... celle au sujet d elaquelle il avait dit à Darren qu'il allait être le père. Oui, juste avant qu'il ne meure. Là où normalement tout esprit aurait versé une larme ou aurait eu de la peine à ressasser des souvenirs, lui n'en fit rien. Il regarda d'un oeil froid ce bout de papier glacé et continua de marcher dans la villa. Tout était bien rangé, chaque chose à sa place et chaque chose avait sa place.

Il se rendit dans la chambre et fut étonné de voir le nombre de photos... Lui n'avait jamais conservé les traces de son passé. Il les avait toutes brûlées... Mais il vit soudain qu'un croix était accroché au mur. Avec un geste malveillant il s'en empara et la retourna. Ainsi elle était plus jolie... Il s'attarda un instant sur la photo de sa fille... il ne savait pas comment il avait fait pour l'obtenir, peut-être l'avait-il tout simplement faite faire par un détective privé. Et puis il vit un cliché sur lesquels ils étaient réunis tous les deux. Lui petit et Matt un peu plus grand en frère protecteur. Il fit un rictus ironique avant de se figer.

Il la sentait !!! Cette aura claire qui se rapprochait... Ses yeux s'assombrirent, il était là... Et en effet quelques instants plus tard, il entendit Matt tourner la clé dans la serrure. La porte d'entrée s'ouvrit et montra clairement une silhouette, tapie dans l'ombre. Ce n'était autre que Darren qui pointait sur lui un regard si noir qu'il aurait pu abriter une infinité de galaxies. L'heure de leur rencontre était venue. Darren n'était bien entendu pas enclin à discuter du temps passé. Il était là dans le but précis de le détruire... à jamais, de rayer ce passé qui maintenant était loin derrière lui. En cette nuit sombre, aucune trace de vie n'était dans la rue comme si leurs deux présences mélées suffisaient à repousser les être de cette planète.

Minuit à Los Angeles …C’est fou comment le temps passait vit quand on bossait. Il n’était pas rare de voir Matt sortir du Starbuks à cette heure-ci. Il y a passait pas mal du temps, réglait les problèmes de dernière minute sans être dérangé et aussi écrire ses rapports de Bras Droit. Tant qu’il était dans l’ambiance du boulot, il pouvait travailler sans relâche car chez lui c’était presque impossible. Quand il y était, c’était pour prendre une douche et dormir, pas plus. Et puis il fallait avouer que de son boulot, il passait du temps à appeler l’Inde. Avec environ neuf heures de décalage, il était sûr de parler de quelqu’un de là bas. Dans un langage que le jeune homme maîtrisait à la perfection, il prenait des nouvelles, discutait de sa nouvelle vie et de cette solitude. Les gens étaient beaucoup plus froid, la tension un peu plus palpable, le danger beaucoup plus grand et puis sa mission avait un but précis et touchait la personne la plus dangereuse de la ville qui se trouvait être son frère. Il y avait de quoi être dérouté par tout cela. Alors il se raccrochait à des gens qui le connaissait bien, qui savait quoi dire et lui remonter le moral. Au pire, il pouvait toujours aller voir le Grand Patron mais pour le moment, Matt voulait faire ses preuves seul, montrer qu’il pouvait s’adapter ici. Ce serait juste un peu plus long que les autres fois, voila tout … Personne ne pouvait être parfait et le jeune homme, bien amusant de dire jeune quand on sait qu’il frôle la cinquantaine, n’était pas une exception malgré son haut statut et sa bonté incarnée. On avait tous nos faiblesses, même si elles sont bien cachées, et c’est ce qui faisait que l’on pouvait être vulnérables. Il suffisait juste de bien toucher, bien viser là où il fallait.

Enfin, à l’heure où une église sonnait douze coups, Matt sortait par une petite porte pour rentrer chez lui. Il rentrait en voiture, avait appris à maîtriser le bolide à force d’entraînement et puis à cette heure là, il n’y avait pas grand monde et c’était tant mieux. Tournant la clé pour démarrer, on pouvait lire sur les lèvres du grand blond une sorte de satisfaction. Il avait passé presque deux heures à parler avec Ekram, un Archange indien avec qui il avait mené bon nombre de missions et était aussi qui l’avait soutenu après le départ de Asha. Cela faisait du bien de rire, de parler, de connaître bien quelqu’un et surtout ne pas avoir peur de révéler sa véritable nature. Il était défendu et donc les vrais amis ne pouvaient être que limités. Et de plus en plus avec le grade. Comment un simple ange pourrait comprendre qu’un Bras Droit se sente mal de temps à autre ? C’était la logique de Matt, c’est ce qu’il avait toujours pensé, se disant lui-même quand il était ange qu’il envoyait ces Grands si puissants, invincibles sûrement. Et bien non, personne n’était invincible sur cette planète … Il pensa à ça dans sa voiture aussi blanche que sa chemise, dans un silence des plus doux et agréables. Hollywood n’était qu’à une dizaine de minutes de Westwood, c’était pratique. Il y avait tout de même des gens dehors : des jeunes qui faisaient la fête, des couples qui se baladaient main dans la main, des gens seuls … Au milieu de ces humains, des anges et démons s’y mêlaient sans qu’on sache véritablement qui était qui. Lui pouvait les démasquer, il sentait toujours cette douce aura ou alors cette odeur un peu putride qui le révoltait. Quant à son aura personnelle, elle était immanquable, tellement puissante que cela faisait du bien à quiconque passait son chemin, sauf quand il la masquait, ce qu’il était obligé de faire au quotidien pour ne pas attirer la « racaille » dans son établissement auquel il s’était attaché au fil des journées à y travailler.

Hollywood. Son quartier avec le 88th Fountain Avenue, là où il vivait. Charmant petit immeuble où il accédait directement à son duplex par un escalier en pierre situé au dehors bordé d’une petite haie. Vraiment classe et tranquille, loin de l’agitation de Hollywood Boulevard. Ce logement, cadeau de Houston, avait une terrasse donnant une vue sur le Mont Lee et les lettres HOLLYWOOD qui donnait une jolie vision du coin. Il adorait cet endroit, le seul qui n’était pas pollué par les mauvaises ondes de la ville, un petit coin de paradis dira t’on. Là dedans, il y avait ses vies. Passée et présente, des photos, des archives, des dossiers, des bibelots … Tout rappelait qu’il avait grandi dans les années 70, avait un petit frère, une petite amie, une nouvelle vie en Afrique du Sud et plusieurs autres en Inde. Cela lui faisait du bien, Matt avait besoin d’attaches, de bases pour avancer. Alors que ce soit une photo de Darren à 10 ans, ses amis de Johannesburg, les anges de Calcutta … Bref, tout y était. Et quand le Bras Droit mettait la clé dans la serrure, il avait l’impression de pousser la porte d’un autre monde, une sorte de Jardin d’Eden où il n’y avait qu’Adam. Pas de Eve ni de serpent. C’était si bon.

Pourtant, en garant la voiture dans le parking à sa place habituelle, quelque chose se faisait sentir. Incapable de dire quoi, Roller finit de ranger sa voiture, il mit l’alarme et ressortit du sous sol pour accéder aux escaliers. Et plus il montait, plus il y avait une odeur dans l’odeur. Quelque chose d’écœurant, putride … Une odeur qui prit au nez le beau blond qui ne put s’empêcher de pester tout bas en sortant les clés de sa poche.

Ca pue la mort ici …

Oui, c’était exactement ça, il avait bien résumé ce qui planait dans l’air : la mort et la désolation. Et ça venait de chez lui. Qui avait pu souiller son petit Eden ? Qui avait osé ? Même pas il ne pensa à Darren, pensant que son frère l’attendait ou alors préférait les endroits moins angéliques dirons nous. En fait, son esprit se tournait bien autour des démons mais plutôt d’une femme. Cette Lena Howard qui l’avait draguée à l’aéroport et qui ne n’arrêtait pas d’être là où Matt se trouvait. Alors elle était bien capable de pénétrer chez l’Ange pour tenter une nouvelle approche plus radicale. Comme toujours, il la remballerait gentiment mais au bout d’un moment c’était lourd. Heureusement que la patience était une qualité indispensable chez les anges !

Enfin, le voila enfin entrer chez lui avec cette odeur insistante, qui soulevait le cœur, donnait envie de vomir. Imperceptible chez les humains, elle devient de plus en plus forte en prenant du grade. Comme l’aura des anges, chacun avait son signe de reconnaissance. Le petit interrupteur se trouvait à côté de la porte et de suite, Matt alluma la grande pièce du rez de chaussé qui servait de salon, salle à manger, coin cuisine et même de bureau près de la grande baie vitrée donnant sur le balcon. Et là, ses grands yeux bleus rencontrèrent un visage dur, des yeux sombres, un être inconnu au premier abord mais si les yeux ne reconnaissaient pas, le cœur oui. Un bond se fit sentir dans la poitrine du jeune homme et restait abasourdi un instant avant de lâcher dans un souffle :

Darren …

Vraiment, c’était une surprise à ses yeux. Il n’attendait pas que ce soit son propre frère qui se tenait là. Il avait tellement changé. Bon heureusement pour lui qu’il n’avait pas éternellement l’aspect d’un garçon de 14 ans mais tout de même cela faisait un choc. A son souvenir, son frère avait la trentaine quand lui aussi passa l’arme à gauche … Mais bien vite, il se reprit et entra chez lui, claquant doucement la porte derrière lui pour s’avancer vers son petit frère qui faisait plus vieux que lui. Quelle ironie … Il fit donc quelques pas en silence, le dévisageant. C’était quand même troublant de se revoir après tant d’années. La dernière fois qu’ils s’étaient vus, Matt mourrait dans ses bras après avoir agonisé. Autant dire que les adieux n’avaient pas été des plus grandioses. L’émotion se faisait sentir en lui mais comme bien souvent, il arrivait à cacher tout cela, rien ne passait. Pas même dans ses yeux azurs.

Tu en as mis du temps pour venir me trouver.

Puis ses yeux se posèrent sur le crucifix tourné à l’envers. A peine d’un clignement des yeux suffit à le refaire tomber dans sa position initiale, à l’image du propriétaire de la demeure. Non, il ne voulait pas détruire son propre frère, c’était clairement impossible. Ils étaient à forces égales. Si seulement il pouvait au moins le neutraliser. Mais déjà, Matt voulait voir ce que lui voulait exactement son frère. Son petit frère. Le même sang et pourtant si différent …

Ainsi, son frère l'avait reconnu... Tant mieux... Darren s'en moquait éperdument, il avait littéralement brisé les liens de sang qui les rendaient si proches pour tuer cette partie de sa vie. Il n'éprouva aucun autre sentiment que le dégout face à ce tas de chair qui avait expiré dans ses bras. A la lumière de l'ampoule, son visage apparaissait comme plus démoniaque encore... tous ces traits étaient devenus durs, autant que son coeur. Il sourit intérieurement lorsque le crucifix se remit en place. Non content d'être un bras droit, son frère aîné ne se départissait pas de ses croyances personnelles. Le combat était lancé...

Il ne le quitta pas des yeux qui n'exprimait aucun amour, ni pour Matt, ni pour toute forme de vie. Depuis sa mort il avait réellement découvert le potentiel qu'il pourrait gagner en abandonnant tout forme de sentiment pour les autres. Noircir son âme avait eu du bon, il avait pu ainsi afficher un sourire cruel non dissimulé, là où d'autres versaient des larmes. Tant de cruauté ne lui posait aucun problème. Là où son frère était encore attaché à lui, Darren n'éprouvait rien. Et il comptait bien se baser sur cette puissance inouïe pour détruire cet être qui peignait tout en blanc... Il lui parla alors pour le première fois, d'un voix grave, glaciale, totalement différente de celle, plus aigüe et craintive, qu'il avait eu adolescent, la dernière fois que son frère l'avait vu...

- Matt... Surprise, surprise... Je vois que tu n'as pas perdu de temps... Cette villa est plutôt agréable... on dirait un genre de jardin secret... comme si tu avais besoin de ça pour te ressourcer... C'est là une différence qui nous sépare déjà... Je préfère me rendre dans les cimetières, notament celui où ta tombe a été creusée... rappelle-toi...

Il était comme le maître ici. Mis à part la déco pourrie, il aurait bien fait de ce havre de paix son nouvel enfer personnel... c'était d'ailleurs ce qui allait survenir dans peu de temps. Mais pour l'instant, Darren adoptait un ton plutôt cordial, enfin si le mot peut être employé de cette façon. Malgré toute la froideur et la cruauté de ses paroles, il n'y avait aucune forme d'aggression dans sa voix. Il leva doucement la main et la photo de sa fille lui parvint entre les doigts. Il la regarda et caressa la vitre du cadre en bois. Il savait que son frère risquait de ne pas apprécier aussi, il compléta :

- C'est ta fille, n'est-ce pas ? Celle que tu n'as jamais pû connaître... à cause de ton père. Elle est ravissante... et elle a tes yeux... la même couleur... elle doit sans doute être aussi douée que son père... si pleine de bonté, d'altruisme... de fierté personnelle...

Il avait lâché ses mots avec un léger rictus de déception. Il posa tranquillement le cadre sur une commode qui était près de lui et puis il prit une photo de lui cette fois. Il était beaucoup plus jeune et aussi moins mauvais que maintenant. Beaucoup moins... l'enfance, c'est l'âge de l'innocence. Lui avait perdu les deux très jeune, en tuant son géniteur d'un méthode froide mais rapide. Il tapota ses doigts sur la photo avant le la lâcher au sol. Le verre se brisa et il se baissa pour récupérer la photo, sans aucune protection. Il la déchira en deux, puis en quatre et lâcha les confettis sur le sol. Son regard s'assombrit encore et il repensa à l'instant où son frère l'avait vu... Il arborait une mine impassible mais en réalité, Darren savait parfaitement que son frère ne cherchait pas à lui faire du mal.

- Je choisis toujours les jours que je veux pour rendre visite aux personnes qui n'en valent pas la peine, ou qui ne valent pas grand chose à mes yeux, Matthew... Et je suis au regret de te dire que ces photos de moi sont toutes erronnées... L'autre abruti des nuages ne t'a pas mis au courant ? C'est regrettable... mais tu sais ici, les choses ont changé... ce garçon, que tu vois là, est mort, définitivement. Je constate que tu crois comme ton sacro-saint patron à la rédemption... Il t'a fait revenir pour me sauver ? Pour brider ma puissance ? Il se trompe... et toi tu le crois. Penses-tu vraiment pouvoir me ramener dans un chemin que je n'ai jamais enprunté ? Tes efforts seront vains... ton frère est mort, pour toujours... je l'ai pulvérisé comme un misérable cafard que l'on écrase sous une chaussure. Lorsque j'y songe... c'était même amusant.

Un sourire vil passa sur ses lèvres et il s'approcha un peu de son frère. Méfiance était probablement mère de sureté mais Darren n'avait pas l'intention de l'attaquer. En tout cas pas encore... il voulait d'abord faire mumuse... il reprit sur un ton sarcastique :

- C'est tout de même jouissif n'est-ce pas, de savoir que même Dieu me craint au point de m'envoyer un bras droit... j'espère que ton passage ici t'aura plu. Tu auras au moi appris une vérité : tu perds ton temps. J'aimerais d'abord te poser une question... quel effet cela t'a-t-il provoqué de crever comme un chien dans une cave ? Et de savoir que ta tombe a été nombre de fois dévastée par des "pilleurs"... dont je faisais partie ?

Il le connaissait bien. Trop bien sûrement et cela pouvait être un facteur penchant pour la balance du côté de Darren. L’aîné Roller avait toujours protégé son frère, le couver, tenter de le sauver et donc l’aimer. Après tout, l’amour était le moteur de tout ange, peut importe la vie que l’on a mené, du présent et évidemment conditionne l’avenir. Et cela était tellement maniable, l’amour pouvait être souffrance quand c’était porté à de mauvaises personnes ou alors attaché à des souvenirs dont on arrive pas à se détacher car cela console un peu le cœur, se dire qu’il y a des choses qui nous font du bien au milieu de la mer de malheurs. Mais quand ceux-ci sont torpillés pas des mots durs, des regards glacials, une indifférence, un mépris le plus total de la part de celui qui fut le pauvre jeune garçon chétif qui se faisait taper par une ordure qui se disait leur père et dont Matt tentait de le protéger au maximum. Chose pas facile quand on doit aussi travailler et sortir la tête de l’eau, souffler un peu, avoir un peu de bonheur. Même le plus volontaire des humains devait subir de redoutables échecs. Le plus terrible était devant lui : son frère était un monstre. C’était difficile pour lui de l’avouer, surtout quand on a passé toutes ces années à sauver, du moins tenter, et finalement voir que tous les efforts du monde n’ont pas suffi, que finalement il était tombé, s’était laissé aller à la violence après la mort de Matt. Tout comme leur père après la mort de leur mère si on peut dire. Autant comparer les déjections entre elles, même si cela pouvait être douloureux. Et le petit cœur du blond souffrait, une de ses blessures lui faisait mal. Comme si déjà au quotidien ce n’était pas assez difficile comme ça.

Mais trêve de bavardage, regardons plutôt la scène qui se présentait. Le bon contre la Brute et le Truand qui ne faisait qu’un en la personne de Darren. Deux personnes du même sang, ayant vécu la même chose, ont souffert durant tant d’années ensembles, ont tenté d’être solidaires et Matt voulait l’emmener loin. Il ne partirait jamais sans son petit frère … pourtant c’est ce qu’il avait fait en crevant comme un chien dans cette cave. Il l’avait abandonné lâchement en ayant succombé à ses trop nombreuses blessures physiques. Il garda donc le silence, entrant un peu plus dans son appartement sans trop s’approcher du démon qui s’y tenait. Il l’écoutait en ne le quittant pas des yeux. Darren tentait de lui faire mal … il y réussissait bien mais rien ne laissait transparaître, pas même dans ses grands yeux bleus pourtant, Dieu sait que c’était difficile de tempérer cette tempête d’émotions en lui. Son petit cœur se retournait comme certains corps dans leurs tombes. Il avait passé une vingtaine d’années à tenter de se reconstruire petit à petit mais à croire que comme certains martyrs, il fallait souffrir durant longtemps avant la Délivrance avec une majuscule. Alors il patientait, se disant que Houston savait qu’un jour, Matt serait à bout et là, il pourrait partir en paix. Mais pour le moment, il fallait affronter son passé qui devenait présent et s’inscrirait dans l’avenir. Darren prenait une photo, celle de Rose. C’était l’unique photo que Matt possédait d’elle. Il avait transgressé une règle, quoique pas vraiment puisqu’il ne l’avait jamais vu de ses propres yeux mais il avait envoyé quelqu’un prendre des photos d’elle. Et c’était la seule qui était ressortie bien de la pellicule. Il s’était fait remonter les bretelles par Houston qui lui avait laissé cette unique photo. Et donc la voila en cadre depuis plus de 10 ans. Dessus, Rose avait 14 ans à peine, toute belle avec ses longs cheveux blonds lâchés et ses grands yeux bleus. Comme lui. Il la trouvait un peu trop maigre sur cette photo mais ne connaissait pas sa vie, pensait que peut être elle voulait être mince comme toutes les jeunes filles, diktat de la mode oblige, ou alors mince naturellement. Jamais il n’avait pensé qu’elle aussi avait eu une enfance difficile. Comme lui. Matt détestait qu’on touche à ses affaires.

C’était ton père aussi, souviens toi …

Puis il restait toujours silencieux, le regardant faire tomber un des cadres et déchirer une photo. Tendant sa paume légèrement inclinée, il rassembla la photo et le cadre sans avoir à peine à se concentrer. Ses affaires resteraient intactes, comme ses souvenirs, quoique fasse Darren ce soir. Ce même type qui parlait de lui, lui et encore lui. C’était fou le besoin de parler de soi ainsi tout le temps à longueur de journée mais il se livrait, parlait à son frère de ce qu’il était. Pour une fois qu’un démon ne mentait pas, il ne fallait pas lui brider la parole. Il le regarda s’approcher, ses yeux ne le lâchant pas. Même pas il ne répondrait à sa question. Lui n’avait pas assisté à son propre enterrement, ce que faisait souvent certains anges, Matt avait été envoyé très loin à peine son âme quittant son corps, c’est pour dire. Tout ce qu’il savait, c’est que c’était la ville qui avait payé son enterrement ou personne n’était venu, ses parents étant morts, son frère ayant perdu la raison et sa petite amie ne sachant rien sur cette histoire. Quant à sa mort, ne valait même pas tenté d’y penser …

Sache que je ne viens pas pour te détruire, ni pour te brider. Je laisse Satan s’en charger, lui seul peut le faire. Et Dieu ne te craint pas, il a juste autre chose à faire que de s’occuper de toi. Tu sais, il a un monde à gérer et il faut bien équilibrer les forces. C’est tombé sur moi, je ne pouvais pas dire non. Mais sache que j’aurais donné cher pour rester là où j’étais, bien loin de Los Angeles. Quant à la rédemption, j’y crois que pour les âmes que l’ont peut sauvé. Je constate que pour toi, tout est bien fini depuis longtemps …

Sa voix était un peu teintée d’une certaine douceur, montrant un peu de ses sentiments. Il n’allait quand même pas parler avec mépris. Déjà ce n’était pas son genre et puis il avait quand même son propre frère devant lui et après 27 ans d’absence, Matt ne pouvait pas avoir que des sentiments négatifs, même si son frère était la pire des ordures. C’était dur de haïr quelqu’un quand on a fait qu’aimer, ou tenter d’aimer durant 49 ans. Il n’y a qu’une personne qu’il pouvait détester à ce jour : leur père. Si Dieu prônait l’amour et le pardon, Lance Roller était la seule personne qui ne devrait jamais croiser le chemin de Matt au risque de réveiller une colère enfouie depuis toujours. Enfin, cela n’arrivera probablement jamais, le hasard n’existe pas, n’oubliez pas et Houston devait tout mettre en œuvre pour que l’un de ses meilleurs agents ne pète pas un plomb. Ce dernier qui regardait son frère de la tête au pied et ne put s’empêcher d’avoir un petit sourire aux lèvres. L’heure était grave, deux grandes puissances se tenait face à face dans la même pièce et lui souriait. Nerveux ? Non mais il n’avait jamais imaginé jusqu’à il y a quelques semaines qu’il verrait en face de lui frère, pensant être séparé pour l’éternité. Alors malgré tout, il était un peu content. C’était con ? Oui mais on ne peut pas retenir toutes les émotions.

Tu as bien changé depuis tout ce temps, je ne t’aurais pas imaginé comme ça … Déjà je ne t’aurais pas imaginé mort et peut être pas démon mais bon, tu as décidé de ta propre voie, je n’étais plus là pour te cadrer …

Et il s’en voulait, s’en voudrait pendant longtemps encore. Car en fait, si Matt n’avait pas pardonné à son père, il n’avait pas non plus pardonné à lui-même de s’être fait avoir de cette façon, par derrière, en traître. A avoir laissé son petit frère de 14 ans avec un dingue, même si celui-ci mourut quelques minutes plus tard … Encore une fois son esprit divaguait, les souvenirs lui remontaient et il sentait qu’on voulait percer son esprit. Chose quasi impossible, tout cela était verrouillé, fermé huit fois à clé et cette dernière avait été jeté. Se grattant le cou, son sourire s’effaça un peu et ses yeux étaient toujours fixes.

Cesse de vouloir pénétrer mon esprit Darren s’il te plait. Je ne te laisserai pas me posséder comme tu l’as fait à tant d’autres …

Mais si Matt ne le laisserait pas entrer, d’autres pouvaient le faire …

- Tu ne m'as jamais cadré Matthew... toute ta vie de mortel tu as été impuissant, tu as subi... et aujourd'hui encore tu subis ma décadence. Il est temps pour toi que tu comprennes que par cette blessure au plus profond de toi, tu es faible... vulnérable. Il y a longtemps que j'ai brûlé le peu de considération que je te portais... et malgré cela, tu penses encore, même si tu te donnes des airs de bras droit surpuissant, que tu m'aimes encore un peu... C'est si pathétique l'amour, raconte-moi à quel instant de ma vie, j'en ai été entouré ? Je suis né le jour de ma mort... j'ai recommencé à zéro tout ce que j'avais entrepris. Tout ce passé misérable et abject, je l'ai effacé... de même que j'ai brûlé le peu de photos de toi qu'il me restait. Tu n'as jamais été là pour personne, tu te donnes de faux semblants, des prétextes pour masquer ton échec lamentable... et au comble de l'ironie, tu te prends pour ce stupide Houston, tu crois tout savoir, tu oses me faire la morale alors que moi je n'ai pas été lâche. jamais de ma vie je n'ai tourné le dos à mes adversaires, jamais ! Rien de ce que tu pourras me dire ne me fera regretter le sang que j'ai versé et les cadavres que j'ai fait venir aux Enfers. Le plus drôle dans cette histoire c'est que ton imbécile de patron croit pouvoir se protéger en t'envoyant... Je ne vais faire que blesser plus de monde encore... Tout ce que cet emplumé va faire c'est de répandre encore plus de souffrance.

Les yeux de Darren s'assombrissaient au fur et à mesure. Il cessa le légère pression qu'il effectuait sur l'esprit de son frère. Il lui avait demandé gentiment avec un s'il te plait... Il ricana, tant de pureté l'amusait énormément. Il était bien entendu hors de question qu'il cesse toute tentative, le pire allait venir, très bientôt... Avant il voulait faire saigner ce coeur si petit qui logeait dans la poitrine de cet homme qui était devenu son ennemi principal. Il reprit la parole de la même voix glacée mais cette fois, si, elle était plus puissante, comme si chaque mot prononcé ne faisait qu'attiser sa haine, sa colère et son mépris.

- Tu vas être le premier à payer les pots cassés... Tous ces regrets que tu gardes... toutes ces cicatrices... Je n'ai pas besoin de lire dans ton esprit minable pour le savoir, vous ètes tous les mêmes dans votre espèce à vous emplir le coeur de bétises... Et si seulement tu pouvais t'apercevoir de ta naïveté... tu es attaché au passé ? Tu es encore attaché à apelé cette vermine ton père ? Plus moi. Je n'ai jamais eu de père, je n'ai pas connu ma mère et j'ai oublié à jamais mon frère ? C'est malheureux n'est-ce pas de faillir à sa tâche avec une telle excellence ? Tu as échoué si tu voulais me protéger comme aujourd'hui tu vas encore échouer en tentant de te pavaner devant Dieu. Je n'ai jamais eu peur de prononcer son nom, tout comme je n'ai jamais craint de m'opposer à Satan... Tu n'as jamais vu le lueur des yeux d'un homme que tu abats de sang-froid n'est-ce pas ? C'est dommage, tu rates quelquechose de vraiment jouissif... Ai-je mal tourné, c'est un excellente question, en tout cas aujourd'hui, c'est moi qui détiens le pouvoir... Je te déçois tant que ça pour tu veuilles conserver cette fausse image de moi. Sois réaliste Matthew... jamais tu ne retrouveras ce garçon chétif que tu as abandonné il y a 27 ans...

Et avec un geste de sa main, il commença à se concentrer. La puissance qu'il avait économisée ces derniers jours semblaient au fur et à mesure gagner ses veines. Les lumières vacillèrent légèrement et Darren ferma les yeux. Il sentait un pouvoir infini circuler dans son corps tout entier. La guerre était bel et bien engagée. Les objets alentour tremblèrent, quelques uns tombèrent au sol. Les portes claquèrent toute seule et puis soudain ce fut le calme plat. Comme si l'aura de force qu'avait contracté Darren s'était envolée à jamais. Il rouvrit les yeux, des yeux si sombres que le bleu clair qui les illuminaient d'habitude était devenu comme du noir bleuté. Il regarda son frère droit dans les yeux et lâcha avec un ton méprisant et blessant :

- Tu n'es plus rien d'autre pour moi qu'un tas de cendres... J'ai tué ton père, ton meurtrier... et puis tant d'autres ont suivi. Ce soir, tu vas souffrir, pour avoir osé croire une seule seconde que tu pourrais cautériser cette blessure... là.

Il ouvrit sa chemise au niveau de sa poitrine gauche et mit son index sur la grande cicatrice qu'il avait laissé. Elle symbolisait son passage en tant que Bras Gauche. Cette dernière n'était jamais totalement refermée et comme son frère il avait toujours des traces... bien que les siennes soient moins béantes...

- Je vais faire ce que j'aurais du faire ce fameux soir, où tu n'es pas rentré... tu te souviens, n'est-ce pas, comment pourrais-tu oublier cette merveilleuse soirée n'est-ce pas... Tu as comme un pincement, n'est-ce pas en y resongeant ? Ce soir là, j'aurais dû déjà te mettre face à toi-même devant le miroir, pour que tu vois à quel point tu avais failli... Je sais désormais que la seule façon de te le montrer... c'est de prendre possession de ton âme... et remuer le couteau dans la plaie, jusqu'à ce que tu me supplies de cesser... Le souffrance morale est plus puissante que celle du corps... Il est temps que tu payes !

Et comme si rien ne pouvait empêcher la suite, il déchaîna toute l'énergie qu'il avait accumulé sur l'esprit de Matt. N'importe quel humain aurait immédiatement hurlé face à la douleur. Mais son frère n'était pas un humain, il était immortel... ce qui rendait les choses encore plus amusantes. Le choc les éloigna tous les deux des quelques mètres et Darren sentit peu à peu son frère faiblir... Toute sa haine était placée dans ce flux invisibles qui entaillait leur deux crânes de façon monstrueuse. Rien en l'arrêterait, pas même la douleur.

[Je te laisse le bon soin de mettre en oeuvre notre idée. (Honneur aux dames... PTDR) ^^]

Jamais cadrer ? Pourtant Darren avait vraiment dérapé au moment où Matt avait fermé les yeux. Bon d’accord, son petit frère n’a jamais été le premier de la classe, plutôt la petite terreur des cours de récré. Mais il connaissait quelques notions de valeurs morales et en compagnie de son aîné, il se tenait à carreaux, ne bronchaient jamais quand celui-ci venait le chercher alors qu’il faisait ses petites magouilles. Il ne l’avait jamais totalement cadré mais avait posé des limites et lui apprenait des choses bien. C’était déjà énorme. Comment voulez vous qu’un gamin de 15 ans joue au papa avec un de 7 ans ? Quand il avait 20 ans, Matt était déjà « père » depuis 12 ans, s’occupait de son petit frère en faisant du mieux qu’il pouvait, sans jamais avoir un véritable modèle de père. Enfin, les deux auraient eu un père décent, ils auraient pu avoir une famille et être cadrés. Sûrement que ni l’un ni l’autre ne seraient là, l’un ange l’autre démon, à s’affronter. Enfin c’était le Bras Gauche qui faisait son show tandis que le Bras Droit se terrait dans le silence. Non pas qu’il n’avait rien à dire, au contraire il aurait des milliers de choses à remettre en place dans le discours de victimisation de son frère. A l’entendre, il a été le garçon le plus malheureux du monde et que personne ne s’est jamais occupé de lui. Bon d’accord, son enfance n’a pas été des plus roses, c’était certain mais lui avait toujours son grand frère pour le protéger, le consoler … Mais Matt, qui avait il pour le protéger ? Personne, lui avait toujours été seul face à son père, face à la vie et l’avait affronté. Au nom de quoi ? De son amour, de l’amour qu’il avait en lui et qu’il donnait. Aimer lui avait donner la force d’avancer car il n’était pas tout seul dans sa vie. Il aurait été fils unique, peut être aurait il tenu moins longtemps ou aurait fugué plus vite, sans aucun argent. Mais là, il avait appris la responsabilité, affronter les obstacle et non les fuir … Darren ne voyait pas sous le même angle mais tant que Matt croyait à ce qu’il vivait, aux choix qu’il avait fait. Ce qu’il regrettait, c’était d’avoir attendu un jour de plus pour un peu plus d’argent dont il ne verra jamais la couleur. Et ça avait tout bouleversé sa vie et celle de son petit frère. Dans une voix emplie malgré tout d’amertume, on sentait le jeune homme blessé. Vieille blessure appuyée trop fortement saignait des larmes de regret.

Tu me dis tout ça mais j’ai l’impression que tu as omis beaucoup de détails et tu as réécrit l’histoire comme tu le voulais. Quant à mon Patron, laisse le là où il est. Je suis là à présent alors si tu as quelque chose à dire contre les Anges ou contre ce que tu détestes, tu t’adresses à moi sans apostropher qui que ce soit d’autre.

Le ton était un peu sec mais c’était le malheur qui faisait faire cela. Pleurer ? Matt ne le faisait que très rarement, il avait même oublié la dernière fois qu’une larme avait coulé sur sa joue. Alors plutôt que de montrer réellement sa peine, il la cachait tant bien que mal. Cela revenait au même mais il n’y avait pas cette preuve physique de cette petite larme qui coulait, cette gouttelette d’eau qui montrait l’ampleur du mal qui le rongeait. Qui, avec un semblant d’humanité et de cœur, ne pouvait pas avoir mal quand la seule raison de survivre durant toute sa vie de mortelle vous assenait de mots brûlants de méchanceté, de cruauté même, vous disait que vous n’existiez plus à ses yeux ? Il était dur pour Matt de rester le plus neutre possible. Non, il était bien trop sensible malgré cette grande force qu’il avait apprise durant toutes ces longues années sur Terre et en tant qu’ange. Non pas qu’il tente d’embellir sa vie, non il conservait dans un coin de sa tête le moindre coup, la moindre insulte, le moindre baiser aussi. Mais jamais il n’avait tenter de faire de sa vie un monde idéal. Ce que disait Darren était faux, totalement. Leur père ? Pour lui n’était qu’un être abject. Leur mère n’était pas une mère au sens propre mais avait la décence de ne pas taper, juste ignorer. La solitude ne se traduisait pas par des ecchymoses sur le corps au moins, ni par des séjours à l’hôpital. Il secoua la tête en plissant ses doux yeux bleus, calant sa respiration pour ne pas hoqueter ni même vomir car l’envie lui montait depuis quelques instants déjà.
Dis toi que tu n’es plus le centre de ma vie depuis bien longtemps. Cela fait des années que je sais que tu n’es plus mon petit frère de 14 ans à qui j’ai fait une promesse que je n’ai pas pu tenir à cause de cette ordure qui se disait être notre père … C’était le tien aussi ! Et malgré tout ce que tu penses, je tiens à t’annoncer une nouvelle sur les anges : on ne pardonne pas à tout le monde. J’ai beau avoir crevé comme un chien il y a 27 années de ça, jamais j’ai pardonné à Lance. Et je ne pourrais pas, je le sais, même si je restais un millénaire sur cette Terre. Arrête de vouloir modeler le monde à ta façon, tu n’y arriveras pas. Les deux places sont prises depuis longtemps et l’on ne risque pas d’embaucher.

Il ne se cherchait pas d’excuses ni même de pardonner à Darren, cela c’était sûrement trop tard. Il rétablissait la vérité, c’était tout. Il ne pouvait mentir et se taire maintenant était trop dur, son cœur saignait de l’amertume mélangé à de la tristesse. Sa boîte de Pandore tentait de s’ouvrir mais avec toute la force de son âme, Matt arrivait à la garder close. Et ce, même si le démon face à lui tentait de l’ouvrir, de forcer la serrure pour découvrir le plus profond de son âme. Mais il sous estimait la force de Matt, malgré ses airs malheureux, il avait la grande capacité de se sentit puissant sans même forcer, sans même lever un petit doigt. Tout se passait à l’intérieur, ni le chagrin qui le ravageait ni son frère qui lui montrait une blessure ne semblait y faire quelque chose. Il restait obstinément fermé à toute intrusion et se redressa, le dos droit et le regardait dans les yeux. Ce fameux soir où il n’était pas rentré ? Pour la première fois, le jeune homme avait voulu vivre un peu comme tout le monde. Ce n’avait pas été le bon soir, son frère avait failli en mourir. Une fois il avait été égoïste réellement dans sa vie d’humain. On fait tous des erreurs non ? Puis il se sentit reculer, son frère mettait tout en œuvre pour le détruire mais rien n’y faisait, l’aîné Roller était beaucoup vigoureux qu’on ne pouvait le penser. Darren semblait y mettre toute sa volonté mais rien n’y faisait.

Ce ne fut pas lui qui provoqua ce qui allait suivre. Enfin si mais il n’était pas entièrement responsable. Il se produisit quelque chose d’étrange. L’espace de quelques secondes, Matt n’y vit plus rien, une lumière blanche l’aveugla et dans sa tête il y avait comme un millier de marteaux piqueurs qui tambourinaient en cœur. Cela lui faisait mal et il courba le dos tout en fermant les yeux et mettant les mains sur ses oreilles. Il sentait son esprit s’ouvrir mais ce n’était toujours pas Darren qui faisait cela, c’était une force plus puissante encore. Les verrous de son âme sautèrent un à un pour ouvrir des portes de souvenirs. Et dans sa tête revint en mémoire un évènement récent, sans comprendre quelconque lien avec ce qui se passait

**Début flash-back**
C’était il y a quelques semaines, trois si on voulait être précis. Ce jour là, il avait décidé de prendre une après midi de congé pour pouvoir déstresser de son nouveau boulot. Tranquillement, il se mit en marche pour se détendre et alla jusqu’à chez lui. Sans vraiment savoir, l’Ange prit sa voiture pour la première fois. Son Alfa Roméo blanche, cadeau de Houston pour son retour pour qu’il puisse se déplacer. Cela faisait plus de vingt ans qu’il n’avait pas conduit et pourtant démarra pour faire un tour. On aurait dit un jeune conducteur maladroit qui ne savait pas trop comment s’y prendre encore, les gestes imprécis et un respect scrupuleux du code de la route. Et sans savoir où il allait, sur un fond de musique grâce à la radio qui passait les nouveaux tubes à la mode, il s’était dirigé jusqu’à Little Italy. Ce fut là où il faillit avoir son premier accident en manquant de renverser une jeune femme blonde et un peu déboussolée qui s’était presque jetée sous ses roues. Sans se soucier de la circulation, Matt s’était arrêté et avait pris de ses nouvelles, espérant ne pas l’avoir traumatisée.

Cette femme était Rebecca Hennessy, il la connaissait au travers de son dossier puisqu’elle avait affronté Darren. Mais à cause des conducteurs derrière lui, il avait du la laisser là pour se garer et aller manger au restaurant. Et là, quelle ne fut pas sa surprise d’y retrouver la jeune ange, seule à une table, à laquelle il s’invita poliment. Et la discussion commença, malheureusement Matt arrivait à capturer des bouts de son esprit sans le vouloir. On y entendait la douleur, la peur … Peur qui avait pour nom Darren Roller. La jeune femme souffrait malgré son joli sourire et parler de son café à la couleur de l’Italie. Et en ce début de repas, il ne fit pas mention de son nom de famille pour la préserver, pour ne pas lui faire peur.
**Fin du flash-back**

Il rouvrit les yeux, surprit de se remémorer cela. Ses pupilles azurs s’écarquillèrent de surprise, ne sachant que penser un instant puis regarder son démon de frère, il fit la même stupéfaction.

Tu as vu comme moi n’est ce pas ! Tu as ressenti toi aussi tout ça, ce n’est pas toi qui a déclenché CA ! Tu as malgré tout vu dans mes pensées Rebecca. Cette jeune femme que tu as traumatisé, dont tu as failli faire enfermer son ami John Silver, maintenant promu et tu as été la cause de l’exil des miens. Sur ton passage, tu sèmes la terreur, la menace pour te faire imposer le respect. Mais cette jeune femme t’a échappé, elle s’en sort comme elle peut et s’allie avec les siens, donc avec moi.

La stupéfaction et la surprise se lisaient dans sa voix comme sur son visage. Puis au fil du discours, il y avait aussi eu du désarroi. Il avait encore une fois ressenti les souffrances de Becca comme quand ils étaient tous deux au restaurant. C’était fou d’avoir des souvenirs aussi précis et aussi fort. On aurait dit que quelqu’un se jouait d’eux et instinctivement, il leva les yeux au ciel, cherchant une réponse. Pourquoi ? C’était obsédant.

Mais déjà tout reprenait et cette fois, ce fut Darren qui fut pris de ces mêmes douleurs. Et si on se jouait d’eux ? Matt allait assister à un souvenir de son frère aussi ? Il voulait savoir qui commandait cela et pourquoi. Mais pour les réponses, il faudra attendre plus tard.

Au début, Darren crut qu'il avait anéanti les verrous de l'esprit de Matt. Mais alors qu'il s'attendait à lui faire revivre l'instant où il mourrait comme un chien dans la cave, il fut totalement décontenancé face à ce qu'il vit... Becca ??? Mais qu'est-ce que cette stupide blondasse faisait là ? Il s'en moquait désormais, il la gardait pour les jours de disette... Lorsque la vision eut disparue, Matthew lui adressa un régard stupéfait, tout comme il l'était. Qeu s'était-il passé ? Il n'avait pas pénétré son esprit pour passer ce moment stupide de sa misérable existence, il n'y avait là pas de quoi le faire souffrir. Darren voulut retirer son esprit dans un deuxième temps... mais il n'y parvint pas, comme s'il avait été bloqué à l'intérieur. Son frère tentait-il de le piéger dans son amour déplaisant, parmi les pensées les plus pathétiques qui composaient sa lamentable existence ?

Loin de là... car bientôt il se sentit submergé à son tour, comme si son frère ripostait, il sentait une puissante déferlante arriver vers lui sans possibilité de briser le lien. Il regarda son frère droit dans les yeux et entama une longue resistance. Un léger rictus de douleur passa sur son visage, il était en train d eperde le contrôle. Il sentait sa tête bouillir, comme si elle saignait de l'intérieur... Impossible que ce soit Matt ! Il n'oserait jamais l'attaquer ainsi, c'était contraire à ses principes et surtout il était trop bête pour le faire. Il ferma les yeux, opposant toutes les forces dont il disposait pour parer cette force implacable. Malgré tout, il échoua et ce fut une explosion dans sa tête, lorsque ce souvenir lui fut arraché pour être montré aux yeux de son frère. En général il faisait subir ça aux autres mais n'avait jamais vécu l'expérience, il y avait un début à tout...

*Début du flashback*
Il était dans son bureau au Luxurious Club, la veille... Satan se trouvait dans la pièce, totalement inutile comme d'habitude. Il n'y avait entre eux qu'une haine cordiale, Darren rêvait un jour de prendre sa place mais pour l'instant il s'en tenait à satisfaire ses intérêts... Et là, ce soir, ses intérêts étaient destinés à porter un sérieux coup à son frère... Il avait tout mis en oeuvre pour y parvenir, le sacrifice d'enfants, l'alliance avec un autre Bras Gauche, juste pour partager cet instant de cruauté animale et pour blesser son misérable frangin. Matthew put distinguer alors le dossier, ouvert sur une photo celle de sa fille. Il pouvait alors se rendre compte que Darren lui plantait un poignard dans le coeur... il voulait toucher à sa fille...

" Je te présente, Rose... cette traînée est ma nièce... plutôt sympa n'est-ce pas ? Si nous partions depuis le début... car je doute que tu sois au courant, vù le nombre de jours que tu mets à venir jusqu'à moi pour me menacer... L'autre abruti qui te sert de frein sur les décès infantiles est un petit fûté. Pendant que toi, tu te prélasses sur ton fauteuil, lui agit... Matt est revenu, et ce n'est pas pour rien... La plus grande menace à l'heure actuelle, c'est moi, Houston ne cherche donc qu'à m'anéantir pour te mettre en échec. Au moins, il y en a un des deux qui est intelligent... Donc, Matt est là pour me sauver en quelque sorte. Ce que je t'ai jamais dit, ce que je surveille sa fille de loin... je sais où elle est... Et tu vois, là où l'avenir se fait sombre, c'est que je doute que Matt soit aussi faible que Silver ou l'autre blondasse... Bien au contraire, il est fort, puissant... j'ai enfin un ennemi à ma taille ! Mais voilà... Houston n'est pas bête, il sait parfaitement, tout comme moi, que cet affrontement dévoilera une faiblesse... je ne sais pas encore laquelle mais il n'enverrait jamais un de ses bras droit les plus aguerris pour faire mumuse... ou alors pour que je lui le renvoie les pieds sur le ventre... Donc, avant que ton total opposé ne te porte un coup grave, je prévois mes arrières... Le plus touchant c'est que lors de ma défenestration, Houston était triste... Ces imbéciles s'ont incapables de ne pas aimer même la pire des pourritures ! Matt a toujours aimé ceux qui l'entouraient... et le comble, c'est même s'il n'a jamais vu sa fille, je suis persuadé qu'il l'aime énormément... Sa première faiblesse, c'est moi... et sa seconde c'est sa fille. L'emplumé a voulu nous doubler mais, le dossier devant toi est la personne qu'il te faut marquer. Ainsi, nous jouerons sur le même pied d'égalité. Je ne suis pas du genre à dire ça mais, il faudra la marquer après notre rencontre... une fois que Matt aura fait ce qu'il devait faire. Ainsi, nous équilibrons les choses et cela va rabattre le caquet de l'emplumé. Ou alors, tu peux toujours me bannir, si ça te chante, personellement, je m'en moque, je ne regrette ni le geste que j'ai fait sur la gorge de ces demi-portions ni celui que je vais faire en te proposant de marquer cette fille. Comme toute guerre a ses sacrifices, le tien a été de rencontrer et de délibérer avec Houston, tout Maître a ses stratèges !"

Et à Satan de répondre, de sa voix diabolique, sur ce même ton qu'il conservait au long des années. Matthew n'avait pas connu le Maître, et heureusement pour lui, car il ne serait plus face à Darren désormais. Le Roi des Enfers le remit à sa place avec toute la sympathie dont il pouvait faire preuve et clama qu'il ne marquerait pas sa nièce. Un long débat s'ensuivit quant à la suprématie de Satan... et puis, il y eut ses mots lâchés par Darren lui même, à voix haute mais cette fois Matthew put également lire le plus profond de sa pensée :

- Peut-être n'y a-t-il jamais eu de véritable vainqueur en enfer... mais plutôt un vaincu... résigné à obéir aux règles qui ont damné son âme...

"Satan n'a jamais été vainqueur... c'est un vaincu de seconde zone... Houston a bel et bien raison... il ne me sert à rien de servir un perdant..."

Satan eut beau répliquer, voilà pourquoi Darren restait calme alors que le Maître des Enfers partait. Il savait bien pour qui il avait prononcé ses mots...
*Fin du flash-back*

- C'est à ça que tu veux t'amuser... Tu crois sincèrement que pénétrer dans mon esprit pour y lire ce que j'ai t'aidera à éviter ton sort ? Continue à fouiller... il y a des choses beaucoup plus froides, plus cruelles à regarder... et je ne censure jamais rien... Quoique tu veuilles faire en t'introduisant dans mes pensées, tu vas t'y brûler les ailes... Houston doit surement t'aider, la lâcheté c'est son attitude préférée !

Il se doutait bien que son frère aurait une autre blessure sur le coeur en sachant que l'oncle de sa fille, voulait la marquer... et pire...il y était parvenu. Un sourire cruel passa sur les lèvres du Bras Gauche et il lâcha sur un ton amusé :

- Ne crois pas que Satan va laisser ta fille tranquille... Il la marquera, et c'est pour très bientôt... N'oublie jamais qui en a donné l'idée... c'est moi qui ait conseillé sa tête... sans aucun regret...

Mais déjà il sentait son mal de tête partir en même temps que la force qui l'habitait. Au lieu de disparaitre, cette dernière semblait vouloir atteindre Matt, encore une fois... Comme si des deux frères, plus aucun ne devait avoir de secret pour l'autre... S'il n'y avait que ça... Darren ne se montrerait pas aussi content de pouvoir percer à jour les intimes pensées de son frère...

Mais qu’est ce qui se passait ? Pourquoi Matt avait il eu cette vision et avait l’impression que Darren avait pu la voir aussi sans vraiment le vouloir. C’était certain, le cadet Roller n’avait pas pu faire cela, déjà il n’aurait pas choisi ce souvenir mais un plus poignant, mais surtout son aîné était plus fort et beaucoup plus résistant que cela. Donc il y avait quelqu’un, enfin plutôt une force qui les poussait à rester dans l’esprit de l’autre sans pouvoir s’en détacher. La pression était trop forte. Matt avait pu se relever après sa vision, sans vraiment comprendre tout ce qui se passait. Son frère n’était pas des plus au courant non plu, semblait tout aussi surpris que son aîné de ce qui se passait. De toutes manières, les visions reprirent mais cette fois-ci ce fut le démon qui allait donner un bout de ses obscures pensées. Et cela risquait de ne pas être des plus gais mais aussi des plus surprenants …

Matt vit Satan en compagnie de Darren. Jusque là rien d’étonnant, lui aussi rencontrait Dieu pour discuter. Mais ce ne fut pas cela qui l’interpella, ce fut leur sujet de discussion. Il parla de sa fille ! Sa petit Rose, appelée traînée par le Bras Gauche et qu’il voulait marquer pour faire souffrir notre Ange. Il allait s’en prendre à une innocente, la personne qu’il n’avait jamais pu voir de ses propres yeux car il lui était interdit de l’approcher. Non, ce n’était pas possible, on ne pouvait pas jouer avec la vie de son enfant ! Il ne laisserait personne lui faire du mal … Bon là, il arrivait certainement trop tard, la vie de Rose n’avait pas été des plus douces ni des plus heureuses. Mais il ne voulait pas que Satan la marque, elle était déjà sous la coupe du Bien, avait la même destinée que son père. En vivant le plus longtemps possible, du moins il l’espérait. Sans pouvoir savoir grand-chose de sa vie, il était heureux qu’elle soit toujours en vie et qu’elle se battait pour poursuivre dans cette voix. Il ne savait ni où elle vivait, ce qu’elle faisait, qui elle aimait, ce qu’elle aimait … Mais était fier de sa petite Rose. Et puis pas besoin de grand-chose pour se sentir père, il n’y avait qu’à se remémorer quand il avait appris la nouvelle, tout heureux d’avoir un enfant, se sentir près à s’en occuper même si cela était difficile. Il n’avait pas pu s’en occuper mais l’avait toujours aimée quand même. Satan refusait de la marquer mais il y avait ce pressentiment au fond de lui, une boule dans le ventre qui n’annonçait rien de bon. Instinct paternel ? Peut être, ou alors son sixième sens qui le prévenait de quelque chose. Mais il n’eut pas le temps d’y penser, le souvenir s’effaça et la voix de Darren fut vraie celle là.

J’ai rien fait ! Je m’en fous de ce que tu fais de ta vie, de ce que tu peux bien occuper tes journées. Je déteste pénétrer dans la tête des gens. Ce don de télépathie est un poison pour moi, je ne veux pas savoir ce qu’il y a dans ta tête. Ce n’est PAS moi qui m’amuse à faire ça !

Il disait la vérité, un ange ne mentait qu’en cas d’urgence ? Et là ce n’en était pas une, il n’y avait pas de nécessité à mentir, Matt disait la stricte vérité, il se sentait comme emprisonné dans la tête de son frère et incapable de s’en sortir. Sinon, croyez le qu’il l’aurait fait depuis longtemps. Ne voulant pas savoir que son propre frère voulait faire marquer sa propre nièce. D’ailleurs, celui-ci reprit la parole, persuadé que le Maître allait marquer Rose. C’est bien ce que craignait Matthew, cette peur au fond de lui allait sûrement se concrétiser. Mais Darren en semblait fier d’être à l’origine de cette ignominie, c’était vraiment un monstre et en touchant la jeune humaine, il savait qu’il touchait directement le Bras Droit. Là c’était en plein cœur, cela attaquait directement le plus profond de son être.

Il sentit en lui quelque chose monter. Vous savez, quand on enfouit trop longtemps certains mauvais sentiments, ils peuvent ressortir tôt ou tard. Et là, ce fut le cas. Matt avait beau être une crème en temps normal, un amour de garçon, il ne pouvait pas moins ne plus être dans son état normal quand on touchait aux gens qu’il aimait. Son père avait eu le droit à sa colère déjà et là maintenant ça remontait. D’un coup, il courut en direction de son frère et lui colla un poing dans la mâchoire avec une force que lui-même ne se croyait pas capable. Cela ne lui fit même pas mal à la main tellement il était en colère, mais par contre Darren avait bien du sentir passer le coup !

ORDURE ! Tu oses toucher à ma fille !!

Mais cela s’arrêta là, le mal de crâne lui revint encore et il dut faire quelques pas en arrière en se tenant la tête dans les mains, serrant les dents pour ne pas crier de douleur, cela faisait déjà un peu plus mal que la fois précédent. Et il était certain que cela allait monter crescendo si d’autres souvenirs allaient remonter. La lumière blanche fit encore son apparition, un autre verrou de son âme sauta et un souvenir s’ouvrit.

**Début flash-back**
La deuxième semaine de son arrivée, Matt tournait en rond dans cet appartement que le Seigneur lui avait donné en cadeau de retour. Il se sentait compressé, un mal de crâne insupportable, le décalage horaire lui faisait encore défaut. Après une décennie avec un certain mode de vie, dur de s’en défaire en quelques jours seulement. Il était 4h du matin, il faisait sombre, seule les lumières de la ville donnaient un peu d’éclairage. Assis sur son canapé, habillé, il faisait une pause au milieu des cartons. Au tour de lui, certains objets rentraient dans les cartons par la seule pensée du jeune homme. Puis tout se suspendit et il y eut comme un courant d’air qui s’engouffra dans la pièce, faisant frissonner le Bras Droit avant d’entendre une voix venir de partout et nulle part lui parler.

Matthew !

C’était Houston qui lui parlait. Matt s’était toujours senti un peu privilégié que le Grand Patron lui donne autant d’importance comme cela, à venir parler avec lui, le conseiller et le raisonner. Là ce serait pour la dernière solution même si le grand blond semblait résigner.

Je m’en vais, je rentre chez moi !

Mais tu es chez toi.

Non, ici ce n’est qu’un appartement où il y a des souvenirs ma vie, j’y dors, j’y mange, j’y bosse mais ce n’est pas chez moi ! Ici, je ne m’en sors pas, rien n’est pareil, j’ai l’impression d’étouffer sous ce climat sec, dans un métier de bureau et surtout sentir toute cette pression. Là bas, je n’étais pas celui qui était tant attendu pou venir les sauver, j’étais moi et je faisais mon boulot comme tous, sans avoir l’impression de me sentir à part. Ici, je suis une espèce de sauveur, je refuse d’être considéré comme ça ! Tout le monde croit que je suis tellement puissant que je peux détruire Darren. Mais comment voulez vous que je détruise mon propre frère ? C’est impossible à mes yeux, il est de mon sang et malgré toutes les horreurs qu’il a fait, fait et fera, je ne peux pas et je ne veux pas qu’on me pousse au combat contre lui. Je n’en aurais pas la force …

Il s’était levé pendant son discours et levait les yeux en l’air. Tout mortel l’aurait pris pour un fou mais l’avantage est qu’il vivait seul. Il se sentait seul de toutes manières et ça, Houston pouvait le ressentir où qu’il soit. Mais le jeune homme reprit.

Cela aurait été n’importe qui d’autre, j’aurais lutté comme on m’a appris à faire depuis toujours. Mais là, non. On a qu’à envoyer quelqu’un d’autre, certains seraient sans doute ravis de vouloir sa peau. Moi, je veux juste qu’on me laisse tranquille, je crois avoir assez donné, j’aimerais juste pouvoir me sentir vraiment bien, qu’on me laisse mon entourage. Ici, je suis seul et vous savez comme moi que quand je suis dans cet état, je ne peux rien faire ! Je retourne chez moi, là où vous m’avez envoyé pour m’éloigner de ce monstre qui est mon frère ainsi que mon pire ennemi !!

Et d’un geste de mains, il recommença à ranger ses affaires, dos à la fenêtre quand soudain il se sentit pétrifié. Il était là, sur son balcon, on pouvait ressentir toute Son aura et Sa puissance qu’elle en était presque palpable. Cette même puissance qui pétrifia le jeune homme dans ses mouvements, le dos droit et sans qu’il fasse un simple mouvement, il se retrouva face à son Patron qui l’avait tourné. Toute la bonté du monde se lisait sur ce doux visage qui devait encore une fois mettre son protégé dans la bonne direction.

Matthew … Après toutes ces années tu doutes encore de ta force, c’est fou, je me demande en quelle langue je devrais te le dire. Ta force est aussi ta faiblesse aux yeux d’un démon : l’Amour. Tu as survécu dans ta vie humaine par amour de la vie, l’amour de ton frère, l’amour d’Erin. En tant qu’ange, c’est l’amour pour les autres que tu as donné, ainsi qu’à ta fille. Tu as aimé, toujours, c’est un peu ton oxygène, ton leitmotiv. Bien sûr, tu as endossé des horreurs mais regardes où tu en es, tu en es sorti que plus fort encore. Tu vas donc rester. Je ne te demande pas de détruire ton frère, juste de rétablir un équilibre car avec Darren, il y a un penchant net pour le Mal et je n’ai que toi pour m’aider. Tu peux y arriver, tu sais autant que moi que tu es capable. Alors tu déranges les cartons et tu restes. Il n’y a plus à discuter Matthew.

Il frappa dans ses mains et tout revint à sa place juste le temps que le jeune homme blond pousse un long soupir.
**Fin du flash-back**

Crois moi que si je suis resté, ce n’est pas pour te détruire ni même pour te revoir un jour. Je l’ai fait au nom d’un Equilibre qu’il faut respecter et que je sais que si Dieu me dit de rester, c’est toujours pour une bonne raison ! Alors tu n’es pas le centre de ma vie et je ne m’éclate pas à lire dans tes pensées !

Il détestait sentir son âme qui se mettait à nu comme ça mais apparemment, cela n’était pas près de s’arrêter. Et il n’était pas le seul, Darren lui aussi ouvrait son âme aussi sombre que ses yeux. D’ailleurs cela recommençait …

Darren avait laissé approcher son frère et n'avait pas tenter d'esquiver le coup. Il se contenta de sourire, les lèvres rougies par le sang. Il avait obtenu ce qu'il voulait, Matt était autant en colère contre lui que contre son père... Il avait enfin atteint son coeur en plein centre et à cette idée, un éclair de malveillance passa sur son visage. Il regarda son frère avec un regard toujours aussi sombre. Et puis, il sentit Matt faiblir... Alors, sans aucune marque de pitié, il décida de faire mal pendant que l'esprit de son frère s'ouvrait à nouveau. Mais comme la première fois, le souvenir qui se réveilla n'était pas le bon.

Que se passait-il ? Pourquoi n'arrivait-il pas à lui faire revivre ce qu'il voulait ??? Avait-il raison, une force agissait-elle entre eux ? Ce n'était absolument pas dans le genre de Matthew de lire les pensées. Les anges considéraient tous cela comme une violation de la pensée humaine... Darren méprisait cette idéologie et tant par les mots que par la pratique qu'il faisait de son pouvoir de télépahtie. Il aimait s'en satisfaire... Faire sauter les tourments et els repasser dans la tête de ses victimes, humaines ou pas, était pour lui un réel plaisir... La souffrance physique était utile mais elle avait ses limites... alors qu'avec sa torture mentale, il faisait très mal, et c'était ce qui venait de survenir sauf qu'il ne l'avait pas fait exprès... Matt avait lu un des souvenirs les plus récents, celui qui concernait sa fille... Mais maintenant, Darren en lisait un à lui...

Il trouvait son frère pathétique... Un équilibre à conserver... Dieu l'avait fait revenir par crainte. L'imbécile ne pouvait pas rivaliser avec lui et l'attitude de son frangin l'écoeurait... Comment pouvait-il être si lâche au point de vouloir fuir ? Il ne voulait pas d'affrontement pourtant c'est ce qui se produisait en cette nuit à Hollywood. Il se délecta de cette impuissance... cette force que Houston mentionnait n'était pour lui qu'une faiblesse de plus dans le caractère pitoyable de Matthew. Une cicatrice béante, un trou dans un mur... Et lorsque la forteresse était prise d'assaut comme maintenant, il suffisait d'un petit groupe de soldats pour saboter le reste... Oui, car le coeur de Matt n'était qu'un misérable compartiment fragile... une absurdité... Darren avait entaillé la mince couche d'armure et maintenant il saignait... Lorsque les visions cessèrent, il parla enfin, d'un ton méprisant :

- Regarde-toi... on dirait un bébé qui pleure parce qu'il va retrouver son frère et qu'il doit l'empêcher de nuire... Je ne pensais pas dire ça un jour mais tu es encore plus stupide que Houston... Tu aurais mieux fait de rester où tu étais, là bas tu ne manquais à personne pas même à ta traînée de fille qui ne sait même pas qui tu es... et le pire c'est que tu te vantes de pouvoir maintenir l'équilibre. Il n'y a jamais eu d'égalité entre nous... c'est moi qui ai souffert, c'est moi qui ai pris le plus de coups... c'est moi aussi moi qui ai le plus tué... Tu veux maintenir un semblant de paix entre deux ennemis... Quelle attitude louable, je l'ai déjà dit à ton abruti de patron... je me moque royalement de l'équilibre, je ne souhaite plus qu'un chose : détruire les individus de ton espèce comme je viens de détruire le peu d'amour que tu conservais de moi... Quoique tu fasse, rien ne changeras jamais... je n'aurais de cesse de tous vous anéantir !

Mais peu à peu il sentait une force approcher. Un puissant raid mental qui faisaient craquer les barrières de son esprit. Il rassembla toutes ses forces pour lutter. Les lumières vacillèrent, son visage se durcit... Autour les objets tremblaient autant par la puissance des deux forces qui s'affrontaient que par la motivation personnelle de Darren. Il ne laisserait personne pénétrer dans ses songes. Il y eut une trentaine de secondes de flottement, comme s'il avait réussi à parer mais soudain une déferlante les mit à terre, autant lui que son frère. La puissance était telle que les objets en furent propulsés un peu partout. Darren tomba à terre et à nouveau son esprit sombre fut éclairé par une bien mystérieuse lumière...

*Début du flashback*
Il était à nouveau au Luxurious Club, assis à son bureau, cigare à la main, un homme vétu de noir, d'une trentaine d'années était assis là. Il avait ouvert un livre sur son bureau, un vieux bouquin poussiéreux qu'il avait volé à la bibliothèque. Le numéro de la page était 66. Elle relatait par une coupure de journal le sombre soir où il avait tué son géniteur. Darren dit à son énigmatique interlocuteur :

- C'est étrange le degré de vérité qui se lit entre les lignes... De toute façon cela ne perturbe en rien mes plans... au contraire, je ne fais que les affiner. Mais toi tu es un sombre crétin si tu penses que je cours à ma perte... Mon frère n'attend qu'une chose... que je vienne, il est trop bête pour oser m'approcher. Dans deux jours, heure pour heure, j'irais le faire souffrir... encore une fois...

- Et s'il s'attendait à ce que tu y ailles ? S'il était préparé pour ça, et qu'il gagne...

Les yeux de Darren s'assombrirent et d'un signe de main il envoya son couteau en plein coeur de l'homme. Un sourire malveillant passa sur son visage et il se leva. Soit cet homme était fou, soit il était bête... enfin non, il ne s'agissait pas d'un homme mais bien d'un démon supérieur vù qu'il retira l'arme avec une grimace de souffrance. Alors Darren assaillit son esprit et chercha la moindre faiblesse... qu'il trouva bientôt. Durant sa vie de mortel, cet homme avait perdu son jeune fils... cette plaie encore ouverte servit donc de terrain de prédilection pour le Bras Gauche.

" Meurtrier... c'est toi qui a tué ce bout de peau rose... c'était ton arme de service que tu as eu la flemme de ranger pour t'envoyer cette petite prostituée..."

- Non... pas ça... pitié...

- Ne contredis jamais ce que j'affirme... je pourrais te briser avant que tu ne comprenne ce qui t'arrive...

" Meurtrier... la vie que tu as ôté... maintenant tu la traînes comme un fardeau. Tu ne te l'as jamais pardonné n'est-ce pas ? Tu comprends maintenant pourquoi je vais gagner... Parce que mon frère se croit responsable de ce qui m'est arrivé... et mieux que tout, il l'est... Lui aussi n'a pas été là au moment primordial... dans un pur moment d'égoïsme... Le monde n'a pas de Justice... n'oublie jamais que quelqu'un a été là pour t'enfoncer mais jamais pour te relever, maintenant, dehors !"

Le démon supérieur s'exécuta sans demander son reste, se tenant la tête et ses yeux larmoyants. Darren verrouilla la porte après sa sortie et sortit du tiroir une vieille photo de Matt et lui.... Il la regarda un instant puis d'un geste dénué de tout sentiment, il lâcha :

- C'est pour bientôt... sale engéance !

Et il écrasa son cigare sur le visage de Matthew.
*Fin du flashback*

Il se releva tant bien que mal les yeux fixés sur son frère toujours au sol. Il n'avait jamais autant jubilé qu'à cet instant là... Il avait ce pathétique être devant lui. Il lui lança d'un ton mauvais :

- La pire erreur pour toi aura été de naître, je suis le résultat de tes années d'existence et ta fille va devenir pareil que moi... je vais m'y efforcer. Toute ta vie n'aurait abouti qu'à un échec lamentable...

Frapper n’était pas son genre, cela n’était plus arrivé depuis bien longtemps. Et avec autant de rage, depuis sa vie mortelle cela ne s’était pas produit. Vous imaginez alors la force du coup et toute la colère accumulée au fil du temps, la plupart s’était libéré d’un coup, un coup de poing dans le visage de son frère qui avait eu de fait de le faire saigner. Le pire était que Darren était satisfait de cette situation, c’était exactement ce qu’il avait voulu et l’ange était tombé dedans le cœur le premier. Mais rester impassible aurait été impossible, cela n’aurait fait que traduire sa tristesse et l’aurait frustré un peu plus. Non, il ne s’en voulait pas, son frère avait mérité ce coup et encore, la force n’avait pas été suffisante. N’empêche, il avait frappé son propre frère, celui qu’il avait protégé durant des années de ceux de son père, drôle de paradoxe tout de même. Mais tant pis, cela était fait et Matt n’avait pas à s’en excuser. Si Darren disait avoir oublié son frère et tout l’amour qui existait, Matt non. Et puis s’il perdait un frère, il avait toujours une fille et le jeune homme se devait de la protéger, il ne se le pardonnerait pas s’il lui arrivait quelque chose au cours de sa vie ou si elle venait à mourir trop jeune. Houston lui avait promis de veiller sur elle mais que parfois, les hommes étaient cruels entre eux et qu’on ne pouvait pas toujours prévoir leurs réactions. Ainsi était la vie, n’est ce pas ?

Son souvenir sur sa tentative de départ n’était pas des plus glorieux. Le Bras Droit s’était allé à un trop grand moment de faiblesse et avait voulu fuir ce qu’on lui proposait comme un ado rebelle. Mais on ne dit pas non à Dieu, pas même le plus puissant des Anges. Tout le monde croyait que s’il était là, c’était pour détruire le plus puissant des démons qui se trouvaient être son propre frère. A la base, on ne peut pas détruire un démon, on peut l’amoindrir, l’affaiblir par des points stratégiques qu’il faut rechercher. Mais quand il s’agit de son propre frère, il n’y a plus cette envie de vouloir maintenir l’équilibre, on le fait plus par devoir qu’autre chose, c’est presque une corvée, un fardeau à porter au quotidien. Houston le savait bien, Il se devait bien s’en rendre compte mais quand les choix viennent à se réduire, on fait avec ce que l’on a auprès de soi. Et celui qui se trouvait le plus proche de Dieu était Matt. Manque de chance ou coup du destin ? Qu’importe, le jeune homme était là et comme il ne pouvait plus reculer, hé bien il resterait en place et ferait tout son possible, même si pour cela il devait se mettre à nu, ouvrir contre son gré des coins de son âme qu’il n’aurait jamais voulu ouvrir un jour sous peine d’avoir mal. Mais vu qu’on avait décidé autrement, il adhérait. Il n’y avait pas de choix possible. Le seul choix qu’il aurait voulu avoir, c’était de faire taire son frère sur ses inepties.

Contrairement à ce que tu penses, il y a une égalité entre nous. Y en a toujours eu une, même si tu la refuses. Sinon, on ne serait pas là, enchaînés l’un à l’autre par des pensées qu’on ne peut pas contrôler … Un de nous aurait déjà disparu ou serait trop affaibli pour continuer, à la merci de l’autre. Si tu veux parler de qui a le plus souffert quand on formait une famille, sans mère ni père certes, mais famille quand même, on verrait qui a le plus encaisser de coups et qui a le plus souffert … Et je doute que ce soit toi, comme tu le prétends !

Puis Darren se crispa, semblait lutter pour ne pas ouvrir les portes de son esprit. Mais qui que ce soit qui s’amusaient à les connecter, il était beaucoup plus fort qu’eux deux réunis. Darren ne résista même pas une minute que les murs tremblèrent et il fut projeté à terre comme quelques petits objets. Cela allait crescendo dans la violence des visions. D’ailleurs Matt voyait son frère parler à un type. Parler de la culpabilité, c’était ça les grandes lignes. Si l’aîné se sentait coupable ? Oui bien sûr, il aurait voulu rester plus longtemps sur Terre pour donner à sa petite amie, son enfant et son frère une vie meilleure, loin des murs pourris du quartier. Mais non, on en avait décidé autrement pour lui, il était parti bien trop tôt, on ne mérite pas de mourir à 22 ans dans une cave insalubre après que son propre père l’ait frappé plus que de raison. Non, personne ne mérite cela … Toujours assis sur le sol Matt se remettait lentement de tout cela tandis que son frère était déjà debout à cracher des mots durs, il ne pouvait faire que cela. Secouant la tête tout en lançant un soupir, le jeune homme regardait le sol avec un air un peu lasse, mélangé à la tristesse.

Si tu crois que j’ai rêvé de naître dans cette famille, tu te trompes … Par contre là où tu as raison est que j’aurais aimé en faire plus pour t’aider, ne pas mourir aussi jeune, pas comme ça, pas dans tes bras et pas en te laissant avec ce malade qui a tué son propre fils. J’ai échoué mais je ne le cache pas, tout le monde le sait. Là, tu ne m’apprends rien. J’aurais juste voulu changer deux destinées mais on m’a coupé l’herbe sous le pied. Résultat : tu es une ordure de première catégorie, ma petite amie est morte et ma fille va être tiraillée toute sa vie entre le Bien et le Mal. Vu de ce point là, le bilan n’est pas brillant mais merci de t’inquiéter, je vis bien avec depuis le temps.

Puis essayant de se relever, Matt sentit sa tête tourner et se compresser, comme sur le point d’exploser. Il rentra sa tête entre ses genoux, les murs se remirent à trembler plus fort encore. Lui ne lutta pas, cela ne servait à rien car cette force inconnue était trop puissante. Fermant les yeux, la lumière blanche revint pour l’aveugler intérieurement et il sentit encore un verrou sauter. Mais petit verrou, on n’avait pas encore atteint le centre du mal être de l’Ange, les souvenirs interdits, sa boîte de Pandore. Mais tout de même, c’était une violation de son âme …

**Début du flash-back**
C’était un cimetière. Un cimetière indien. Matt se trouve au milieu, y dépose des fleurs sur une jeune femme qu’il avait rencontrée à l’hôpital et qui était en phase terminale d’un cancer. Il l’avait accompagné jusqu’au bout et avait accompagné son âme du côté du Bien puisque la vie de la demoiselle était presque exemplaire puisqu’on fait tous des petites erreurs dans la vie. Les fleurs ? Des lys blancs, signe de pureté. Il resta là quelques instants sans bouger, regardant les fleurs dans le vase virevoltant grâce au vent qui allait aussi dans la chemise blanche de Matthew, le main dans les poches de son jean. Un homme à la peau typée, un indien, arriva dans le dos de l’ange. Lui porte une tunique blanche et un pantalon clair, reste un instant silencieux avant de toussoter pour faire signe de sa présence.

Matthew … Il faut y aller. Ton avion t’attend.

Le jeune homme hocha la tête et leva les yeux au ciel. Il faisait beau à Calcutta, un grand ciel bleu qui commençait à se teinter d’oranger. Ce serait la dernière fois qu’il verrait des couleurs ainsi, il avait un train en direction de Los Angeles.

Dis moi Tarun, il ne t’est jamais arrivé de désirer quelque chose pendant des années puis avoir l’envie te passer voire même te rebuter et qu’on te l’exauce quand même ?

Il y eut un silence, plutôt pesant, de la part de l’ange indien. Le Bras Droit lui était impassible avec ses yeux en l’air.

Moi j’te dis, si on me proposait de revoir mon frère, je sauterais au plafond.

Tarun, ton frère est journaliste à Bombay. Le mien est le Bras Gauche de Satan à traumatise les anges de Los Angeles. Je pense que j’ai un peu le droit d’être réticent.

Tu as peur de quoi ? Tu es Bras Droit, tu es puissant, tu es un des préférés du Patron.

Je n’ai pas peur, je n’ai pas envie c’est tout. La seule personne que j’aimerais voir, ça serait ma fille mais je n’ai pas le droit. Par contre j’ai le droit de voir mon frère qui doit savoir que j’arrive, qui va tenter de trouver toutes les failles possibles pour me mettre à néant. C’est un démon après tout, il n’a pas de cœur et la haine coule dans les veines.

Et alors ?

Matt se retourna. Son visage donnait un air grave, ses grands yeux bleus montraient déjà des signes de mélancolie alors qu’il n’avait pas encore quitté sa patrie. Ses bras s’étendirent comme s’il accueillait quelqu’un dans ses bras.

Et alors ? Tu sais tout comme moi que je suis un fardeau sur pattes. Les failles ce ne sont pas ce qui manque ! Lui aussi doit en avoir bien sûr, personne n’est invincible sur cette planète mais tout de même.

Il haussa les épaules en poussant un profond soupir avant de regarder le sol. Tout en lui criait de ne pas partir et son air las le montrait d’autant plus.

Tu sais, il y a un proverbe indien qui dit « Il y a des remèdes pour la maladie, il n’y en a point pour la destinée ». Je pense que ça résume tout. On doit affronter notre destin avec ce que l’on a.

Ne t’en fais pas pour ça, j’ai appris à vivre avec certaines choses et je suis toujours debout.

Alors tu peux t’en sortir … Allez viens, il ne faudrait pas que tu rates ton avion.

Matt sourit, cela d’un coup illumina son visage. Il se tourna vers la tombe, posa la main dessus et de l’autre fit le signe de croix puis se releva pour sortir du cimetière et se diriger vers la voiture qui allait le conduire à la suite de sa destinée.
**Fin du flash back**

C’était fou mais pendant ce souvenir, Matt avait pu sentir le vent le caresser, l’odeur des lys puis toutes les odeurs qui parfumaient la ville en Inde. Cela lui avait fait bizarre mais aussi beaucoup de bien. Il se releva d’un bond, lissant sa chemise et observa son frère de ses grands yeux bleus.

Tu vois, tu ne me fais pas peur. La peur et le manque d’envie sont deux choses distinctes, Darren. Je n’ai rien ici. J’ai des faiblesses, je l’admets. Je sais pas jusqu’où vont aller ces visions mais si ça continue à remonter ainsi tu verras de drôles de choses. Mais je n’ai jamais plié, je ne me suis jamais laissé aller à la colère ou la tristesse. Ou alors juste assez pour me reprendre en main après. J’ai aussi Dieu à mes côtés. Toi tu n’as rien, même Satan te méprise.

Le ton n’était pas la colère, ou alors un soupçon. Non le ton montrait plutôt que Matt n’était pas faible, qu’il avait de la force en lui a défaut d’avoir des choses négatives. Sa colère et sa mélancolie avaient beau gagner des rounds, le combat final était toujours gagné par sa foi …

- Tu as raison, je n'ai absolument rien... rien d'autre que le mépris de tous, même le tien. Mais je m'en moque, du moment que j'ai le pouvoir entre mes mains, que je peux choisir quelle âme briser... tu sais, j'espère que ces visions vont continuer. J'ignore ce qui les pousse mais tu vas te brûler tes petites ailes immaculées dans mon esprit... Et lorsque tu en ressortiras, tu auras le même sang que moi sur les mains. Matthew, ton père me ressemblait beaucoup... à une différence près... je suis devenu beaucoup plus puissant. Quant à Satan, il est aussi incompétent que ton supérieur, tous deux se mettent d'accord sur un équilibre... mais où pense-t-il trouver ce dernier ? Dans leurs rêves, peut-être. Je n'ai jamais cru à ces inepties et j'obtiens toujours ce que je veux... maintenant, ce sera le chaos, la destruction...

Il regarda son frère. Il sentait comme une drôle de chose en lui, comme si une voix parlait... un murmure... au début il pensa que c'était Matt qui s'insinuait dans son esprit mais très vite, il contra la voix de cette présence en ignorant que ce n'était pas celle de son frère. Il plongea ses yeux dans les siens. Leurs bleus azur se mélaient parfaitement, malgré leur différence. Ceux du Bras Gauche étaient sombres, froid alors que ceux du bras Droit étaient chaleureux et enjoués. L'heure n'était plus à l'amusement, Darren se concentra légèrement et prenant toujours pour responsable son frère de cette voix, il sortit furtivement un couteau par télépathie de la cuisine. Il fit venir celui-ci de façon si brutale et si rapide que Matthew ne put le contrer. La lame se planta dans son bas-ventre dans un bruit particulièrement écoeurant.

- Ne t'avise plus jamais de m'adresser la parole par ton esprit, tu n'es qu'une misérable vermine qui cherche à communiquer avec moi par télépathie... et pourtant, ce n'est pas à ta portée ! Maintenant... jouons tous les deux... Darren a dit souffrance morale... maintenant Darren dit torture physique !!!

Et presque aussitôt il retira la lame avec son esprit pour la planter dans le mur. Du sang s'échappait de la blessure de Matt et Darren usa de son pouvoir de réouverture des cicatrices pour agrandir celle qu'il venait de lui faire. Bien sûr, le Bras Droit possédant la capacité de guérison, le combat était nul. Matthew ne pouvait pas plus refermer la plaie que Darren ne pouvait l'agrandir. Malgré ça, son frère continuait de saigner et cela lui suffit même s'il se sentait énormément frustré. Bientôt, il sentit la puissance écraser les faibles remparts qui protégeaient une partie de ses souvenirs, et comme si la toile venait de se déchirer, il ouvrit à nouveau un songe aux yeux de son pire ennemi.

*Début du flashback*
Darren se trouvait dans le bureau de Houston, il le regardait et le considérait avec le mépris typique d'un Bras Gauche. Ce soir il allait détruire ce qu'il pouvait lui rester d'humanité, enfin, c'était ce qu'il pensait faire... Pouvait-on tuer un esprit ? Houston parla d'une voix neutre, comme à son habitude :

- Tu mens très mal pour un démon Darren Roller. Ton frère, tu ne t'en es jamais remis de sa mort. Tu as perdu une grande partie de ton humanité ce soir là. Et il faut vraiment aimer la personne pour en arriver à ce point là. Tu n'as jamais supporté la mort de Matt n'est ce pas ? Matt Roller ... Mort en martyr d'avoir donné sa vie à la personne qui lui était le plus cher. D'ailleurs, il se désole encore de n'avoir rien pu faire pour son petit frère ... Tu ne t'es jamais demandé ce qu'il était devenu ?

A vrai dire, à cette époque là, Darren s'en foutait éperdument de l'avenir peu glorieux de son crétin de frère ! Si ce dernier avait disparu de la circulation, alors tant mieux ! Il le regarda et repondit d'un don détestable et totalement dénué de respect :

- Peu m'importe ce qu'est devenu mon frère. En tant que martyr il sera devenu sans nul doute archange, serviteur de tes hauts rangs. Mais finalement, cela revient au même. Ce n'est qu'un imbécile... un misérable cafard. Une blatte... Le Dieu qu'il se voue à servir n'est autre qu'une poupée de foire ! Un minable dindon emplumé qui collectionne des fusées et des peintures. Tu es désespérant. Sais-tu ce que l'on fait on dindon ? On leur plante un canif dans le cou et on attend impassible que la bestiole rende l'âme. Le tout prend exactement 2 jours entiers... Mais je t'en prie assieds toi ! De toute façon, tu ne peux pas aller plus haut maintenant... Désormais... tu ne peux que chuter ! Le temps de ton règne touche à sa fin, je crois bien. Tu n'es plus à la hauteur... Chacun de tes enfants, je les ferais souffrir... Tous, un par un... je les amènerais à moi... Tu vas ressentir au plus profond de toi, leur âme se déchirer, leurs corps se liquéfier... Je suis déjà impatient de débuter. Mais tu ne pourras rien faire... Tu préfèreras disparaitre que me détruire. C'est pour ça que tu es faible... On tiendrai ton coeur dans la main des semaines entières, il continuerait de battre parce que tu aimes. Tu ne peux pas ne pas aimer... Alors que les humains sont si détestables !

Tant de haine s'émanait de sa personne que le Grand Patron de Cieux décida de mettre un terme à leur entrevue, il termina simplement par ce quelques mots, toujours d'un calme olympien devant tant d'énergie destructrice :

- Que sais tu exactement de l'humanité ? Tu me parles comme si tu avais tout vu et après tu me parles de tout détruire. J'ai déjà eu un aperçu de tes horreurs à commencer sur toi même. Tu t'es détruit, réduit en cendres pratiquement et maintenant tu veux faire la même chose aux autres. Mais sache que jamais tu ne gagneras. Je suis toujours là, bien debout et je ne compte pas me laisser tomber à tes pieds. Tu te rendras compte bien vite que c'est une guerre sans fin car tes victimes rejoindront mon camp, mon armée d'anges continuera ce qu'elle a toujours fait depuis des millénaires et la planète regorge de population. Tu t'éssoufleras plus vite que moi. Satan l'a bien compris, toi pas encore. Je pense que nous n'avons plus rien à nous dire. Tu n'es plus le bienvenu ici. Au revoir Darren.

D'une simple pensée il avait ouvert la porte pour que cet assemblage de monstruosité parte maintenant. Darren continuait déjà dans un monologue à voix haute, Dieu n'écoutait plus. Dans les yeux anciens de cet immortel, on lisait avec une loupe une certaine pitié pour l'être malfaisant qu'il avait en face de lui. Il semblait même las de le voir. Tout cela échappa et échappe encore au Démon. Il conclut ses propos abjects avec une simple phrase :

- Je ne suis pas mort... grâce à toi... Maintenant, je peux tuer sans l'être à mon tour. Et je ne vais pas m'en priver. Ma dernière part d'humanité s'en va cette nuit... Et ce, à jamais... Adieu, Houston !

Et sans crier gare ni prévenir il se jeta dans le vide. S'ensuivit une longue descente de trente-trois étages. A chaque seconde, un mètre s'enfuyait. Le sol grossissait... L'âme de Darren s'enfuit hors de son corps et soudain Matt put constater deux visions. Celle de Darren à ce moment là, où il n'y avait qu'un tas de chair et celle que lui seul pouvait distinguer à présent... Là dans le vide, Matthew pouvait discerner un enfant dans le corps de Darren... son vrai frère, celui qu'il avait quitté. Il pouvait deviner la même apparence que lorsqu'il était mort. Dix mètres... le jeune garçon totalement impuissant face à ce qui se passait avait les yeux appeurés, comme s'il se réveillait d'un affreux cauchemar. Cinq mètres, il ouvrit la bouche pour crier mais aucun son ne sortit... Quatre, trois puis deux mètres... une lueur de désespoir s'emparait de ses yeux bleus si différents des actuels... Un mètre, le jeune garçon comprit alors qu'il était perdu... il eut une dernière pensée "Matt... est vivant..." et un léger sourire vînt sur son visage... Puis ce fut le choc, celui d'un corps de chair d'os et de sang s'écrasant avec violence sur du béton... Du haut de l'espace, Darren regardait son oeuvre, il jubilait. Mais sur le trottoir, la petite lumière, dans ses yeux azur emplis de peur et d'incompréhension, ne s'effaça pas, seuls les paupières se fermèrent...

*Fin du flashback*

Le retour à la réalité fut rapide. Pour Darren, il n'avait fait que revivre la chute du même point de vue, sa haine et sa colère l'aveuglaient... Mais quant à son frère, il avait tout vu et alors qu'il ne le quittait pas des yeux, il lança sur un ton sadique :

- La chute t'a plu ? C'est mon passage préfèré...

Il ne l’avait pas prévu. Comment deviner cela ? A moins de s’introduire dans son esprit pour lire dans ses pensées présentes, Matt n’aurait pas pu deviner ce que son frère allait faire d’un couteau de cuisine, jusqu’à ce que l’objet se plante dans son bas-ventre. Cela eut l’effet de lui crisper la mâchoire car la douleur n’était pas tendre, c’était certain. Mais par rapport à tout ce qu’il pouvait voir dans l’esprit de son frère, ce n’était rien. Enfin beaucoup plus supportable. Et puis ne dit on pas que les douleurs physiques se soignent plus facilement que ceux du cœur et de l’âme ? Ce dicton était si vrai même si cette dernière plaie ne se refermait pas. Lui se régénérait facilement par son fort pouvoir de guérison mais il ne fallait pas oublier que Darren avait le don opposer, celui d’agrandir la blessure. Alors même si ce n’était pas assez béant que cela aurait du être sur un humain ou même sur un archange, c’était assez pour que la chemise du jeune homme se colore en rouge, comme la couleur de son sang qui coulait dans ses veines. Cela ne faisait pas aussi mal que l’on pourrait imaginer, Matt avait toujours ignorer ses blessures faiblesses, se concentrant toujours sur autre chose pour essayer de moins souffrir. Quelques petits points de repères qui étaient partout avec lui dans sa tête ou alors à quelque chose face à lui. La douleur passait au second plan, refusant toujours de se plaindre d’avoir mal pour qu’on vienne à son secours, il s’était toujours débrouillé seul et cela avait plutôt bien marcher malgré quelques lacunes. Là, le Bras Droit se concentrait sur le démon face à lui, qui avait le même nom que lui mais pourtant son contraire le plus total. Comment des membres d’une même famille pouvaient avoir des chemins aussi différents ? Certains jours, Satan et Dieu devaient bien s’amuser à tirer au sort qui marquer ou qui donner tel destin …

Mais ce sera un autre jour pour les discussions philosophiques, l’esprit de Darren se rouvrir pour faire découvrir un autre souvenir. Le bureau du Patron du Bien apparut et cela choqua intérieurement. Comment un être du mal pouvait entrer dans les enceintes du bâtiment des anges ? Peut être qu’avec une certaine force, on pouvait tout arriver. Si vous saviez que, malgré le souvenir de Darren, à quoi pensait Matt, cela vous surprendrait. Mais ce ne sera pas écrit, c’était bien trop contraire à son éthique, politiquement incorrect pour quelqu’un de son genre. Peut être, plus tard, il y repenserait, quand Darren aura quitter sa maison. Il vit Dieu, leur discussion dont le Bras Droit ignorait l’existence. C’était alors pour cela qu’on avait précipité son départ, du jour au lendemain avec des cartons fait en quatrième vitesse et un avion après leur discussion. Il comprenait un peu mieux. La conversation entre les deux étaient des plus prévisibles : un démon méprisant et imbu de sa personne, n’ayant peur de personne face à Dieu, impassible et calme, parlant de Matt comme martyr. Qu’est ce qu’il pouvait détester qu’Il l’appelle ainsi, le jeune homme n’avait pas considéré sa vie ainsi et refusait, lui avait fait juste fait ce que son cœur lui dictait et était mort jeune. Comme la plupart des martyrs certes, mais lui ne voulait pas être l’un d’entre eux car il n’était pas totalement un saint alors que ces gens là avaient eu la vie sur le presque fil de la perfection. Matthew avait commis trop d’erreurs pour que ce soit possible. Mais si vous voulez savoir quelque chose, le Bras Droit admirait le calme de Houston dans cette situation, rien ne venait troubler sa personnalité apaisante. Et cette vision était tellement forte, puissante, qu’il pouvait même sentir cette aura puissante qui le calmait, lui faisait du bien quand il en avait le plus besoin. Et à ce moment là, c’était plus qu’une nécessité pour continuer d’avoir la force. Surtout pour la suite de ce qu’il verrait, ce saut dans le vide de Darren qui en était écoeurant. D’ailleurs, quand tout cela fut fini, on vit le cœur de Matt se soulever comme s’il allait vomir et mit sa main devant sa bouche comme pour se retenir tandis que ses joues se gonflèrent légèrement d’air. Mais respirant un grand coup, l’ange reprit bien vite ses esprits et la première chose qui lui vint en tête fut de refermer sa blessure vu que son frère n’était plus concentré dessus. Sa propre guérison lui fit tellement de bien qu’il s’en sentit un peu plus fort. Il aurait besoin de toutes ses forces possibles pour continuer. Secouant la tête tout en soupirant, Matt voyait cette situation extérieure d’un point de vue différent, un peu plus neutre mais évidemment il était plus proche de Dieu que de son frère, cela paraissait évident.

La colère t’aveugle au point que tu ne vois pas que tu ne peux y arriver. Déjà, face à moi tu buttes. C’est sûr, devant un ange ou un archange, tout semble plus facile. Mais je n’ai même pas un millième des pouvoirs de Dieu et pourtant tu n’arrives pas à m’avoir totalement. Tu te retrouves à une situation que tu n’avais pas prévue dans ton plan de destruction du monde et tu vas tenter de me faire payer pour ça !

C’était leur grande différence : la manière de voir les choses. Pas selon sur cette discussion ni ce souvenir mais en général. Il était simple de remarquer que Darren ne voyait qu’au travers lui alors que Matt ne regardait qu’au travers des autres. Les deux n’étaient pas objectifs mais pas y mettre du sien rendait le Bras Droit avantageux sur ce terrain. Et s’ils continuaient sur ce chemin là, il pourrait en sortir victorieux. Non pas en ayant détruit son frère mais en sortant lui-même plus fort. Le plus important pour l’ange.

Mais leurs discussions se rapetissaient car déjà un souvenir allait apparaître du passé de Matt. Il ne luttait même plus, après tout il n’avait rien à cacher ces dernières années. Ce serait les moments difficiles qui seraient les plus durs à extraire. Sentant le mal de tête lui venir, le jeune homme ferma les yeux très fort, comme quand les enfants tentent de se concentrer. Toujours cette lumière blanche aveuglante et enfin le souvenir se dévoila.

**Début du flash-back**
On a fait un saut dans le temps. Un an auparavant à Calcutta, dans le grand aéroport de la ville. Matt enlace une jeune femme brune dans ses bras, se retenant de pleurer et on entend en indien que le départ pour New Delhi était imminent. La jeune femme se détacha de lui et partit en se retournant plusieurs fois. Puis elle avança derrière une vitre, là où le jeune homme était collé en lui faisant des signes d’au revoir. Plutôt d’adieu en fait. Elle avait les yeux tout embués, jeta un dernier regard avant de complètement disparaître. Lui resta quelques instants sans bouger, ses yeux bleus restèrent fixer là où la jeune femme était apparue pour la dernière fois. Il ne s’était pas rendu compte que le temps avait l’air suspendu et que le terminal était vide de personnes. Pour un aéroport international dans le deuxième plus grand pays du monde, c’était étrange. Mais tout cela il ne se rendit pas compte jusqu’à ce qu’il sentait La présence. Dieu était là, derrière lui.

Matthew, détache toi de cette vitre, elle ne reviendra plus.

Je sais, elle est partie définitivement. Elle s’est enfuie de chez ses parents avec moi après la nouvelle. Et là elle est en fuite, seule.

Dans sa voix, il y avait comme une sorte de lassitude, de la monotonie comme si le Bras Droit était habitué à ce que les gens qu’il aimait le quittait tôt ou tard. Et pourtant il n’avait toujours pas bougé, son front collé sur la vitre et son souffle faisait de la buée. Dieu s’était un peu plus approché, son aura calma un peu l’ange immobile.

Allez, ne joue plus ta statue. Il se fait tard.

Matt se retourna et ce fut à présent son dos qui était collé à la vitre. Puis il fit quelques pas qui résonnèrent dans un aéroport vide. Cela était des plus étrange mais le Tout Puissant n’allait pas apparaître dans un lieu bourré de monde. Il fallait dire qu’il était un peu plus de minuit et qu’il n’y avait plus ni départ ni arrivée à cette heure là, plus avant 3 heures du matin à présent.

Pourquoi vous nous séparez ? J’ai besoin d’elle !

Oui et les autres ont besoin de toi. Ne vois tu pas que tu délaisses ta mission au profit de celle que tu aimes ? Je sais que vos sentiments sont véritables mais votre bonheur personnel doit passer après les humains. N’oublie pas cela Matthew. Et sache que les embûches te servent à être plus fort pour l’avenir qui s’obscurcit pour l’humanité.

Mais je l’aime tant …

Le Bras Droit dit ses mots dans un soupir. Le jeune homme était un peu abattu. Avec l’indienne, il avait vécu 4 ans de bonheur. Elle était ange comme lui et il n’y avait rien pour les séparer. D’accord, ils se cachaient des parents un peu méfiants mais cela se passait très bien. Et lui n’avait pas vu que ses missions en pâtissaient. Houston avait peut être raison, sûrement même mais lui n’avait pas l’esprit assez rationnel pour penser vraiment.

Encore une fois, je me retrouve seul. Je devrais avoir l’habitude !

Matt tentait de faire de l’humour, de l’ironie mais on sentait une douleur au fond de lui et son rire nerveux allait devenir une véritable crise de nerf, mêlant rire et des larmes qu’il tentait de contenir du mieux qu’il pouvait. Fort oui, mais on a tous nos moments de faiblesses. Il fallait laisser le temps au jeune homme se remettre. Houston le savait, il connaissait très bien son petit protégé et vint à ses côtés pour poser sa main sur son épaule ce qui le calma aussitôt.

Ne crois pas que je m’acharne sur toi, elle devait partir de toutes manières. Toi tu as ta destinée, elle la sienne. Tu le sais, je n’ai pas besoin de te le redire.

Oui, je sais. Mais Asha va me manquer. Elle était mon espérance.

D’ailleurs, c’était la signification de son prénom. Asha signifiait espérance et grâce à elle, Matt se reposait sur cette jeune femme qui lui avait fait tant de bien durant ces dernières années. Et le revoilà seul, physiquement parlant, cela allait être un dur retour à la réalité.

Allez Matthew viens, demain ta destinée reprend son chemin.

Lâchant l’épaule du jeune homme, Houston commença à faire demi-tour et s’en aller. Matt se tourna à son tour et le suivit avant de se retourner une dernière fois et fut certain de voir Asha, ses longs cheveux bruns dans le vent, lui envoyant un baiser. Un petit sourire vint naître sur les lèvres du Bras Droit qui attrapa ce baiser et le déposa sur son cœur.
**fin du flash-back**

Les visions étaient troublantes. Matt avait senti encore une fois tout ce qu’il avait vu. Le parfum aux senteurs de vanille d’Asha, la douceur de soie mais aussi cette tristesse, nervosité avant l’apaisement au contact de la main de Dieu. Il se sentit un peu mieux en ouvrant ses grands yeux. Il n’avait jamais revu ni eu de nouvelle d’Asha mais lui avait avancé dans sa vie, seul mais restait debout.

Finalement on n’est pas si opposés. Quand on pense à nous, quand on se regarde le nombril quoi, on oublie un peu le reste. Tu crois que c’est ta force mais c’est faux, tu t’affaiblis car tu ne vois rien de ce qui t’entoure. Ca te perdra Darren, ça a failli me perdre …

- Tu es bien fou si tu penses que je ne fais pas attention aux autres. Je n'en serais pas là où je suis si je ne m'étais occupé que ma personne. Nous ne sommes semblables que sur un seul et unique point... c'est que nous sommes les esclaves de la volonté de Satan et d'Houston. Il serait temps que tu te rendes compte que tu n'es qu'un pion minable sur un échiquier. Notre rencontre n'intervient certainement pas par hasard. Mais à ta différence, je sers mes intérêts avant ceux du gourou... et laisses moi te dire que cela ne lui plait guère. Crois-moi, ce que tu décris est plus une force qu'une faiblesse... Je prends des initiatives qui me satisfont comme celle de marquer ta fille stupide. Heureusement que je parviens à trouver des idées pour sauver la face des Enfers, car sans moi, Houston les aurait déjà investi. Je ne m'embarrase pas du superflu : l'amour, la passion, l'amitié... pour moi c'est inutile, j'arrive très bien à faire le nécessaire, seul... Et j'applique mes propres règles, je n'ai pas besoin des ordres de Satan pour agir. Si un matin je me lève et que j'ai envie de tordre le cou d'un môme, je ne prends pas des gants pour le faire... Nous avons otus deux un rôle à jouer dans ce combat mais si tu penses que je vais te laisser sortir plus fort de notre entrevue, tu te trompes lourdement. Tu es enchainé avec la pire erreur de ton passé... Et tu...

A nouveau cette voix... elle murmurait des paroles inaudibles. Darren braqua un regard si noir sur son frère que le bleu de ses yeux paru virer au rouge foncé. Mais à quoi jouait-il donc ? Pourquoi essayait-il de lui parler, le coup de couteau ne lui avait pas suffit ?

- J'ignores ce que tu recherches réelelemnt mais ce n'est pas en me parlant par télépathie que tu le trouveras. Je t'ai pourtant mis en garde, rien que de penser que ton esprit puisse touche le mien par télépathie me répugne ! Sors de là !

Et Darren se concentra sur tous les objets tranchants qu'il pouvait trouver. Il les fit tous partir en direction de son frère mais aucun n'atteignit sa cible, les lames tombèrent au sol. Déjà, son esprit s'ouvrait vers un souvenir de plus en plus cruel et meurtrier...

*Début du flashback*
Il était Démon Supérieur, posté près d'une crèche, son silencieux à la main, fourrée dans la poche d'un long manteau noir. Il avança dans la cour et s'arrêta devant la balançoire. Il la regarda longuement, une jeune fille était assise dessus. D'une voix froide qui paralysa la jeune fille, il dit :

- Bonsoir jeune fille... Je suppose que papa est en retard... Jolie corde... elle irait ma foi fort bien avec un magnifique cou comme le tien... Ta maîtresse est à l'intérieur ? Parfait... tu te sens mal n'est-ce pas ? Oui, une vilaine migraine, si nous allions voir cette charmante Mrs Charlton... elle pourra surement t'aider. Viens...

Darren s'était infiltré dans l'esprit de la petite fille. Il lui avait soutiré toutes les informations nécessaires à l'accomplissement de son plan. La fillette apeurée par cet homme mais soudain en proie à une douleur intense entra avec lui à l'intérieur. L'horloge affichait déjà 17h30. Ils ne tardèrent pas à se rendre dans le bureau de la femme d'une trentaine d'années qui rangeait les jouets laissés par les enfants. Darren entra dans la salle et leva son arme vers la tête de la femme. Celle-ci lâcha tous les objets qu'elle avait en main et bafouilla :

- Mais qu'est-ce que... je vous en prie ne tirez pas je suis mariée et j'ai un petit garçon...

- Foutaises... vous ètes célibataire et vous craignez pour votre vie minable, ne me mentez pas... je sais de toute façon qui vous ètes... Maintenant, vous allez vous asseoir sur cette chaise et attendre patiemment... La gosse et vous n'ètes que des otages alors tâchez d'être sages... avec un peu de chance, vous aurez la vie sauve...

La femme obéit, rejoint bientôt par la petite fille dont la tête était serrée comme dans un étau... Il sortit de la poche de son manteau un dossier et le montra à Rachel, la maîtresse. Ce dossier comportait de nombreuses photos où l'on voyait les cadavres de victimes, des comptes-rendus policiers qui incriminait le père d ela petite Lilly. Darren s'appuya alors contre le mur lorsqu'une voiture se gara. Un homme en sortit, d'une quarantaine d'années. Il avait des cheveux grisonnant et un air austère. Voyant que sa fille ne se trouvait pas dehors comme d'habitude, il entra dans la crèche. Darren passa une cagoule sur son visage et attendit derrière la porte. D'une simple pensée il empêcha les deux otages de crier et laissa entrer l'homme avant de claquer la porte. Surpris il sursauta et se retourna, l'arme à la main.

- Bonsoir Richard... Cela faisait si longtemps... Inutile de tirer, tu ne pourras pas me tuer... Alors, comment vont tes affaires ? Bien j'espère... Mais que vont penser Lily et sa maîtresse de ton implication dans des affaires de meurtre, dans la vente illicite de drogue... Sans compter cette facheuse histoire de viol sur mineur... Daniel était si...

Mais un coup de feu en pleine tête le fit tomber à terre, mort... enfin en apparence. Darren faisait semblant. Rachel se mit à hurler et l'homme tira une seconde fois laissant omber la jeune femme, morte elle sur le sol en bois. Puis il braqua son arme sur sa fille et finalement se ravisa pour la ranger. Il ignorait exactement qui était de type au sol et il se dit qu'il devrait le démasquer. Lilly hurla à la lune et commença à pleurer de gros sanglots. Richard s'approcha et la gifla :

- La ferme, imbécile ! Tu n'as pas intérêt à parler de ça à qui que ce soit ni même de ce que nous avons fait il y a peu. Sinon, je te fais sauter la cervelle. Ta soeur et moi sommes très proches...

Et il se tourna vers cet homme à terre. Darren avait minutieusement planifié son coup. Pendant que son ancien coéquipier déversait des propos odieux sur son engeance, il avait fait avancer son silencieux vers elle. L'homme approcha et commença par ôter le bas de la cagoule. Un détonation se fit entendre et il resta un moment surpris. Puis, il vit du sang couler de sa poitrine. Sans même se tourner, il tomba raide mort. Darren se leva alors en regardant l'homme qui agonisait. Il ôta ce qui lui voilait le visage et regarda l'homme droit dans les yeux avec un sourire malveillant. Et puis il dit de sa voix glacée :

- Richard... trahi par ton propre sang... est-ce là, une véritable vie ? As-tu pensé que nous pourrions être riche si tu n'avais pas lancé une trahison ouverte contre moi... Tss... finalement j'ai menti...

Et sans prévenir il tira une balle sur la jeune fille qui tomba morte sur le sol dans un flot de sang. Darren pointa l'arme vers ce tas de chair au sol et lui dit :

- Ta fille et toi avez désormais gagné votre place en Enfer... elle sera probablement là pour longtemps, en revanche toi... tu auras tôt fait de rejoindre les rangs bannis... Ton âme pathétique va errer dans le néant, tel sera le prix à payer pour ta trahison. Tu as choisi le mauvais camp Richard... Echec et mat !

Et il tira entre ses deux yeux. Esquissant un sourire, il caracha sur l'homme, essuya le bout de son arme avec un mouchoir de soie noir qu'il rangea dans sa poche intérieure et sortit de ce champ de bataille où seuls les cadavres pouvaient témoigner des faits... dommage que les morts ne parlent pas...
*Fin du flashback*

- Cette histoire était si similaire à la notre. Richard violait sa première fille et la jeune Lilly les a surpris. Cela aurait été avant, j'aurais laissé la vie à ce petit imbécile mais une trahison vaut bien une vengeance... J'ai permis à cette fille de vivre cette jubilation... de tenir une arme dans les mains et d'avoir le pouvoir de vie ou de mort sur une simple pression de doigt... On hésite si la personne ne le mérite pas mais lorsque qu'elle a un dossier pour allourdir autant son âme... on en peux que tirer et stopper la machine infernale... Lilly a parfaitement compris les choses.

Que dire face à un discours aussi grotesque ? Rien. Bien sûr que Darren regardait les autres mais son intérêt personnel passait avant les autres alors il ne voyait en autrui que ce qui pourrait lui servir, rien d’autre. De quelques façons que ce soit, comme l’aîné qui voyait le bonheur presque partout quand lui-même le vivait ou son cadet qui ne cherchait que la souffrance dans ceux qui pourraient l’intéresser, se regarder le nombril n’était jamais bon pour eux deux. Si Matt aurait levé les yeux et enlever un peu ses étoiles, il aurait vu la misère autour de lui, qu’on avait besoin de lui. Mais non, la plupart du temps le jeune homme ne voyait pas grand-chose. Bien sûr que le monde n’était pas rose donc que son job d’ange continuait, qu’il aidait et tout le reste mais c’était sa cause personnelle qui passait un peu avant quand il était amoureux. C’était comme s’il avait besoin de rattraper le temps perdu sans amour, avec un petit vide –plus tôt un trou béant devrais je dire– dans son cœur. Son frère était l’inverse, lui servait ses intérêts personnels au travers de ce qu’il voulait mais ne voyait pas les conséquences pour le reste de la population mais pour lui aussi. A force de vouloir monter là où c’est impossible, on finit par se brûler les ailes, n’est ce pas ? C’était un peu pour cela que Matthew restait dans les rangs. Déjà, il n’avait pas beaucoup d’ambition personnelle, notre ange est monté en grade par son naturel et ses missions accomplies mais n’avait jamais demandé à être Archange et encore moins Bras Droit. Alors monter plus haut ce serait prendre le siège de Dieu, celui qui l’épaulait depuis toutes ces années sans jamais soupirer ni rien, c’était son protégé. Alors pourquoi penser d’occuper la place de celui qui vous tend la main quand vous l’appelez ? Sauf quand il y a des lancements de fusées mais bon, mis à part ça, le Seigneur était toujours là pour l’aîné Roller qui en avait parfois drôlement besoin. Et même après presque trente années à ses côtés dans le camp du Bien, Matt avait toujours des doutes, cela n’était pas prêt de s’arrêter … Enfin bref, tout ça pour dire que Darren avait une vision bien superficielle des gens, pour lui ce n’était des instruments d’ascendance sociale mais à présent, cela ne servait plus à rien, il était arrivé au plus haut stade qu’un Démon pouvait arriver alors se montrer encore plus cruel ne servait à rien à part à faire peur aux nouveaux venus. Il y avait quand même mieux comme distraction mais c’était vrai que les deux ne tomberaient jamais d’accord sur ces points là : l’un prônait l’amour et la paix, l’autre la haine et le chaos. Avec des points de vue aussi radicaux, difficile de trouver un terrain d’entente …

Tiens, Darren s’arrêta dans son discours avant de parler de voix dans sa tête. Lui ne faisait rien et n’entendait rien non plus. Qui s’amusait avec la colère du Bras Gauche ? S’introduire dans son esprit pour lui parler ? Il n’y avait qu’une personne qui pouvait faire cela mais avant de dire quoique ce soit, l’esprit de Darren fut à nouveau frappé et un souvenir s’ouvrit. Un cauchemar plutôt à ce que l’on pouvait voir tous ces meurtres, que ce soit de la main de Darren lui-même, de cet homme ou de cette fille. Trop de sang coulaient dans ce souvenir et les détonations avaient retenties dans la tête du Bras Droit comme si celles-ci s’étaient produites dans cette pièce. Les visions étaient de plus en plus fortes, palpables et impressionnantes. Toutes signifiaient quelque chose. On montrait la cruauté du cadet et la douceur de l’aîné. Pourtant, Matt n’était pas qu’un agneau docile et Darren n’a pas toujours été cette horreur mais c’est seulement le passé qui pourra le montrer … Là, revenons à ce qu’avait vu notre protagoniste qui le dégoûtait. Pourtant il en avait vu des meurtres, des gens sans aucune morale tuer leur propre famille, des étrangers ou poser des bombes sans qu’il puisse faire vraiment grand-chose. Mais quand on voit que c’est sa propre famille qui fait ça, il y a un goût amer derrière. Comment ça, l’histoire était similaire ? Dans la forme oui : un père horrible et des enfants malheureux dont la vie se finit pour l’un d’entre eux et dont le père est tué par son propre enfant. Le fond est tout autre, leurs vie, Matthew s’en souvient encore même s’il ne parle jamais ni même ne pense, du moins tenter de ne pas y penser, à tous ces durs moments qui avaient peuplé le quotidien de deux gamins qui n’avaient pas demandé à vivre dans le chaos et le désespoir. Mais on ne choisit pas sa famille, ça c’était certain. Secouant la tête, son visage était grave à présent, pas méchant ni en colère. Il n’y avait que ses yeux qui avaient encore cette lumière que les anges arboraient dans leur façon d’être ou sur leur visage.

Non, il y a tant de choses qui divergent ... Personne ne t’a donné une arme pour tuer ton père. Oui le tien puisque finalement, vous vous ressemblez tant avec ce mépris d’autrui, cette colère à absolument déverser sur les autres. Là, tu as forcé leur destin.

Bien sûr, comment un ange peut il comprendre la jouissance de frapper quelqu’un, de pointer une arme et d’appuyer sur la détente ? Jamais la violence n’a été une partie de plaisir pour lui, Matt se battait car il n’avait pas le choix, pour protéger son petit frère, se protéger aussi. Mais après, il avait mis en œuvre de manière pacifique, enfin le plus possible car parfois on ne pouvait faire autrement. Mais comme il a été dit plus haut, ils ne se comprendront plus, c’était bien trop tard pour avoir une conversation sur comment refaire le monde à leur façon. Ils ne seraient d’accord sur aucun point, la conversation tournerait en rond pendant des millénaires s’il le fallait. De toutes manières, le mal de tête reprit, comme si on serrait dans un étau pour l’écrabouiller. C’était toujours aussi puissant mais lui restait toujours debout, apprenant à contrôler sa douleur sans pour autant la maîtriser. On ne pouvait pas tout faire non plus. Lumière blanche et un verrou qui saute, un craquement dans son âme et voici ce qui arriva.

**Début du flash-back**
Asha !!

Il faisait nuit sur les champs de rizières. Nuit noire mais peu importe Matt courait comme un fou à la recherche de sa petite amie qui n’était pas venu ce soir. Sa sœur ne l’avait pas vue depuis la fin du repas. C’était totalement anormal, sa petite amie ne partait jamais comme ça, jamais sans avoir prévenue sa sœur ou Matt, tout dépendait. Mais là, si ni l’un ni l’autre ne savait, il y avait un problème quelque part. Un gros problème même qui avait poussé le jeune homme à courir ainsi sans secours, sans lumière, juste avec son cœur qui battait à tout rompre et son souffle haletant.

Asha !!

Il le savait. Dans son esprit, il revoyait la manière dont certains garçons de rizières regardaient sa petite amie et le regardaient lui. Ils étaient sûrs qu’il se passait quelque chose entre eux mais ils n’ont jamais réussir à prouver quoi que ce soit. Cela faisait quatre années presque qu’ils étaient ensemble et cela n’avait éveillé les soupçons de personne, sauf d’eux. Il fallait dire que la campagne manquait de femmes, qu’ils étaient un peu comme des chiens reluquant un os et qu’ils ne supportaient pas que cet « étranger » touche à ce qui pourrait leur appartenir. Si c’était eux ? L’esprit de Matt s’emballait trop vite, comme son cœur, comme son souffle. Tout allait trop vite, tandis qu’il courait en criant. Bon d’accord, Asha ne pouvait pas mourir puisqu’elle était un ange mais le jeune homme ne supporterait pas qu’on fasse du mal à celle qui était son symbole d’espoir. Ces types l’avaient tuée déjà, ils étaient la cause de sa mort en la poursuivant pour la violer, c’était déjà trop. Les poings se serrèrent tandis que sa course continuait. Des fois il avait de l’eau à mi-mollets mais comme il s’en foutait royalement, tout ce qui comptait était de la retrouver. Un instant il s’arrêta, on voyait l’air désemparé sur son visage en tentant d’apercevoir quelque chose au milieu de cette nuit noire. Puis il se rappela de la forêt à côté, c’était là qu’elle allait des fois et c’était aussi là dedans qu’elle avait péri. C’était calme et tranquille pour se sentir en paix, pour se faire tuer ou subir n’importe quelle torture. Là, on ne pouvait pas vraiment l’entendre, c’était trop loin de la maison. Alors, reprenant son souffle quelques instants, il reprit la course jusqu’à l’orée des arbres. Là, il s’y avança prudemment, sait on jamais les animaux sauvages ou les brigands.

AAAAAAAAAAAAAAAH !

Un cri retentissant fit frémir le jeune homme, un frisson glacial parcourut son dos. C’était elle. Il se dépêcha, tentant d’éviter toutes les branches, racines et autres trucs qui barraient son chemin. Le cri ne venait pas de bien loin, il y serait rapidement. Du moins il l’espérait.

Qu’on ne lui fasse pas de mal … s’il vous plait … je ne me le pardonnerais pas …

Il parlait tout bas à lui-même … Ou à Dieu, ce qui revenait presque pareil. Courant toujours, il arriva dans à l’endroit où se trouvait Asha et un de ces garçons de richesse, Kamal. Il lui parlait en hindou mais de manière presque inaudible. Il l’avait plaqué contre un arbre et la pauvre semblait terrifié. On ne peut imaginer ce que Matt ressenti, son cœur s’arrêta de battre un instant, ses yeux bleus virèrent au noir profond et tout son corps se crispa. Il se rua sur le type et le plaqua à son tour contre un arbre en le saisissant par le col de sa tunique. Il avait une force incroyable, la colère qui montait sans doute en lui. Sa bouche tremblait, l’empêchant de parler durant une bonne minute. Sourcils froncés, ses yeux si clairs ne semblaient pas le sien.

Tu ne la touches pas, je te l’interdis !!

Matt se retenait pour ne pas crier dans ses paroles mais la menace planait. Et pour dire que la colère pouvait aller loin, le Bras Droit utilisa son don accru de télépathie pour pénétrer l’esprit du jeune garçon et y faire pression, donnant de graves maux de tête à l’indien collé à l’arbre. Matt devait lui faire mal, l’autre n’arrivait plus à parler tellement la douleur envahissait sa tête. Son don n’avait pas de buts aussi malsains en temps normal mais la colère fait faire des choses insensées parfois. Asha vint dans son dos et le tira par la chemise.

Matt, ne fais pas ça ! Ce n’est pas toi cet homme avec tant de colère … Lâche le, je t’en prie.

A ces derniers mots, elle l’avait enlacée, entoura sa taille de ses bras fins et poser sa tête contre le dos du Bras Droit. Cet effet eut de le calmer aussi tôt. Ses yeux s’éclaircirent à nouveau, il relâcha la pression dans la tête mais le tenait toujours par le col.

Tu t’en vas. Loin. Je ne veux plus jamais te voir ici.

Kamal acquiesça et à peine Matt l’eut lâché, il détala à toute vitesse. Poussant un long soupir, il se retourna pour regarder Asha dans sa tunique indienne rouge un peu déchiré. Elle lui caressa sa joue comme pour le rassurer, comme si elle lisait dans les pensées.

Ne t’en fais pas, il n’a pas eu le temps de quoique ce soit.

J’ai eu si peur …

Il la serra dans ses bras fort, comme s’il avait peur qu’on lui enlève une des rares choses qui le faisaient tenir en équilibre au quotidien sans trop flancher. Il respira la douce odeur de ses cheveux comme pour calmer son petit cœur qui battait trop fort.

Soit plus jamais comme ça Matt, le côté méchant me fait peur … Tu as un côté que tu ne maîtrises pas, fais attention.

Je ne supporte pas qu’on touche à ceux que j’aime … Allez viens, on rentre.

Il lui prit la main et l’entraîna pour faire le sens inverse de toute à l’heure en direction de la maison. Après une course effrénée, Matt aurait besoin de se changer et tout deux devraient se remettre de ses émotions.
**fin du flash-back**

Mais pourquoi il avait l’impression de tout ressentir à chaque fois ? Son cœur battait encore très fort et sa respiration. D’ailleurs il porta la main à son cœur. Là encore il avait senti la douceur d’Asha, de ses mains autour de lui, de l’odeur de sa chevelure, du contact de sa main mais aussi mal aux jambes comme s’il venait lui-même de faire cette course folle et cette colère ressentie. Il détestait ressentir ça mais quand on touchait aux siens, il n’arrivait plus à se contrôler … L’espace d’un instant, il resta un peu interdit, l’air hagard avant de se reprendre et de se remettre droit.

Tu dois être déçu de voir que finalement, chez les anges ce n’est pas tout rose. Ce n’est pas les Bisounours chez nous. Tu sais que j’ai toujours été comme ça, tu m’as vu face à Lance, quand je le frappais car il avait osé te toucher pendant que j’allais en cours ou bosser. Tu sais de quoi je suis capable … Alors ta pseudo théorie sur la faiblesse des anges tu peux aller la réviser car tu as complètement …

Il s’arrêta en pleine phrase. Matt sentait une voix dans son esprit, quelqu’un lui parlait mais même avec tout l’effort du monde, le jeune homme était incapable de comprendre quoique ce soit. Il fronça les sourcils d’incompréhension et regarda son frère.

Tu arrêtes ça tout de suite. Je t’ai dit que je n’essayais pas de te parler par télépathie alors ne fais pas pareil !

Ainsi, il ne s'était pas trompé, Matt avait enterré sa part d'ombre, une partie de lui-même que Darren avait connu, longtemps auparavant... Oh, oui, qu'il s'en souvenait, il espérait même que cette partie de lui ne soit pas morte avec son accession à la droite de Houston... Le bras gauche vouait un intérêt considérable à la partie obscure de l'esprit de son frère comme un prédateur sur un gibier bien gras. Non pas qu'il veuille s'appuyer sur ce point faible, quoique... non, il préférait plutôt s'en réjouir. La frontière entre un Ange et un Démon n'existe pas, l'un comme l'autre peut facilement basculer de l'autre côté en moins de temps qu'il n'en faut pour respirer... Ce fossé immense qui les sépare est certes béant, immense... profond, abyssal mais un mince pont les relie tous deux. Avec la certitude que son frère venait bel et bien de trahir une partie que Darren aurait cru disparue, il allait parler lorsque la voix se manifesta. En un éclair, ses yeux redevinrent meurtriers et il lança un regard si glacial à son frère que même lui ne se serait pas reconnu dans un miroir. Mais tout s'éclipsa lorsque son frère lui dit :

- Tu arrêtes ça tout de suite. Je t’ai dit que je n’essayais pas de te parler par télépathie alors ne fais pas pareil !

Il n'en croyait pas ses oreilles. Etait-il possible que lui aussi l'entende maintenant ? Oui bien sûr, il ne pouvait mentir ce tas de bonté méprisable... Darren planta sur lui des yeux surpris... pour la première fois on pouvait y lire qu'il perdait le contrôle de la situation. Et puis, ce fut insidieux... de plus en plus, il y avait comme une puissance qui prenait possession de son esprit. Il la sentait peu à peu s'infiltrer et presser contre ses barrières impénétrables qu'il avait érigé. De toute la puissance dont il était capable il jeta sa puissance mentale contre cette intrusion de toutes ses forces. A grand coup de résistance, il parvint à la rejeter. Jamais personne n'avait osé ni n'avait même pu arriver jusque là... Il ferma les yeux pour se concentrer, s'attendant à une récidive mais plus rien... SI ! Cette voix... elle parlait doucement, dans un espèce de souffle, sans qu'il ne puisse comprendre ce qu'elle disait... Au fur et à mesure elle s'élevait un peu... Tout ça commençait à lui taper sur le système nerveux de façon odieuse. Il était certain d'une chose... ce n'était ni Dieu, ni Satan, car s'ils avaient voulu exploser ses remparts, ils y seraient parvenus sans problème... Et ce n'était pas Matt, car ce dernier était incapable de mentir... il le faisait d'ailleurs très mal quand il se mettait à l'oeuvre. Il sonda de son esprit les choses alentour, cherchant la source de cette chose... Mais il ne trouva rien. La voix murmurait toujours et dans un élan de rage agacé, Darren rouvrit les yeux et beugla d'un ton si haineux et d'une telle puissance que les objets en tremblèrent :

- LA FERME !

Silence total dans cette pièce qui fut brisé par lui-même, par une voix macabre, dirigée contre son frère, comme une espèce d'avertissement alors qu'il savait très bien qu'il n'était pas en cause.

- Je te préviens que si tu cherches à...

Mais il n'eut pas le temps de finir, une telle vague arriva qu'il en fut coupé court. Contrairement à ce qu'il venait de subir, il s'agissait maintenant de cette autre force qui ouvrait leus esprits. Et un souvenir se dévoila... encore...

[Je mets sous spoiler car c'est assez violent. Juste pour les âmes sensibles, ce passage n'est pas réellement important pour ce qui va se produire au final... Donc voilà, si vous ne le lisez pas ce n'est pas extrêmement grave... ^^]

Spoiler:

Darren reprit ses esprits avec difficulté. Cette vision avait été une pure horreur mais ce n'était pas ça qui le faisait chanceler... il sentait en lui comme une pression... La présence revenait... Mais elle ne pouvait détruire la barrière mentale du bras gauche. Il s'avança vers son frère et c'est là qu'une drôle de chose se produisit. Un autre vision arriva mais cette fois, pas de chez Matt ! De lui ! Et pas de la même façon que tout à l'heure... ce n'était pas une communion d'esprit qu'il subissait mais plutôt comme si un de ses souvenris était happé hors de lui pour apparaitre... face à eux... Une forme... bizarre étrange avec un air de déjà vu prenait place... Et soudain, comme une explosion qui mit à terre les deux frères. Quoique ce fut il était puissant, très fort...

Tous deux étaient à terre cloués au sol... Darren lança aussitôt un attaque mentale contre cette chose... mais elle se perdit dans le vide. Il ne comprenait rien à qui arrivait, Matt était bien trop bête et trop gentil pour user d'une telle solution contre lui. Et aucun des deux immortels ne pouvait échouer dans une telle entreprise... C'était donc tout autre chose... qui se nourrissait de son énergie à lui mais aussi de celle de son frère... Il sentait les deux auras se mêler entre elles... Et puis, il y eut un souffle, les lumières s'éteingnirent dans toute la demeure... Une étrange lueur émanait de cette forme. Il sentait la force de son esprit craquer... et aussi celle de son frère faire de même... Cette fois leurs esprits étaient tout simplement mis à nu, ensemble, sans qu'il puisse arrêter le processus... Et puis une voix s'éleva alors, une voix que Darren ne reconnut pas mais que Matthew avait sans doute du la remettre... car elle n'était autre que celle de ce petit garçon qui avait versé des larmes quelques secondes avant sa mort...

- Non...

Un simple mot, lâché avec tant de force qu'il coupa le souffle à Darren lui-même. Et puis, il se sentit plonger dans la faille ouverte de Matt... comme dans le vide, mais cette fois ils ne jouaient plus à voir des souvenirs de l'un et l'autre à tour de rôle, ils allaient les vivre tous les deux... les prémices de leur destin... là où tout avait commencé... il y a longtemps...

[Note : Ce qui rend la suite encore plus intéressante... ^^ Si tu veux que j'édites quelque part, je ne suis pas contre hein. Par contre pour ton prochain post, on démarre par les souvenirs les plus anciens, l'enfance puis l'adolescence... Faudra que je te montre la musique sur laquelle je te réponds depuis le début... XD J'attends demain qu'une certaine princesse me montre comment faire pour la mettre en ligne... lol]

Même le souvenir de Darren, aussi violent soit il, n’arrivait pas à occulter cette voix et cette présence autour d’eux. Il n’y avait ni bonté ni mal, aucun aura si ce n’était quelque chose de familier, qu’on avait l’impression d’avoir connu il y a de cela tellement longtemps qu’on ne mettait plus de nom dessus. C’était sur cela que Matt était concentré, au moins cela l’empêchait d’éprouver du dégoût envers son propre frère qui se tenait face à lui. C’était toujours ça de pris. Les Roller avaient en eux des gênes pas toujours louables et si l’un en faisait presque son commerce, l’autre refoulait le tout dans l’espoir qu’un jour tout disparaisse et qu’il devienne vraiment ce qu’on attendait de lui, c'est-à-dire quelqu’un sans colère et n’ayant pas pour point faible qui était en même temps son point fort. Tout dépend de comment on l’attaquait … Darren avait été sûrement heureux de voir son frère encore vulnérable face à autrui, avoir ce regard noir de haine et pouvant faire le mal … Au secours comme ils se ressemblaient malgré leurs chemins radicalement opposés. Enfin, quand on porte le même sang, il y a toujours des similitudes même si on aimerait bien s’en passer. Qui aimerait avoir en soi une force qu’on ne peut pas contrôler qui se déclenche quand on ose toucher à quelqu’un qu’on aime ? Pas l’aîné de la famille qui s’en voulait de n’être pas un modèle d’ange, être un exemple pour les autres qui l’appelaient l’Elu.

Mais revenons à cette atmosphère dans le petit Paradis souillé de Matthew. L’ambiance chez lui était devenue presque intolérable, quelque chose se préparait sans qu’on sache quoi ni d’où cela vienne. Si ce n’était ni Dieu ni Satan, qui s’amusait à les faire tourner en bourrique ainsi ? Pour amuser la galerie ? Il n’y avait aucune logique à cela. Dans la tête du jeune homme, il sentait qu’on tentait de pénétrer là où il ne fallait pas, dans ses souvenirs de mortel qu’il avait cadenassé, refusant presque d’en parler et de s’en souvenir car ça faisait trop mal, c’était trop dur et surtout cela pouvait le faire beaucoup trop souffrir. Il avait passé des années à fuir son passé, comment avoir vingt deux années qui reviennent en pleine figure ? Malheureusement cela allait se produire et personne ne pourrait l’en empêcher … Car sous leurs yeux bleus à tous les deux, quelque chose se produisit : une forme se tenait entre les deux hommes, un peu floue mais une sensation connue, quelque chose du passé qui refaisait surface sans qu’on sache vraiment quoi mais qu’on connaît quand même. C’était étrange et Mat fut saisit de stupeur, incapable de bouger, juste pencha la tête en fronçant les sourcils, essayant de deviner ce que cela pouvait bien être. Puis une explosion comme si une bombe était tombée sur l’appartement ! Malgré leur résistance, Matt et Darren furent projeté au sol à quelques mètres de là. Tout devenait sombre, même dehors on ne distinguait plus les lumières de Hollywood et quelqu’un entrait à nouveau dans sa tête. Lui rejetait à chaque fois, refusant qu’on vienne s’introduire au plus profond de lui, là où même Houston ne venait pas par respect pour son Bras Droit. Et là, cette « chose », impossible de l’appeler autrement, tentait de faire ce qui était interdit et intolérable aux yeux de l’ange. Mais malgré toute sa force et toute sa hargne, il savait que le combat était perdu car lui flanchait de seconde en seconde alors que l’autre gagnait en force. Darren lui avait déjà ouvert son esprit, d’où la force de la chose. Puis ce fut Matt qui n’arriva plus à résister et en lui sautèrent des centaines de cadenas, cela lui mal dans tout son être qu’il serra les dents pour ne pas hurler. Si vous saviez tout ce qu’il a accumulé dans sa vie, beaucoup en auraient versé des larmes ou auraient fait des arrêts cardiaques. Tout revenait en mémoire, des images pas oubliées mais qui n’avait plus été visionnés depuis des décennies.

Et cette voix. Cette voix qui fit lever la tête de Matthew, l’air perdu, la bouche entrouverte de stupéfaction. Un mot avait suffit pour reconnaître cette voix. Ses grands yeux bleus se mirèrent d’étoiles, cette chose c’était en fait le fantôme de leur souvenir qui revenaient et avait pris la parole le timbre du petit Darren, là c’était bien le petit frère qu’il avait connu. Cela était étrange et surréaliste. Tellement qu’il était bouche bée et incapable de sortir le moindre mot. De toutes manières, c’était trop tard car les souvenirs remontaient. Quelque chose de tellement lointain que la poussière l’avait recouverte. Mais tout était intact, des images au son, même jusqu’aux sentiments ressentis. Et évidemment, on piochait dans l’esprit de l’aîné, qui avait vu leurs deux vies grandir ensemble depuis si longtemps …

*début flash-back*
L’appartement des Roller. Cet endroit qu’on appelait logement ne ressemblait à pas grand-chose. Certes il y avait un salon avec un canapé, une cuisine, une salle de bains et deux chambres, mais par la saleté et par le froid qui y régnait, on pouvait plus appeler ça un taudis. Il n’y avait pas âme qui vive dedans … Ah si, près de la fenêtre il y avait un petit garçon. Un peu maigre pour son âge mais les cheveux d’un beau blond et de grands yeux bleus qui regardaient par la fenêtre. C’était Matthew à 8 ans … Cela faisait un petit temps qu’il était seul. Il ne pouvait pas dire combien mais lui se comportait comme un « grand » comme il le disait si bien : ses parents ne s’occupant pas de lui, il allait à l’école tout seul, faisait ses devoirs dans son coin, trouvait à manger là où il pouvait et se tenait sage pour ne pas causer d’ennuis. Des amis ? Oui quelques uns à l’école mais une fois la dernière sonnerie retentit, il était à nouveau seul. Cela le pesait … Un si petit enfant n’avait connu que la solitude depuis sa naissance. Une mère qui n’avait pas assez d’argent pour se faire avorter alors qui l’avait gardé mais cela ne l’avait pas empêché d’avoir tenté de tuer son fils plusieurs fois qu’il était bébé juste parce qu’il pleurait. Et depuis ce temps, il n’avait plus pleuré. Juste attendait que le temps passe, que quelque chose de positif se produit. Il y croyait dur comme fer, savait que quelque chose ou quelqu’un allait le délivrer de son quotidien.

Et pendant qu’il regardait par la fenêtre debout sur une chaise pour voir Los Angeles, évader son esprit de cet espace confiné, il entendit les clés dans la serrure. Ses parents, Hilary et Lance étaient ce qu’on pouvait qualifier de mauvais parents, même pas parents du tout. Et pourtant ils avaient fait un fils il y a 8 ans et là, elle tenait à nouveau un bébé dans ses bras. Elle le portait presque comme un vulgaire chiffon, semblait fatiguée et Lance avait l’air ivre. Alors bien vite, Matt descendit de sa chaise et s’y assit, l’air de rien. De toutes manières, ils ne firent même pas attention à lui, posèrent le bébé sur le canapé et allèrent se coucher tout en s’engueulant.

J’en voulais pas de ton gosse.

Le mien ? Parce que tu crois que j’ai envie d’avoir des gosses qui gueulent partout ?

Et leur engueulade se poursuivait dans la chambre et même si c’était assez proche, l’enfant entendait cela comme un bruit de fond, avait attendu quelques instants avant de s’approcher doucement du bébé. Il avait les yeux entrouverts, bleus tout comme son aîné. Sur son tout petit poigné on pouvait y lire son nom sur un bracelet bleu : Darren. Matt sourit, ce qui était rare dans cette maison, et délicatement tenta de prendre convenablement son petit frère dans ses bras. Ca y est, il n’était plus seul. On avait entendu son souhait le plus cher, même si leurs deux vies n’allaient pas être toute rose, c’était plus facile de lutter à deux que seul. Imaginez ce petit garçon, pas très grand et pas très costaud, emmener un bébé dans sa chambre pour le protéger de parents qui s’engueulaient toujours. Il ferma la porte et installa le bébé le plus confortablement possible sur le fauteuil qui lui servirait de lit tant qu’il serait tout petit. Et là, Matthew le regarda avec cet air tendre qu’il avait toujours conservé au fil de ses années avant de parler de sa petite voix fluette.

Je te promets de te sortir de là un jour.

Cette promesse venait du fond du cœur, cela se sentait. Son petit frère allait connaître des moments difficiles mais lui les ayant connus avant, ce serait plus facile de les éviter.

Je suis Matthew, ton grand frère et je ferais tout mon possible pour que tu grandisses normalement. Je serais toujours là pour toi.

Et il regarda le bébé s’endormir, ce dernier tenait dans sa petite main l’un des doigts de son aîné. Il n’y avait plus de solitude mais maintenant leurs vies allaient être un combat quotidien et ils n’étaient pas au bout de leurs peines…
*fin du flash-back*

Matt resta un peu hébété de redécouvrir tout cela. C’était étrange car il avait ressenti la solitude du départ. Cette longue solitude qu’il avait connu durant huit années sans jamais se plaindre alors cela lui avait tellement pesé, ça c’était évaporé à l’apparition du petit bout de chou aux yeux bleus qui serait son petit frère qu’il avait décidé de couver, il avait été père avant l’âge requis et avait toujours fait ce qui lui semblait juste … Cela lui avait fait bizarre de tout ressentir, ce grand mal-être dans un si petit garçon, cette joie de ne plus se savoir seul et puis cette affection prise d’emblée pour Darren.

Et la forme qui se tenait entre eux avait gigoté un petit peu comme pour donner son avis, son improbation à ce souvenir. Matt se releva, fixa un instant la forme et regarda son frère toujours à tête, à quelques mètres de lui.
Toi qui te disais être seul, je ne sais pas si tu l’as ressenti mais ça, c’était de la solitude. C’est être gamin et n’avoir rien. Pas de parents, pas vraiment d’amis, personne avec qui passer le temps de cet endroit qui était chez nous. Quoiqu’il s’est passé au long de toutes ces années après, c’est toi qui a ouvert le chemin de ce que je suis aujourd’hui, tu m’as sorti de ce silence et cette solitude qui m’accompagnait à chaque heure, chaque minute, chaque seconde que je passais dans ce lieu sordide où on vivait avec ce qui était nos parents, enfin du moins ceux qui nous ont faits. Tu peux être l’être le plus pourri du monde, ce petit frère qui est venu dans ma vie ce jour là m’a changé et ça, tu ne me l’enlèveras pas. Tu fais parti de moi-même si tu veux faire croire le contraire, même si tu veux tout me mettre sur le dos et que tu me détestes pour n’importe quelle raison que ce soit. Si tu veux me tenir responsable de ce que tu es devenu, vas y mais je n’ai jamais voulu que tu sois comme ça. Par contre toi tu es responsable de ce que je suis. Et tu peux haïr Dieu et ses anges dont je fais partie, tu en as crée un malgré toi.

Il y eu un silence qui fut brisé par la forme qui émit à nouveau un son. Un petit éclat de rire d’enfant qui eut pour effet de surprendre Matt qui regarda la chose avec une point de tendresse dans le regard. Lui se souvenait de tout, ce n’était pas forcément un bien mais quand on a pas le choix.

Tu sais qui riait comme ça ? Toi. C’est aussi toi qui as parlé tout à l’heure … Enfin, je devrais plutôt dire que c’était mon petit frère, celui qui m’écoutait, que je protégeais et que j’aimais tout comme il m’aimait. C’est donc ce souvenir qui fait cette connexion entre nous … Je …

Sa voix se brisa, il ressentait tous ses souvenirs en lui se baladaient et parfois certains étaient plus douloureux, d’autres plus doux et tous ces mélanges étaient perturbants. Surtout que si maintenant, ils regardaient les vieux souvenirs, de vieux fantômes allaient revenir et de vieilles cicatrices allaient se rouvrir. Le vainqueur allait sûrement être leur passé et non pas l’un d’entre deux.

[J'espère que ca va te plaire, j'ai essayé de reconstituer le mieux possible notre "souvenir" en commun ... Et j'ai hâte d'entendre la musique sur laquelle tu fais tes super posts !]

[C'est tout simplement superbe ! J'ai l'impression d'être en osmose avec toi sur ce topic. Tes posts sont parfaits, ils s'adaptent trop bien à mon inspiration. En plus, tu viens de dire en une seule phrase tout ce que j'avais essayé d'expliquer en mp. XD]

Le seul qui n'avait pas encore compris, c'était Darren. Cette forme qui la plaquait au sol, ce n'était autre qu'un misérable mioche... la voix en était la preuve. Avant qu'il ne comprenne de qui il s'agissait il revit leur souvenir commun. Lui avait oublié, totalement ce jour de bonheur... mais pas son frère... Par son existence il avait scellé son avenir à lui... Il tâcha de se relever et y parvient, résistant contre cette puissance qui l'avait mis à terre. C'est alors que son frère lui expliqua. La rage et la colère qu'on l'on lisait dans ses yeux se tranforma en une haine profonde, noire. Il pointa ses yeux endiablés sur le jeune garçon visible mais entouré d'une brume, comme s'il n'était qu'une illusion. Il projeta la force de son esprit contre lui mais passa au travers sans rien pouvoir atteindre. Par télékinésie il envoya des dizaines d'objets contondants sur ce misérable mioche qui osait le défier. Voyant que toutes ses actions étaient vaines il perdit littéralement patienta et poussa un cri vengeur, effrayant. Et il continua à l'adresse de ce gosse :

- Des comme toi j'en ai tué des centaines ! Espèce de vermine pathétique, je n'ai jamais ressenti ce que tu essaies de me faire comprendre ! Pour toi je n'ai qu'une profonde aversion, tu devrais être mort mais j'ignore par quel moyen tu as suvécu... De toute façon, personne n'a jamais voulu de toi à part ce tas de plumes misérables qui se prétend ton protecteur ! Je vais terminer mon travail... cette partie là n'existe plus !

Et soudain, comme si un choc puissant venait de se produire à l'extérieur, la forme qui restait là plongea ses yeux bleus dans ceux de Darren. Une larme coula... une seule... et l'effet produit fut gigantesque. Une onde de choc explosa de lui et fit voltiger toutes les meubles alentours, allongeant encore une fois les deux Roller sur le sol. Les vitres se brisèrent et le noir se fit total. Dans les yeux de la forme il y avait toujours des larmes. La brume s'épaissit et à nouveau les verrous sautèrent avec une facilité déconcertante. Des souvenirs que Darren n'avait plus en mémoire revinrent teinté d'une légère odeur de sel sans doute celle des larmes...

*Début du flashback*

- Matt, amène-toi !

A nouveau ce jeune garçon blond apparut. La solitude marquée sur son visage avait disparu totalement... en fait, on y lisait une lueur de bonheur, comme une petite flamme qui revivait. Son frère dans les bras il s'avança vers son père. Ce dernier lorsqu'il fut suffisament proche lui asséna une gifle qui claqua. Le bruit sec réveilla Darren qui pleura... Exaspéré, son père arrache le gamin des bras et sans aucune douceur le balança à côté de lui sur le canapé. Ce qui en fit rien d'autre qu'aggraver la situation. Voyant que Matt allait récupérer le mioche il lui retourna une autre gifle cinglante qui lui firent monter les larmes aux yeux. Et de sa bouche pateuse s'émana un relent d'alcool à la limite du supportable.

- Tu récupèreras ce tas de couches puantes quand j'aurais ma bouteille à côté. Va me chercher le whisky et bouge-toi !

Il bouscula aggressivement le jeune garçon qui s'éxécuta. Pendant ce temps, Darren continuer de pleurer et son père, à la limite de le jeter par la fenêtre écrasa sa cigarette sur la cuisse droite de son propre fils. Aussitôt un hurlement de douleur résonna dans le taudis. Matthew revint affolé avec une bouteille à la main mais dans le précipitation il s'était trompé et avait pris du vin rouge. Quelle ne fut pas son erreur... A peine eut-il approché pour donner le récipient en verre qu'il voulut récupérer son petit frère. Mais c'est une main collante de transpiration et puissante qui le souleva du sol et le jeta à terre. Lance enleva sa ceinture et fit claquer la boucle sur Matthew avec une cruauté glaciale. Le jeune ne dut son salut qu'à Hilary qui sortant de sa séance de prise de cocaïne, à moitié nue, vint carresser le cou de son mari. Ce dernier, ne se fit pas prier et tous deux se rendirent dans la chambre pour faire les affaires personnelles sans se soucier des plaies de leur aîné ni même de la brûlure du petit dernier.

Darren avait huit mois et malgré tout sa seule relation familiale n'était autre que son frère. Lance passait son temps à hurler entre deux comas éthyliques et Hilary s'envoyait des psychotropes à tout va. Une atmophère malsaine soldée de temps à autre de coups ou des violences faites contre les enfants. Matthew malgré les coups trouva le courage de se relever, de prendre son frère et de se réfugier dans ce qui ressemblait plus à une prison qu'à une chambre. Il posa son frère avec délicatesse sur le fauteuil et l'embrassa sur le front. Avec un bout de drap et une petite bouteille d'eau qu'il gardait prêt de lui il nettoya l'oeuvre folle de son père.

- Mat...

La syllabe fut lâchée. Ce fût la toute première qu'il disait depuis sa naissance. La vue de son frère l'apaisa et il s'endormit. Dans le coeur de son aîné, ce fut du réconfort qu'il trouva, une certaine reconnaissance envers ce petit être haï de tous qui pourtant n'avait rien fait pour le mériter. Ce bébé qui venait de lui faire oublier ses coups et qui semblait comprendre qui était la seule personne à l'aimer. La soirée se poursuivit et sur un note un peu moins dramatique les époux Roller, totalement défoncés finirent groggys au pied du lit, heureusement sans voir conçu d'autre enfant à martyriser...

*Fin du flashback*

Le retour à la réalité fut difficile. Et pourtant il fut immédiat. La forme relâcha à nouveau la pression sur les deux personnages et plongea ses yeux humides dans ceux de Matthew. Un voisx résonna alors dans sa tête, à lui seul, la voix d'un enfant, un jeune gosse désemparé... cette voix qui avait bercé son entrée au Paradis, de longues années auparavant... "Je n'ai jamais voulu ça... pas comme ça... c'est de ma faute..."

Darren se redressa, légèrement sonné apr la violence du choc et darda un regard cruel sur son frère. D'une voix sarcastique il reprit :

- Tu trouves surement que jouer les héros te va comme un gant... Il ne te manque plus que la cape pour que tu sois le nouveau Superman... Le pire dans toute cette histoire c'est que tu as l'air de croire que ce que j'ai fait de toi est bien... Pour ma part, je ne dois mon avenir qu'à moi-même. Le reste n'est que futilité, une goutte de sang dans une piscine... Et quelle que soit cette chose, elle est morte, à jamais.

Le petit garçon s'assit alors par terre, la brume se fit plus transparente et son visage apparut. Il était si différent de celui qu'arborait Darren maintenant. Seul les yeux bleus, vivants et non froids de l'adolescent, ressortaient nettement. La petite voix, brisée résonna alors dans la tête de Matt comme dans celle du Bras Gauche, comme un écho, une délicate attention posée sur le coeur du Bras Droit et une remarque cinglante dans l'esprit de son opposé : "Merci... de ne m'avoir jamais oublié." Un petit sourire fut esquissé et à nouveau comme une légère pression qui peu à peu de façon moins violente remontait... Darren compris alors que la forme venait de son frère, de son coeur mais qu'elle était sortie de son esprit à lui, cette prison dans laquelle il croyait l'avoir anéanti pour toujours...

[Pour la musique j'ai pas trouvé comme l'héberger. Mais si tu veux je te la donne par msn. ^^ Tu peux m'ajouter à tes contacts si tu veux. Yeah

]

Aussi étrange que ça paraisse à dire, et pourtant c’était vrai, Darren parlait à lui-même. Le démon, vil et méchant, s’adressait au gamin qu’il était avant, le tout sous les yeux de Matt qui cherchait à comprendre le pourquoi de cette situation, pourquoi ce souvenir choyé par l’un et occulté par l’autre revenait faire surface maintenant. Le jeune Darren semblait inaccessible sous sa brume même si sa forme se dessinait un peu plus sous les grands yeux bleus d’un Ange qui n’en revenait pas. Quand un souvenir que l’on croyait mort, car le temps avait passé, revient sous ses yeux, il y avait de quoi ne pas trop comprendre. Ce qui allait revenir dans leurs mémoires allait faire mal, tout avait été douloureux, très sombre dans leur quotidien et très violent. Le premier qui avait été montré faisait preuve d’introduction à leurs souffrances : la solitude et l’abandon. Etait ce comme cela qu’on élevait des enfants ? Sûrement pas, le Bras Droit n’aurait pas été ce père abject comme Lance, il aurait au contraire choyé sa petite Rose, l’aurait câliné et protégé de ce monde d’horreur, voulant lui donner une enfance le plus longtemps possible car elle aurait tout le temps de voir que le monde n’était pas toujours des plus doux ni des plus roses. Les deux n’avaient pas vraiment eu d’enfance, Matt avait du jouer au papa à 8 ans, et les années d’avant il n’avait rien fait à part attendre que le temps passe, espérant que quelque chose le détache de cette vie. Et revoir ce passé devant soi comme ça faisait un choc, cela perturbait le Bras Droit bien plus que ses yeux ne pouvaient le dire, juste se relever avec les jambes flageolantes. D’ailleurs il ne pouvait se détacher de cette petite forme entre le Démon et lui, comme hypnotisé, tout ce qu’il avait enfoui dans son cœur et son âme, sa vie de mortelle bien trop douloureuse pour en parler ou même y penser se mettait devant lui comme ça, comme pour dire qu’il était temps d’affronter son passé une bonne fois pour toute. Le temps alternait la vision de ce que l’on a vécu, ce n’était peut être pas plus mal de revoir quelques petits trucs, histoire de remettre les choses en places et finalement d’avancer.

Le souvenir qui arriva, Matthew s’en souvenait. C’était un de ses jours où Lance se souvenait que les deux existaient, qu’il prenait son aîné pour un esclave et son cadet pour une sorte de poupée à torturer. C’était ce genre de jours que le jeune homme avait haï comme jamais, laisser seul son frère avec ce monstre pour ne pas plus attiser sa colère mais c’était là aussi où la violence faisait quotidien. Par négligence, par précipitation, par peur pour le petit être, il avait fait une erreur et avait du le payer de sa personne par des coups de ceinture. Vous ne pouvez pas imaginer ce que ces coups firent au grand blond. Il la sentit claquer sur son dos comme si cela se faisait maintenant, de suite. La douleur cuisante se fit ressentir et cela lui fit tellement mal que ses yeux s’embuèrent et qu’il tomba à genoux, baissant la tête. On aurait cru qu’ils avaient fait un saut dans le passé, c’était totalement affolant. Est-ce que Darren ressentait aussi les sentiments qui régnaient dans sa mémoire, pouvait il éprouver des souffrances physique comme son grand frère ? Peut être, en tout cas Matt souffrait de ces coups de ceinture encore quelques longs instants avant que le souvenir ne continue de manière plus tranquille. Le premier mot de Darren. Quoi de plus beau que ce soit le nom de celui qui donnait tout son amour ? Généralement, c’était « maman » ou « papa » comme pour remercier les parents de tout l’amour qu’ils donnaient. Mais vu la tête du couple Roller, ce fut le nom de Matt qui sortit de cette petite bouche. Un moment de bonheur qui avait de fait de l’apaiser un peu, calmer la douleur physique. Ainsi se termina cette évocation. Le Bras Droit était toujours à genoux, la tête courbée vers le bas, les yeux fermés. Il écouta cette petite voix dans sa tête et fit non dans la tête, incapable de parler. Dans son dos, on pouvait voir sa chemise un peu tâchée de sang bien que son corps soit intact. Etait ce les marques de Lance ? Sans aucun doute oui. Il ne bougeait pas, écoutant à présent son frère mais l’adulte cette fois ci. Matt Roller, un super héros ? Par contre, ici la réponse sera négative. Le Bras Droit n’avait aucune prétention de rien, juste d’avoir fait ce qui était juste. Sans bouger, les yeux toujours clos, il se mit à parler.

Un héros ? Non, pas du tout. Un héros est quelqu’un qui réussit, qui sauve ceux qui en ont besoin, qui est reconnu par les autres en tant que tel. Je n’ai pas réussi à sauver celui qui avait le plus besoin : toi.

C’était vrai, il n’avait pas réussi même s’il restait une petite partie de Darren, le Mal avait pris le dessus. Le passé ne changerait rien, son cadet serait toujours un Bras Gauche, un allié de Satan, ils seraient toujours des opposés les plus total, jamais à nouveau unis. C’était fini … Heureusement que cet espèce de petit fantôme dit cette petite phrase qui faisait monter les larmes dans les grands yeux azurs de l’Ange qui releva la tête et les ouvrit en esquissant ce petit sourire doux et il se sentait apaisé d’un coup mais en même temps avait envie de pleurer, relâcher cette pression d’un coup par quelques mots de cet enfant qu’il avait protégé. Ne dit on pas que la vérité sortait de la bouche des enfants ? Il tendit la main comme pour le toucher mais son geste s’arrêta sa main fit demi-tour. Il resta donc à genoux et baissa sa tête, sentant quelque chose s’ouvrit en lui. Quelque chose lui revenait en mémoire.

**début du flash-back**
Les années étaient passées. On voyait que Matt avait grandi, il sortait de la chambre suivit de son petit frère qui savait marcher. Darren avait 3 ans et son aîné 11. Les deux passaient tout leur temps ensemble, dès que Matthew rentrait de l’école en courant, pour lui éviter de passer trop de temps en compagnie des parents. De son père surtout, qui était une ordure de première. Leur mère ? Disons que depuis quelques temps, Hilary semblait moins portée sur la bouteille et l’enfant la voyait de moins en moins défoncée. Depuis deux jours, elle était clean. Un peu stressée et pas très bien, sur les nerfs légèrement mais il y avait un léger mieux. Mais aujourd’hui allait marquer un tournant dans leur vie. C’était le jour de l’anniversaire de Darren. Dans la chambre, Matt avait fait toute petite fête entre eux deux et avait réussi à dénicher de quoi faire un petit gâteau. Mais pour parcourir le salon pour aller dans la cuisine, ils entendirent un cri déchirant venu de la salle de bains. C’était Lance. Pétrifié sur le coup, l’aîné prit la petite collation et prenant son petit frère par la main, il l’entraîna dans la chambre.

Cette petite pâtisserie était sûrement digne d’un festin royal à leurs yeux vu le peu qu’ils mangeaient. Mais Matthew regardait son petit frère avec son sourire ébahi. Mais quelque chose le perturbait, il sentait quelque chose n’allait pas. Il se leva donc tout en regardant son frère dans les yeux.

Ne bouge pas, je reviens.

Et Matt partit vers la salle de bains doucement, voir ce qui s’y passait. Tout d’abord, il y vit Lance, une bouteille à la main, pleurant sur le bord de la baignoire. En s’y approchant un peu plus, ses petits yeux s’emplirent d’effroi, ce qu’il voyait le choqua à un point inimaginable : Hilary, dans la baignoire, baignait dans de l’eau teintée de sang. Elle était pâle, blanche comme un fantôme et inanimée, comme morte. C’est ce qu’elle était d’ailleurs, leur mère avait quitté ce monde en se donnant la mort. Quelques larmes coulèrent sur ses petites joues. Pas vraiment de tristesse, enfin un petit peu mais surtout d’horreur, sous le choc et savoir que la seule personne qui arrivait vraiment à calmer Lance était partie. Finie le semblant de paix, Lance n’aurait plus beaucoup de limite. Le mot cauchemar allait prendre toute son ampleur … D’ailleurs lui releva la tête et levant ses yeux rouges vers ce qui était son enfant, son visage se durcit et il jeta la bouteille dans la direction du pauvre Matthew mais tellement bourré qu’il rata complètement sa cible. Il se releva et poussa le jeune garçon violemment contre le mur.

Pousse toi de mon chemin, sale gosse.

Matt avait toujours son regard sur le cadavre dans la baignoire. Cela le perturbait tant qu’il était pétrifié sous l’horreur de cette vision. Puis un bruit sec retentit et des pleurs d’enfants se firent entendre. Vite, il courut vers le salon sur ses jambes maigres et vit Lance s’acharner sur Darren qui était sorti de la chambre pour se laver les mains où il y avait un peu de sucre, son frère lui avait appris la propreté.

C’est ta faute ! Tu vas payer pour ça !

Et les coups de poings tombèrent sur la pauvre petite créature de 3 ans tout juste. Puis les coups de pieds s’en mêlèrent aussi. Le pauvre petit Darren était sur le sol, presque inconscient, sanglotant. Matt se mit entre le bourreau et sa petite victime, tombant à genoux et se prit un violent coup de pompe sur la hanche gauche.

Arrête ! Il a rien fait !

Elle est morte et ce petit morveux continue de rire ! Rien ne serait arrivé sans lui !!

La rage s’entendait dans sa voix, se voyait sur son visage rougit par les efforts et l’alcool qui infestait aussi son haleine. Il ressemblait à une sorte d’ogre, un monstre, un cauchemar pour les enfants. Matt en avait peur mais il ne pouvait pas laisser son petit frère se faire frapper ainsi. Il se prit une baffe monumentale, sa petite joue devint de écarlate mais rien n’entacherait sa petite mission de défendre celui qui partageait son quotidien. Il joint ses deux petite mains l’une contre l’autre, comme pour adresser une prière.

Laisse le ou tu vas le tuer. S’il te plaît, arrête de lui faire du mal. Je t’en prie, arrête …

Sa petite voix suppliante était son dernier recours. Il était trop petit pour pouvoir se défendre si son père décidait de continuer. Mais Lance, la main en l’air, arrêta son geste et repartit, direction de la chambre, l’air dépité, le pas traînant. Matt regarda son petit frère puis le prit dans ses bras pour l’amener dans la chambre, leur petit recoin. Il l’allongea sur le lit, commença à le soigner et chercher des bandages pour panser les plaies et bloquer les possibilités de fractures.

Matt …

Darren, tiens le coup, ne me laisse pas seul avec ce fou. Je vais te soigner, ne t’en fais pas.

Il lui caressa le front doucement et continua d’entreprendre les soins pour le sauver.
**fin du flash-back**

Retour à la réalité, Matt se tenait toujours à genoux, les mains plaquées sur le sol et le regardant tout en reprenant son souffle.

J’ai maudit ce jour, Hilary avait commencé à arrêter mais s’est suicidée lâchement, nous laissant avec ce type. Tu ne peux pas savoir à quel point j’ai eu peur pour toi. Tu étais tout petit, je ne sais pas si tu t’en souviens mais sache que même si je savais que tu serais devenu, je t’aurais sauvé. Et non pas pour ne pas rester seul ni parce que je suis un héros comme tu dis toi-même, car tu es mon frère et ça, quoique tu dises ou quoique tu penses, cela restera ainsi pour toujours.

Il releva les yeux et toujours à genoux, il se mit le dos droit pour regarder les deux parties de son petit frère tour à tour. L’espèce de petit fantôme continuait de sourire doucement en direction de Matt et lui parla, dans sa tête « Tu n’aurais peut être pas du … ». Secouant la tête il s’approcha du petit garçon mais ne le toucha pas, il avait peur qu’il s’en aille au cas où.
Non, j’ai fait le plus juste pour moi et s’il y a des choses que je regrette dans ma vie, ça non.

Puis, il regarda son frère en adulte pour continuer son discours :

Tu n’as toujours rien compris après toutes ses années. Tu as en toi, toujours cette part d’enfant, ce petit garçon que j’ai protégé, choyé, aimé de tout mon cœur. Que tu le veuilles ou non, ce sera toujours en toi, comme moi qui ai cette part d’ombre. Malheureusement, tu ne peux pas t’en défaire tant que je serais là. Pas de chance, je suis immortel et pas de chance pour moi, tu l’es aussi. Je ne pourrais jamais être l’ange parfait car j’ai une certaine haine en moi. Et toi, tu auras beau exterminé la race humaine et persécuter tous les anges que tu croises, tu auras toujours une part de douceur.

[J'ai pas msn, j'ai pas assez d'amis ni assez de temps pour y aller. Moi, je te fais écouter une chanson qui va très bien avec ce topic Wink

]

[Déjà je tenais juste à te dire que j’aime beaucoup la chanson et ton post. Et ce n’est pas grave pour MSN, je vais essayer de te faire entendre ce que j’écoute. Mais c’est purement symphonique, les paroles me déconcentrent… XD Et étant donné que Darren a survécu c’est lui qui évoquera la mort de Matt… ^^ si tu es d’accord…]

Darren regarda son frère, il fut étonné lui-même par le sang qui coula de son nez. Des tâches rouges apparurent sur le sol. De nombreuses blessures étaient apparues sur son visage… Apparemment leurs souffrances allaient être morales et physiques. Pour le Bras Gauche, cela n’était tellement un problème… enfin au début. Car la douleur ne venait pas de leurs pensées mais de cette forme, de ce petit Roller, réfugié au fin fond de sa fumée blanche… Et quelle ne fut pas sa torpeur lorsqu’il entendit son frère parler de son passé. Impossible que cette chose soit lui ! Il l’avait supprimé, effacé de la surface de cette Terre. Rien n’était plus affligeant d’ailleurs que de voir ce petit-être si calme… Alors que Darren ne nourrissait à son encontre que des envies cruelles, celle de l’égorger en faisait bien évidemment partie. Oh bien sûr qu’il se souvenait de ce malheureux jour, ces fameux trois ans… C’est ce jour là qu’il aurait dû mourir… mais Matt avait été là… Il reprit sur un ton glacial, ses yeux plongés dans les siens. Son visage était éclairé par la brume luminescente de la forme et prenait un aspect terrifiant. En effet, de ses cicatrices s‘écoulait toujours du sang, écarlate sur son visage pâle comme la mort.

- Tu as raison, tu es loin d’être le héros dont tu rêvais… Tu n’as pas réussi dans ta quête de la quiétude… Je suis ton plus lamentable échec et en même temps une formidable réussite… Imagine donc le nombre de braillards qui n’ont plus enquiquiné leurs parents à chialer dans toute la maisonnée. Méchant Darren a bien veillé à ce qu’il ferme leur clapet pour toujours… Tu ne sauras jamais ce que c’est que de tuer… c’est si bon… Si seulement tu avais eu le courage de me laisser partir, ton âme en serait bien plus apaisée… Et il faut que tu saches une dernière chose avant que ce sale gosse de tôlard ne vienne s’incruster dans mon crâne… De mon côté, tout ça est bel et bien mort… Mais j’avais oublié les anges et leur fâcheuse tendance à garder les plus mauvais souvenirs de leur vie ainsi que leurs erreurs… Une fois de plus tu montres ton pitoyable échec… et ma réussite écrasante.

Le silence s’instaura comme reprenant son trône. En fait, Darren n’avait pas tout à fait, tort, cette partie là de son passé n’existait plus vraiment chez lui. Ce qui se produisait était le résultat simple de d’une équation… Matthew avait apporté le souvenir, l’image de son frère plus jeune… et de l’esprit de Darren en était tiré toute la mémoire… Les deux se mélangeaient… comme le noir et le blanc pour donner du gris. Au dehors, les alarmes de voitures s’enclenchèrent et tout Fountain Avenue était privée d’électricité. La forme s’éloigna de Matt… lentement. Darren s’en approcha avec une telle haine qu’un instant la brume parut s’assombrir. Il tendit la main vers ce qui semblait être le crâne du garçon et sans rien y comprendre, il se passa quelque chose de terrible. Il fut totalement décontenancé par ce qu’il attrapa, des cheveux de gosse… les siens plus jeune, à huit ans exactement… par quel pouvoir pouvait-il donc en être ainsi ?

* Début du flashback *

- Pourriture, viens par là.

Lance asséna un coup si fort à Darren que sa colonne vertébrale émit un craquement horrible… Il ne comprenait pas… cet homme qui quelques instants plus tôt avait reçu sa maîtresse de classe… avec une amabilité extraordinaire… Voilà que maintenant il bastonnait le jeune garçon de toute la folie dont il était capable. Il lui tirait les cheveux et ça lui faisait atrocement mal. Il sentait son cuir chevelu se déraciner peu à peu… Et puis il fut propulsé contre le mur dans un bruit sourd, à moitié assommé. Avant qu’il n’ait pu se relever, Lance avait déjà saisi le balai et fracassa le manche en bois sur les côtes des son propre enfant. Le cri de douleur qui s’en suivit fut si horrible que le bourreau en vint même à hésiter de continuer.

- Arrêtes ton cinéma… Alors comme ça tu préfères aller parler à ta prof, hein ? Je te maltraite ??? On va bien voir ça.

Le cadet Roller était recroquevillé sur lui-même mais une main puissante le fit décoller. Il faut dire qu’il n’était qu’un poids plume… Sa seule nourriture était celle que faisait son frère avec le peu de moyens qu’ils avaient… Matt… qui n’était pas là… Où pouvait-il être ? Il rentrait probablement de l’école… Il allait venir. Darren avait bien entendu ce matin que son aîné avait prévu de rentrer tard… surement pour profiter de l’extérieur… Les deux frères donnaient toujours cher pour sortir de cette maison qui ressemblait plus à un taudis qu’à un endroit convenable… Et au fond, Matthew avait raison de profiter de sa liberté, il le méritait… Il finirait par le sauver… comme d’habitude… Mais il fut tiré de ses espoirs par un claque violente sur le crâne. S’il continuait comme ça Lance allait finir par le tuer… et Darren en savait son père capable. Alors dans un sanglot faible il supplia :

- Non… je n’ai pas fait exprès… j’ai mal…

- Fallait y réfléchir avant… C’est trop tard… Il est temps que tu paies… ça c’est pour t’être fait plaindre !

Il empoigna son fils par le cou et le souleva à trente centimètres au dessus du sol pour le projeter contre la lourde porte de la cave. Le choc assomma l’enfant. Voyant que son fils ne bougeait plus, Lance ouvrit la porte et avec son pied lui fit dégringoler les vingt marches de la cave. Puis il la ferma avant de s’envoyer une bouteille entière de whisky. Darren gisait inconscient, sur un sol en terre sèche, dans le noir total… Un rat vint le renifler et s’enfuit en sentant son léger souffle chaud sur son pelage crasseux. De toute façon, le garçon n’était plus parmi les mortels… Il était dans une sorte de passage… un long tunnel avec une lumière au bout… Il rampait vers cette lumière… Matt… Au fur à mesure il vit quelques épisodes de sa courte existence, défiler inlassablement… Et puis, il parvînt jusqu’à un arbre… mort… il leva les yeux vers la lumière et y vit le visage de son grand frère… Enfin il était là. Mais alors qu’il avançait vers lui, l’arbre mort l’enserra de lianes… Epuisé, il se laissa prendre et leva une dernière fois les yeux vers son aîné. Ce dernier arborait un sourire satisfait et lui tourna le dos…

« NON !!! »

Le cri lui arracha des larmes et un sanglot et il se réveilla. Lance était à coté de lui, au fond de la cave et surpris par la prise de parole aussi subite que puissante il balança un revers dans la mâchoire de son émetteur, armé d’un tournevis. Une amère flaque de sang se répandit sur sa langue. Il regarda son père avec des yeux implorants mais ce dernier saoul comme à son habitude l’ignora et il murmura à son oreille répandant une odeur d’alcool pestilentielle :

- Tu vas comprendre qui commande ici… Je vais te laisser crever… même si je ferais mieux de t’éventrer…

- Matt !!!

Darren cria de toutes ses forces déclinantes le prénom de son frère dans l’espoir de le voir franchir la porte… Et alors Lance qui s’était redressé lui envoya un coup de bâton dans le ventre. Il sortit un bâillon et le lui passa de force. Puis avec un ton totalement défoncé il dit :

- Ton salaud de frangin s’est barré… il en avait marre d’un machin insignifiant comme toi… il s’est sans doute tiré avec une fille… et il te laisse crever, lui-même au fond, il sait que tu n’as que ce que tu mérites… Tu n’as toujours été qu’une erreur… un handicap… personne ne veut de toi ici… Tu ne manqueras à personne, j’ai bien envie de te coller mon fusil sur la tempe mais, finalement, je vais laisser les rats te bouffer…

Il remonta les marches et lui lança un dernier regard, noir, si inhumain… Darren voulut crier mais le morceau de tissu était trop serré, il pleura alors… Son père mentait, Matt ne l’abandonnerait jamais… pas comme ça… Et puis, une sombre idée lui vint, et si Lance l’avait tué, lui aussi ? Il ne pourrait pas vivre sans la protection de son aîné… La lourde porte se referma dans un grincement sur les yeux brillants du jeune Roller. Adieu liberté… bonjour les ténèbres… Alors, mains liées à une poutre, solidement réduit au silence et à l’immobilisme, il leva les yeux vers le plafond et pria du plus fort de lui-même : « Faites qu’il soit vivant… Prenez-moi à sa place…». Son frère avait toujours été là pour lui… et il le savait, s’il y en avait un qui méritait de vire, c’était lui… ce grand blond, protecteur qui avait mis dans la vie d’un délinquant comme lui de l’amour et du bonheur… Darren pleura amèrement… il regrettait ses actes, sa violence… Il faisait du mal à la seule personne qui l’aimait sur cette Terre. Il avait provoqué les choses, s’il n’avait pas agressé ce petit garçon, sa prof n’aurait jamais eu l’idée de venir voir Lance… L’espace d’un instant tout avait été si beau. La discussion entre les deux adultes était posée, paisible… De l’espoir était apparu chez le garçon, Lance allait être enfin gentil. Qu’il avait tort ! Tout ça n’avait fait qu’empirer les choses. Mais quand Matt rentrerait, il le sortirait de là… il avait confiance… La fatigue omniprésente et son sang continuant de s’écouler, il s’évanouit dans la douleur. Sa dernière pensée fut adressée à son frère : « Ne me laisse pas… »

* Fin du flashback*

Le retour à la réalité fut dur et brutal. Surtout douloureux, Darren tomba allongé de tout son long sur le sol, ces cicatrices étaient affreuses maintenant et il n’en revenait pas. Les blessures avaient même taillé sous son crâne… Il avait mal au corps et à l’âme, il jeta un œil à Matt toujours debout mais ébranlé. Tout au long de ce souvenir, ses plaies s’étaient ré-ouvertes. La douleur était difficilement soutenable, insupportable pour un être humain… Il sentit le sang dans sa bouche, comme lors de cet instant. C’était comme si dieu leur envoyait ce qu’il avait vu. De sa tour, il leur envoyait tous les évènements tous les maux, toute la souffrance… C’était si puissant qu’ils croyaient revivre cet enfer. Non, mieux… il le subissait encore une fois. L’horrible cri n’avait résonnait que dans leurs crânes mais il avait été si fort que leur entrailles s’en étaient presque liquéfiées. La respiration saccadée par ce qui venait de lui arriver, Darren ne put se relever…

La forme lâcha alors dans leurs esprits : « Ne me laisse pas… ». Et puis, un tremblement se propagea à nouveau… mais au lieu de plaquer le Bras Droit au sol, ce dernier fut obligé de s’approcher. La forme avait pris le contrôle de ses mouvements et l’amenait à lui. Et puis, il y eut un instant d’hésitation comme si quelqu’un avait appuyé sur pause. La voix dit alors : « Je suis désolé… ». La main de Matt pénétra dans la brume et entra en contact avec le visage de Darren, de celui qui avait toujours été son protégé. Un temps de latence… mais Matt ne put en décoller ses mains lorsqu’il retrouva le contrôle de lui. Ses paumes brûlaient sous le contact et puis, il y eut une grande explosion qui fit plus de bruit que de dégâts… Le flashback s’opérait à nouveau… Dans tout Los Angeles une onde sonore fit sursauter les habitants. Des vitres implosèrent, des ampoules grillèrent subitement. Croyant à un tremblement de terre, de nombreuses personnes se jetèrent sous les tables pour éviter de recevoir des choses. Matt était à genou au sol… le visage de son frère entre les mains mais c’était déjà un autre souvenir qui blessait un peu plus son âme… Il tenait le visage inerte de Darren… couvert de bleus…

[Bon alors comme promis, j'ai tenté un truc pour la musique... XD Je dois juste te dire que c'est un cd entier, j'ai mis que les pistes qui m'inspirent le plus. ^^ J'espère que ça va marcher... Rolling Eyes

]

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Plus un mot sortait de la bouche de Matt. Aucune sonorité même, il était incapable de dire quoique ce soit, de pousser un cri ou de demander pardon. Rien. Il se sentait comme pétrifié, avec ces écorchures sur son dos et un peu partout qui se rouvraient à l’endroit exact où elles étaient apparues il y a tellement d’années qu’elles s’étaient refermées pour que d’autres apparaissent et ainsi de suite. Et quand on devient ange, les douleurs physiques deviennent morales et s’intensifient au fil des jours, semaines, mois, années qui passent jusqu’à presque déformer la réalité par la douleur, la culpabilité et la subjectivité du rôle qu’on a joué. Le Bras Droit semblait presque hébété, toujours sur ses jambes mais tenant on ne sait comment. Tout ce qu’il avait voulu ne jamais revoir revenait, et en plus des souffrances de revoir tout cela, les coups refaisaient leur apparition. C’était comme une deuxième vie qu’on ne peut pas changer, juste subir à nouveau, se sentir tellement impuissant, souffrir en silence puisque les cris n’avaient servi à rien, personne ne pouvait les entendre à cette époque, ou du moins c’est ce que disait les gens, ils n’avaient ni yeux ni oreilles pour la souffrance d’autrui, surtout de deux enfants avec un homme des plus horribles. Si seulement quelqu’un avait pu leur tendre la main, tout aurait été si différent … Mais comme avec des si, on peut refaire les monde, il fallait quand même commencer à accepter cette vie chaotique, teintée de gris et de noir la plupart du temps. Les rares moments sans nuages se comptaient sur le bout des doigts et valaient cher, trop cher donc ils étaient rares.

Ce que disait Darren le toucha à peine, à dire vrai, il ne l’avait à peine écouter, regardant toujours son petit frère derrière sa brume, intrigué de savoir qu’une combinaison de deux être pouvait être si intense qu’on pouvait recréer des souvenirs en presque chair et os, du moins qu’on pouvait la voir avec les yeux, leurs yeux angéliques et diaboliques. Cela faisait bizarre, complètement surréaliste, même pour quelqu’un qui était revenu sur Terre et qui avait des conversations régulières en tête à tête avec le Tout Puissant. Comme quoi, la vie ne pouvait cesser d’étonner encore et encore. L’espèce de brume servait à éclairer cet appartement presque détruit et sombre, comme la ville qui avait commencé à s’éteindre au fur et à mesure que les souvenirs des frères Roller remontaient à la surface, plus violent et plus douloureux que jamais. Matt sentait la force de départ fondre petit à petit mais il ne pouvait pas laisser le Bras Gauche savourer une victoire au combat déloyal. Et puis le fantôme de son petit frère le faisait tenir, par ses petits mots, ses regards et même juste cette présence … Pourtant le souvenir qui arriva lui fit plus mal que jamais. C’était ce jour là qu’il s’en était voulu, le jour où, pour une fois, il avait décidé de vivre, d’un peu se faire du bien. Comme je l’ai écrit plus haut, c’était si rare qu’il fallait le savourer. Et pendant que lui avait vécu le paradis, son petit frère subissait l’enfer. Un peu comme aujourd’hui. Chaque coup de Lance sur le jeune garçon faisait comme un coup de poignard dans le cœur meurtri de l’ange. Ce soir là, il aurait du rentrer, cela aurait évité tellement de choses, tellement de blessures non refermées et de larmes versées pendant des années entières. Mais comme tout était écrit, que l’on avait une destinée, certaines choses devaient arriver. Pourtant, quand un ordre est moralement inacceptable, il faut le refuser. Mais encore fallait il savoir que c’était un ordre du destin, qu’il fallait que l’un paie par les coups de poings et l’autre par les coups au cœur. Ainsi allait les deux vies de ces garçons face à face, pris dans un même souvenir qu’ils auraient souhaité ne jamais voir, enfin revoir. L’appel au secours de son frère résonnait dans sa tête. Ce hurlement à son nom dont il n’avait pas répondu fit parcourir le long de son dos un frisson glacé. Cette ordure de Lance disait des mensonges pour les désunir. Des larmes vinrent encore une fois hantées ses grands yeux bleus terrifiés. Et voir son petit frère préférer mourir pour sauver son aîné, lui adresser ses derniers mots …

Quand la réalité prit le dessus, Matt avait un visage terrifié avec ses sourcils légèrement froncés, ses yeux humides, sa bouche entrouverte d’avoir découvert exactement ce qui s’était passé cette nuit là. Il aurait sûrement préféré ne jamais voir cela, savoir qu’il avait abandonné son petit Darren lui avait fait déjà assez de mal. Il était toujours debout, tremblant comme jamais, traumatisé d’avoir vu quelque chose qui n’aurait jamais du arriver. Pendant ce temps là, le Démon était allongé sur le sol, avec toutes les blessures de cette époque. Il y avait comme une sensation de déjà vu. Et tout d’un coup, Matt se sentit attirer par le petit fantôme, et malgré ses efforts pour pouvoir reculer, rien n’y fit. La petite voix s’excusa et la main de l’Ange pénétra la brume et il eut mal comme jamais, comme si des flammes lui dévoraient sa main. Quelques instants après, une énorme explosion se fit ressentir et retirant ses doigts de la brume, il y vit du sang. Sur ses deux mains. Il les regarda, l’air horrifié, sachant pertinemment ce qu’ils allaient voir. Ce n’était que la suite logique de ce moment … Voyant le petit Darren à terre, il se laissa tomber à genoux et à peine les avoir posés sur le sol que le souvenir s’ouvrit en grand.

Non …

**début du flash-back**
Matt avait laissé une jeune femme rousse sur le pas de sa porte, l’embrassant doucement avant de lui-même repartir pour chez lui. Sur son visage d’adolescent, il y avait un sourire heureux, des yeux pétillants et une vague de bien être dans chacun de ses mouvements. On aurait pu croire qu’il était déjà ange mais non, le jeune homme n’avait que 17 ans à peine et était amoureux. C’était pour cela qu’en cette matinée grise par les nuages, lui voyait la vie en bleu. Pour la première fois de sa vie, il avait décidé de s’accorder un peu de temps pour lui, juste une fois voir ce que cela faisait d’être comme les autres, ne pas avoir un père violent et alcoolique, avoir une vie sociale d’adolescent et non pas être un père de substitution. Il prenait son rôle à cœur, non ce n’était pas une corvée mais il fallait faire beaucoup de sacrifices. Et avec tout ce qu’il avait pu faire au cours de ces années, il s’était donné le droit à un peu de douceur dans ce monde de violence et de haine. Sur le pas de la porte, une angoisse le prit soudain : et s’il s’était passé quelque chose en son absence ? Non, il n’aurait tout de même pas la malchance de ça tout de même ? Ouvrant la porte, Lance se tenait sur le canapé comme à son habitude, une bouteille à la main. Jusque là, tout était normal. Sans adresser un mot, il partit directement dans la chambre retrouver son frère. Et là, personne. L’étonnement se lut sur le visage de Matt, qui sortit et fit le tour de l’appartement, ouvrant chaque porte, chaque placard à la recherche de son protégé chéri qui ne se trouva nulle part. Avec une voix qui cachait à peine la colère, il daigna s’adresser à ce qui lui servait de père.

Où est Darren ?

Au lieu de t’envoyer en l’air avec ta pouffe, tu ferais mieux de surveiller ton frère.

Sa voix tout pâteuse à cause de l’alcool et cet air sur son visage ne disait rien qui vaille au jeune homme qui serra les poings. Il tentait de contenir sa colère mais c’était trop dur, vivre avec Lance était tellement insupportable mais il ne voulut pas le frapper, peut être que son frère n’était peut être pas si loin. Il s’approcha donc du sofa, arracha la bouteille pour la jeter sur le sol et elle explosa au contact du parquet.

Où est Darren ? Réponds !

Lance se leva, il était toujours plus grand que Matthew qui pourtant était de bonne hauteur pour un jeune homme de son âge. Cet homme avait une tête à faire peur mais son fils n’avait plus l’âge de ramper à ses pieds pour lui demander d’arrêter. Maintenant il n’hésitait pas à se battre pour se défendre et défendre son petit frère. Lance n’avait pas l’air de tenir vraiment sur ses jambes mais ses yeux menaçants traduisaient tellement de choses que certains mots semblaient totalement inutiles.

Pourquoi tu veux savoir où est ce petit merdeux ? Il est bien là où il est, il sert à rien. Moi je peux vivre tranquillement sans l’avoir dans les pattes et toi tu peux aller voir autant de petites pétasses que tu veux …

Là c’était trop. Il insultait les deux personnes comptant dans la vie de Matt qui, sans prévenir, mit un coup de poing d’une grande violence. Un peu assommé un instant, son père répliqua. Et c’est ainsi que pendant plusieurs minutes, longues et interminables, les deux se bagarèrent mais le jeune homme, dont les yeux bleus étaient devenus noirs et la douceur de son visage faisant place à une rage infinie, prenait largement le dessus, frappant de toutes ses forces à chaque fois mais Lance riait, se foutant de la tête de son aîné.

Tu te crois un homme à me frapper comme ça ? Vas y continue !

Le futur ange le saisit au col et le plaqua contre le mur, serrant comme s’il allait l’étrangler.

Je veux savoir où est mon frère !! REPONDS !!

Et le jetant au sol, il s’acharna sur lui encore et encore jusqu’à ce que son père murmura « à …à la cave … ». Un dernier coup de poing après cela et Lance partit dans les vappes. Il saignait, son visage était défiguré et regardant ses mains, Matt y vit du sang. Il avait presque battu l’homme à mort et leva le poing pour donner le coup fatal. Bloquant l’espace d’un instant, il se leva et partit en courant vers la cave. Manquant de tomber à plusieurs reprises dans les escaliers de bois pourris, il ouvrit la porte pour y voir Darren allongé sur le sol. Vite il tomba à genoux et le prit dans ses bras et le serra en pleurant.

Pardonne moi, j’aurais du rentrer cette nuit … C’est ma faute …

Darren perdait beaucoup de sang. Matthew aussi, beaucoup moins, mais il avait l’arcade sourcilière éclatée ainsi que quelques écorchures par ci par là. Il se releva et le prit dans ses bras pour le remonter. Mais au lieu de rentrer dans leur appartement, il allait cogner à côté. La femme qui vivait à côté d’eux n’était ni droguée ni louche. A la rigueur peut être était elle prostituée mais cela ne se voyait pas. Une grande jeune femme ouvrit la porte et vit les deux frères Roller, Darren évanoui et plein de sang, porté par Matt dont le visage semblait terrifié par la situation.

S’il vous plait, il faut l’emmener à l’hôpital …

La jeune femme les regarda, acquiesça, prit sa veste et suivit Matt. Le jeune homme avait du mal à marcher, Lance lui avait écorché le mollet par un fragment de verre.

Où est votre père ?

Matt indiqua tant bien que mal ses mains couvertes de sang mais ne quittait pas son petit frère des yeux.

J’aurais du l’achever cette ordure … C’est ma faute si Darren est comme ça … J’aurais jamais du …

Sa voix était prise par les sanglots et ne put rien ajouter. La jeune femme posa sa main sur l’épaule de du jeune homme qui se sentit un peu mieux avant de parler de sa douce voix.

Ne dis pas ça Matthew, les erreurs arrivent à tout le monde. Le destin n’est pas toujours juste …
**fin du flash-back**

Matt se réveilla à genoux, ses mains étaient toujours tâchées d’un sang qui n’était pas le sien mais il ne le vit pas de suite, avait toujours les yeux fermés pour contenir ses larmes bien qu’une ou deux s’échappèrent. Puis en les rouvrant, il vit encore ses mains et poussa un petit cri d’horreur avant de tenter d’essuyer ses mains sur le tapis mais rien n’y faisait, comme si le sang était incrusté depuis longtemps.

J’aurais du le tuer ce jour là, j’aurais inversé la donne … Ca aurait été moi le méchant de la famille, tu aurais grandi normalement comme tous les enfants. Je n’ai pas eu ce courage là alors qu’on aurait pu être libéré d’un poids immense … Mais je ne me souvenais pas qu’un ange vivait à côté de chez nous … Ce jour là je me souviens juste t’avoir trouvé agonisant à la cave. Tout aurait été tellement différent si je l’avais tué …

Il parlait toujours en regardant ses mains, se tut un instant avant de regarder Darren le démon.

Tu me parlais de tuer mais j’ai littéralement du sang sur les mains et crois moi, je hais cette sensation ! Si je pourrais changer un jour dans ma vie, ce serait celui là. Jamais je ne serais parti, je serais resté à la maison pour te protéger. Mais une fois, rien qu’une fois je me suis accordé un jour loin de cet enfer. Je n’ai pas choisi le bon jour et ça, je peux pas le cautionner …

Il se mordit la lèvre inférieure tandis que le petit garçon en brume posait son regard et se mit à parler « Tu m’as sauvé la vie… ». Touchant son arcade dont le sang coulait, Matt fit un non de la tête et malgré la pénombre, on pouvait voir quelques larmes se mêler au sang. Ah que c’était triste de porter un tel poids de culpabilité.

[J'arrive pas à écouter la musique mais je vois ce que tu écoutes Wink

J'ai préféré montrer la version de ce soir de Matt vu qu'il s'en veut de cette soirée. Mais la mort de Matt pas tout de suite, je pense qu'un souvenir ou deux, au moins un s'impose.]

Leur voisine… un ange mais qui pourtant n’avait jamais rien dit de leur clavaire à la police… Ces créatures répugnaient Darren au plus haut point car jamais elle n’avaient levé le petit doigt pour lui. Oui, parce que contrairement au bras Gauche, Matt avait été épaulé par quelqu’un de puissant sinon comment aurait-il fait pour retenir son geste ? Pour ne pas tuer Lance ? Ce que le plus jeune des Roller ignorait encore et toujours c’était qu’une seule force lui avait permise de ne pas agir ainsi et de ne pas se transformer en méchant : l’amour… L’ange n’avait jamais estimé bon de montrer encore plus de violence à son frangin… et puis il aurait sans doute été en prison, abandonnant ainsi son protégé dans une période difficile… De toute façon tout était joué déjà… dans les deux cas, il aurait sombré… Ils ne faisaient que revivre les évènements et c’était extrêmement douloureux moralement pour le bon et physiquement pour le mauvais qui saignait abondamment de ses blessures. La brume et la forme qu’elle contenait se recula un peu, laissant aux deux frères un instant de répit… car la suite serait bien pire… c’était à parier… Darren ne quitta pas son frère des yeux et il commença à rire, d’un air cruel, machiavélique. Il se releva, du sang coulait au bord de ses lèvres et avec son teint pâle, faiblement éclairé, il ressemblait vraiment à un vampire. Il lâcha sur un ton exaspéré :

- Et oui… Finalement, tu as agi comme un bon gars… Tu as passé du bon temps… c’est que ça ne t’était jamais arrivé… Dans cette maison, avec un père alcoolique et une mère baignant dans son propre sang de vermine… Sans compter le petit frère… le fameux boulet… pesant trop lourd pour pouvoir suivre… Et il était trop improbable que cette femme dénonce Lance, elle qui a fait partie des tiens… et qui n’a jamais levé le petit doigt pour sortir des gosses de cet enfer… Il est bien beau ton remords mais il est trop tard pour pleurnicher, Matthew… Tu aurais du tuer ton père à ce moment là… plutôt que de le laisser vivre… au final tu n’as eu que la punition que méritait ta faiblesse : la mort. Ce que tu n’a pas su lui infliger il n’a pas hésité un seul instant à te l’administrer… Il est loin le temps des réjouissances ou tu étais heureux de me voir naître… C’est si hilarant à voir ! La chute de Darren le maléfique… et le ressentiment de son grand frère… son plus grand regret ! J’espère que ce bouffon à souvenir va m’ouvrir d’autres tiroirs… encore et toujours… qu’il va me montrer à quel point tu as échoué lamentablement… J’en suis si heureux… Tu ne peux t’imaginer à quel point il est jubilatoire de voir un héros accoutré de bonnes intentions tomber et faillir… de le voir mourir !

Jamais les propos n’auraient pu être aussi blessant et malgré ce qu’il venait de revivre, rien n’avait changé pour lui. Il n’éprouvait toujours aucune pitié envers son frère, pas même une seule once de doute sur ses propres convictions. En revanche, il était désireux d’anéantir cette forme… cette chose qui au final n’était autre que sa mémoire… et qui venait de reproduire les blessures du passé sur sa chair. Mais alors qu’il allait à nouveau la regarder il s’aperçut que la forme avait disparue… complètement, mais une lumière restait toujours un peu… D’abord surpris il fut méfiant… cette chose avait conduit leurs esprits au point où ils en étaient. Dehors quelques lumières revinrent et peu à peu les objets brisés de Matt se reformèrent. Alors que Darren arborait un sourire satisfait de voir que la forme partait définitivement, la voix du petit garçon résonna dans leur tête dans une série de notes douces, apaisantes mais qui eurent pour effet de mettre en colère le bras gauche.

« Elle n’a jamais eu le choix… de parler ou pas… tout comme je n’en ai pas eu… affronter les choses difficiles à deux est si réconfortant… même les pires… »

*Début du flashback*
- Tout ira pour le mieux maintenant… Je vais tâcher de te garder près de moi… Toi et ton frère aussi, bien qu’il sache plutôt bien se défendre.

Darren était assis sur un fauteuil, enfoui sous des couvertures. Il avait un bras plâtré et des bandes sur pratiquement tout le corps… Une semaine qu’il était sorti de l’hôpital… Fractures, contusions, entorses… tout y était passé sans compter ses hémorragies quelques-unes internes qui avaient failli à de nombreuses reprises arrêter son électro cardiogramme. La femme lui servit un thé, aromatisé à la menthe… C’était si bon de sentir quelque chose de chaud se répandre dans sa gorge après tout ce temps… toutes ces horribles choses… Le calme en était presque inhumain… Pas de cris pas de gros-mots, aucune éclat de fureur à son encontre, il nageait en plein rêve éveillé… Sans savoir que sa voisine était un ange il se sentait bien près d’elle, et Matt aussi… Depuis cet incident, tous deux avaient choisis de vivre avec elle. Mais Darren sentait bien que les choses avaient changé. Son aîné ne le considérait plus avec la même complicité, il semblait s’en vouloir à chaque fois qu’il le voyait pourtant le jeune garçon lui avait assuré qu’il n’y était pour rien, que tout allait. Ne le croyait-il pas ?

Il savait que son frère malgré son attitude plutôt courageuse avait du mal à se pardonner son absence. Heureusement, il ne saurait jamais ce qu’il avait vécu, il ne pourrait que l’imaginer… Alors que son sang fuyait inexorablement il avait senti la présence de Matt… toute proche, il aurait voulu lui parler mais impossible tout se faisait noir, flou incompréhensible… il sombra dans l’inconscience près de la mort… elle avait un aspect si réconfortant… un peu comme la mère qu’il n’avait jamais eu… c’était peut-être ça la solution à ses problèmes, la rejoindre au plus vite pour stopper son calvaire… Seulement il sentait quelqu’un se débattre pour lui le porter, où ? Pourquoi ? C’était son frère il en était certain. Croyait-il que sa vie valait d’être sauvée ? Pour quelle raison ? Alors, comme touché par cette tentative qu’il eut crue vaine, il résista à l’attraction de cette mère… Il mit de longs jours à se remettre et à son réveil il trouva Matt à côté de lui. Mais son frère avait tant changé… Il n’était plus aussi confiant qu’avant, aussi protecteur… quelque chose l’avait sonné… affreusement. Et comment ne pas être désorienté en sachant qu’il s’inquiétait pour lui ? Depuis, rien n’était plus pareil, Matthew s’en voulait… impossible de le rassurer là-dessus même si Darren ne lui en voulait pas... en tout cas pas consciemment.

- Matthew… viens, nous allons prendre le thé ensemble… ça nous fera du bien…

Le plus jeune regarda son aîné, assis sur une chaise silencieux. Il se leva et s’assit sur le fauteuil opposé à lui. Pendant que Mrs Poles leur préparait des gâteaux sur un petit plateau dans sa cuisine, Darren brisa ce silence pesant qui régnait entre eux, d’une manière un peu enfantine.

- Tu veux jouer aux cartes, avec moi, comme avant ?

Sans un mot, Matthew s’approcha et hocha la tête. Même s’il ne parlait pas, Darren était heureux qu’il ait accepté, au moins, il le sentait près de lui. Il sortit les cartes de sa poche. Pour la petite histoire, il avait piqué ce jeu à l’école… il ne l’avait jamais dit à son frère mais ce dernier devait s’en douter un peu… Il distribua tant bien que mal, avec un bras valide ce n’était pas vraiment extra. Ils firent un huit américain et c’est l’aîné qui gagna. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, Darren était content, bien qu’il ait décelé chez son frère de la déconcentration, il s’arrangea pour ne pas gagner. Pourtant son jeu était parfait. La voisine revint de la cuisine avec un beau plateau plein de gâteau. Soudain un bruit sourd retentit, la porte claqua et un coup de feu partit. La théière tomba au sol dans un bruit de métal et le service en porcelaine se brisa sur le parquet en mille morceaux. Une ombre menaçante s’approcha de Darren mais elle fut voilée par la voisine. Lance se tenait devant eux il en était certain… Et il était saoul, en colère… Il lança d’une voix menaçante, totalement enrouée par les litres de whisky qu’il s’était envoyé ces six dernières heures :

- Pousses-toi de là… espèce de sale idiote… je veux mes gosses alors tire-toi de mon chemin.

- Vous avez assez maltraité ces enfants… Sortez immédiatement ou j’appelle la police !

- Je veux mes gosses ! De suite !

- Hors de ques…

Le coup de feu partit tout seul et il atteint la femme en plein ventre. La balle la traversa et se logea dans l’épaule gauche de Darren placé juste derrière. Elle s’écroula sous l’œil effrayé du jeune garçon et aussitôt Lance braqua son fusil sur lui en hurlant à Matt qui s’était un peu trop approché :

- Tu ne veux pas le voir mourir ton frangin alors tiens-toi tranquille… Récupères donc tes affaires et celle de ce pleurnichard et rentrons…

- Non ! Pas elle…

La plainte de Darren ne put lui échapper et il se mit à pleurer devant cet horrible spectacle, Lance planta ses ongles crasseux dans la chair de son bras droit et le souleva, son fusil toujours à la main attendant que Matt s’exécute. Dans sa main plâtrée Darren ne tenait qu’une carte la dernière qu’il possédait… un six de pique qu’il lâcha. Il saignait et sur le carton blanc, légèrement jauni, le rouge se répandit. Les chiffres ne mentent jamais, la dernière carte qu’avait déposée Matt était un huit de cœur… Ce dernier rassembla leurs maigres affaires, résigné et ils retournèrent dans ce taudis puant et crasseux qu’était leur maison. Lance les enferma dans la chambre à double tour. Il avait posé des planches aux fenêtres pour que les deux ados ne sortent pas. Alors qu’il allait pour récupérer le cadavre de sa voisine il ne le trouva nulle part… L’ange, immortelle s’en été retournée auprès de Houston pour l’informer de l’état grave de la situation. Lance garda cette mystérieuse chose pour lui et Darren ne se pardonna jamais cette mort… Il n’osa plus parler à son frère et pour la première fois se dit qu’il lui causait plus de mal qu’autre chose… Il se mit dans un coin de la chambre, maudissant cet homme, lui souhaitant une mort atroce…

Lance ouvrit la porte de la chambre, son fusil toujours à la main et ordonna à Darren de venir. Ce dernier, voyant que son frère n’était pas d’accord, revint donc vers son géniteur, ce psychopathe… pour éviter d'autres effusions de violence... Le père ferma à nouveau la porte et l’amena dans le salon où il lui ouvrit son plâtre à l’endroit où la balle s’était logée. Se pouvait-il qu’il le soigne ? Comme quelqu’un de bien ? Mais, non… il en eut la preuve bien vite et ses espoirs de gosse partirent en fumée. Lance lui passa un bâillon et sortit des pinces avec une bouteille de vodka. Il versa l’alcool pur sur la plaie. Malgré le fait que Darren ne puisse pas parler, son cri de douleur résonna dans toute la maison. Il entendait Matt appuyer sur la poignée pour tenter de sortir… mais rien n’y faisait. A vif, la balle fut extriquée et lorsque ce boucher eut terminé, il remua les pinces dans la chair en disant :

- Alors, ce n’est pas mieux que l’hôpital ?

Il saisit Darren sans ménagement et fusil à la main il ouvrit la porte en y jetant le jeune Roller sans ménagement. Il pointa son arme sur Matthew prêt à lui bondir dessus et il lâcha, sur un ton sobre, terriblement menaçant :

- Le premier qui parle de ça à qui que ce soit, qui va porter plainte ou qui va à l’hôpital, je lui répands la cervelle sur les murs ! Ai-je été clair ? Quant à toi Matt… ne t’avise plus jamais de me frapper sinon c’est toi que je tuerais en premier…
*Fin du flashback*

La forme murmura un « Mrs Poles… » et se plongea dans un silence très lourd… L’ange gardien de ces deux enfants les avait aidés comme il avait pu mais bien sûr, tout ça n’était pas suffisant… Cet épisode était difficile pour les deux frères et il les avait profondément marqués l’un et l’autre Darren plus que son aîné. « Je l’ai cru morte par ma faute… comme tu es mort à cause de moi… Je n’aurais été bon qu’à faire souffrir tous ceux qui m’ont aimé… et finalement j’aurais réussi à te faire tuer… »

- Tss… c’est affligeant de constater à quel point ce morveux est intelligent… mais j’y songe… n’est-ce pas toi Matt qui a mis cette femme dans notre petit triangle haineux ? Si tu n’étais pas allé sonner à sa porte jamais elle n’aurait subi tout ça… Et comme c’était un ange elle a simplement pris la fuite, en comprenant que son aide futile serait de toute façon inutile… Au fond, lorsqu’une chose devient inutile il est toujours bon qu’elle disparaisse… Un peu comme ce bâtard et sa brume… ou ta petite traînée de fille…

« TAIS-TOI !!! »

Le cri retentit avec toute la violence dont un esprit était capable. Il sidéra Darren, le cloua sur place et fit trembler les murs. La forma pleurait, cela se voyait aux gouttes qui tombaient sur le sol. De lourds sanglots qui secouaient la lumière. Le corps de son frère réapparut et il termina en disant :

« Tu ne sais pas ce qu’est le remords… tu ne l’as jamais su… J’ai fait une erreur… je n’ai jamais été aussi fort que toi Matt… Toi tu as eu le courage de ne pas appuyer sur une gâchette… de ne pas ôter la vie à quelqu’un… Moi non… j’ai sombré… j’ai donné ce qu’il restait de ma vie à ce Démon pour avoir une protection… Quand tu es parti… je t’en voulais d’avoir changé… d’être mort de me laisser seul et au lieu d’être fort et de partir avec toi, je me suis laissé attirer par la vengeance…»

Ainsi il montrait à son frère que lui aussi regrettait… et qu’il lui pardonnait pour ce qui s’était produit ce fameux jour où Matt avait vécu un semblant de paradis…

[XD Tant pis pour la zik alors, mais si vois ce que j'écoutes, c'est bon. Pour ce qui est des souvenirs, il peut y en avoir plus que deux ou trois hein. Je te disais juste que je ferais le passage où Matthew meurt. Si tu es d'accord. ^^]

C’était dur de ne pas se sentir toucher par les paroles de Darren, se faire un peu plus enfoncer dans cette culpabilité qu’il avait toujours gardé au fond de lui, sur cette soirée maudite, qu’il s’était haï, tout détester sur cette Terre. Il aurait voulu une réponse de pourquoi tant de mal à deux enfants qui n’avaient rien demandé. Lors de ces conversations avec Dieu pourtant, rien ne sortait, aucun des deux ne posaient ni répondaient à cette question existentielle. Enfin, s’il y avait une réponse car à part le Destin qui s’amusait à créer des obstacles sur la route des gens pour savoir si leur avenir, leur but final peut être atteint, si la personne est assez vaillante pour la mission qu’on lui a confié. Mais comme tout être humain, Matt a eu des moments de faiblesse. Est-ce un crime que d’avoir refusé de tuer pour avoir une vie meilleure ? Chez lui, la violence n’était pas une solution, c’était plutôt en cas de dernier recours, quand rien d’autre ne peut marcher, que la personne face à soi est bien trop inhumaine pour comprendre quoique ce soit aux sentiments venant du cœur, ce petit organe qui donnait autant de bonheur qu’il pouvait faire souffrir. Alors même s’il n’avait tué Lance et qu’il s’en voulait, au fond de lui-même, le Bras Droit savait que ne pas mettre fin à la vie de cette ordure était la meilleure chose à faire, bien que les conséquences soient terribles pour leur futur. Tout aurait pu changé, Matthew n’aurait pu été ce bon garçon comme l’appelait Darren, il serait devenu le méchant de l’histoire, il ne serait pas mort aussi jeune mais n’aurait peut être pas eu ce statut, toute cette vie d’Ange, le privilège d’être aussi proche avec le Tout Puissant, pouvoir vraiment fait le bien autour de soi. Mais en étant vivant, il aurait pu faire de son frère quelqu’un de bien, vivre normalement, avec une famille et enfin avoir un vrai foyer mais avec un poids sur la conscience. La mort d’un homme ou la cause des souffrances de leurs souffrances, les deux culpabilités étaient finalement tellement similaires au point de vue douleur que l’aîné Roller n’aurait peut être jamais connu la paix intérieur, tellement recherché par les anges et toute la population terrestre. Un jour qui sait, il y arriverait peut être …

Pendant que le Démon parlait, les blessures de Matt disparaissaient, ne laissant que le sang qui avait coulé et s’essuya du revers de la manche. Quant à ses mains en sang, il disparut à son tour, laissant le jeune homme soulagé de ne plus avoir cette vision d’horreur même si les blessures internes restaient les mêmes, toujours mal et rouvrir les cicatrices de ce genre étaient à double tranchant : cela pouvait être tout bon, apprendre à accepter sa vie, ou alors tout mauvais, s’enfoncer un peu plus de la culpabilité. Le Bras Droit était comme sur un fil en équilibre entre les deux, ne sachant pas où tomber, même s’il aimerait aller dans le bon, un courant le poussait de l’autre côté. Au fur et à mesure de cette rencontre, peut être aura-t-il une piste pour choisir. Autant son frère en chair et en os pouvait être méprisable, autant que la forme était d’une douceur absolue, laissant donc perplexe le jeune homme qui restait silencieux sur ce qui se passait dans son propre appartement, à voir les objets se reconstituer et se remettre à leur place comme si rien ne s’était passé, bien qu’il n’y ait toujours pas de lumière ni chez lui ni dans la ville. Tout était plongé dans le noir et un peu de brume, du brouillard comme dans la tête de l’Ange qui ne savait plus trop quoi penser de cette situation, de ce qui se passait sous ses yeux et dans son esprit tellement chamboulé. Déjà qu’il n’avait jamais vraiment été ordonné alors là, c’était presque le chaos où les sentiments se mélangeaient et les choses s’entrechoquaient sans aucun rapport entre eux. Et puis revoir des souvenirs n’était pas forcément bon pour le tout, au contraire même, cela renforçait presque ce sentiment d’être perdu. Voir sous ses yeux leurs vies après cette fameuse nuit, maudite nuit où il avait failli perdre son frère et tuer son père. Heureusement qu’il y avait cette voisine qui avait bien voulu les accueillir, sans vraiment craindre de Lance. Matt était parfois aller la voir pour rendre quelques services, surtout quand il n’avait pas assez d’argent pour faire un repas normal. L’ange, puisqu’il savait maintenant qu’elle en était un, avait toujours fait du mieux qu’elle pouvait pour aider l’aîné et donc il avait été normal que ce soit vers elle qu’il se tourne et que c’était dans son appartement que les deux Roller se réfugient. Même si le jeune homme n’était plus dans son assiette. Matt se rendit compte que son comportement s’était répercuté sur son petit frère. Cette tristesse au fond des yeux, ce silence et cet éloignement n’avait fait que creuser un trou entre eux deux. Ce n’était pas ce qu’il avait voulu mais il se sentait si mal face à Darren qu’il avait du mal à lui parler, à le prendre dans ses bras, comme avant. Il faudrait un peu de temps, même si pour lui le temps était compté sans qu’il le sache à cet instant de sa vie. Puis le retour du père, la menace de l’arme qui empêchait toute tentative de fuite, de riposter, de réagir à ce coup de feu donner à l’ange. Pas le moment de faire le kamikaze, il fallait obligatoirement obéir pour ne pas trop risquer sa peau, ce n’était pas le moment. Là, on ne pouvait rien lui reprocher sauf peut être de ne pas être invincible, de ne pas savoir casser les portes sous ses coups. Quant à la dernière phrase, quelle ironie du sort, cela aurait pu être presque drôle d’entendre pareille phrase. Levant les yeux au ciel, Matt s’était levé en époussetant sa chemise plus rouge que blanche à présent, immaculée du sang qu’il avait versé durant ces dernières minutes. Les plaies s’étaient refermées et tout humain serait mort mais lui était immortel et pouvait se régénérer, l’avantage d’être un Ange.

La différence de discours entre les deux Darren était à couper le souffle. Le jeune, l’enfant s’en voulait d’avoir provoqué tant de mort tandis que l’autre les revendiquait, l’un rehaussait Matt l’autre le détruisait, il y avait toujours cet équilibre entre les deux qui faisait tenir le Bras Droit sur sa corde sans pouvoir tomber de n’importe quel côté. Malgré tout il fallait répliquer, se taire était parfois une preuve de faiblesse. Mais au moment qu’il ouvrit la bouche, ce fut la forme qui se mit à parler et à … pleurer ! Son petit frère pleurait à chaudes larmes, Matt porta sa main sur son cœur en entendant ces quelques mots. Des regrets … Le Bras Droit n’était donc pas le seul à en avoir. Un petit sourire vint naître sur ses lèvres et il poussa un long soupir avant de reprendre son sérieux.

Oui j’ai remords sur ma vie, oui il y a des choses que je ne supporte pas dans cette vie que j’ai préféré ne plus penser plutôt que de me dire que je n’ai pas été toujours le grand frère idéal pour toi. Je n’étais pas là quand tu avais vraiment besoin car je me sentais coupable de t’avoir presque fait mourir à cause de mon absence. Mais quelque chose qui est vrai Darren et que je ne regrette pas, c’est que pendant que j’étais en vie, j’ai tenté de t’éduquer loin de ce que tu es devenu, loin du modèle de Lance, j’ai appris à être un père avant d’être quoique ce soit d’autre.

Il regarda la forme de son petit frère qui avait arrêté de pleurer à chaudes larmes mais une encore coulait sur sa joue. S’approchant, le jeune homme l’essuya avec son index.

**Début du flash-back**
Matt avait arrêté les cours pour trouver des petits boulots afin de gagner leur vie. Il était allé au lycée jusqu’au bout, travaillant par-ci par-là mais après son diplôme, la fac était trop chère pour lui mais surtout il ne partirait pas loin de Darren. Alors le voila dans le monde du travail à enchaîner les boulots comme caissiers ou choses du genre. Là, il travaillait dans un supermarché, à une vingtaine de minutes de chez lui et comme son patron était sympa, il avait réussi à aménager des horaires pour ne pas finir trop tard. Sait on jamais, il ne laissait plus son petit frère avec l’espèce de père qu’ils avaient. La vie sociale était réduite à presque néant depuis que sa petite amie avait déménagé et qu’il avait arrêté les cours. Et puis depuis quelques mois, il s’était un peu éloigné de Darren malgré lui. Les premiers temps mêmes, regarder son petit frère dans les yeux lui était impossible. Alors lui parler … Silence radio entre les deux, puis Tina l’a quittée alors il s’était un peu laissé aller. Il fallait quelque chose pour le réveiller. A 19 ans, il serait peut être temps après des mois à se morfondre. C’était une fin d’après midi, après le boulot, Matt rentrait un peu fatigué d’arpenter toute la journée les rayons du supermarché à porter des cartons, ranger, encore marcher … De plus il dormait très mal, toujours peur que quelque chose se passe en pleine nuit. Sait on jamais avec Lance. Il mit la clé dans la serrure et trouva l’appartement étrangement vide. A chaque fois que c’était comme ça, Matt avait le réflexe de courir dans la chambre voir si Darren était bien là. Tout d’abord, ne voyant personne, son cœur s’arrêta et son visage se décomposa. Puis quelques bruits, comme quelqu’un qui pleurait, attirait son attention. S’approchant, son petit frère était recroquevillé, ses genoux entre ses bras. L’aîné s’accroupit pour voir ce qu’il avait mais le petit prit peur et s’écarta, croyant sûrement que c’était Lance.

T’en fais pas c’est moi …

Et Darren, le voyant, se blottit contre lui toujours en sanglotant. Tout d’abord surpris, Matt, referma ses bras pour le rassurer. Puis touchant son dos, quelque chose l’intrigua. Soulevant le t-shirt, il vit des traces de coups de ceinture. Ce n’était pas possible, l’autre ne cesserait donc jamais de martyriser son fils cadet ? Se détachant de Darren, il prit dans la commode de quoi soigner. Ce tiroir était une véritable armoire à pharmacie pour soigner les petites ou grosses blessures. Et le voila à faire le docteur comme souvent, il le faisait plusieurs fois par semaine, que ce soit pour lui-même ou son frère. Il s’appliquait, les frais de médecins ou d’hôpitaux étaient trop chers alors il fallait faire avec les moyens du bord. Tout en mettant du désinfectant sur les plaies, Matt prit la parole.

Ce soir, on sort Darren. Ca va nous faire du bien.

Son petit frère se retourna, ses grands yeux pleuraient encore mais il souriait. Si vous saviez ce qu’un simple sourire de son petit frère pouvait provoquer chez l’aîné. Avec son index, il lui essuya une larme. Ayant fini, il se leva et tous deux sortirent de la pièce. A ce moment précis, Lance arriva avec une femme fort peu vêtue et bien trop jeune, une prostituée sans aucun doute. Par souci de protection, le jeune homme se mit devant son frère. Leur père le toisa du regard et avec sa voix toute pâteuse, allait sûrement vociférer des insultes ou autres mots peu doux.

Tiens, tiens, les deux erreurs de ma vie. Tirez vous de là, j’ai à faire.

Sans relever les paroles de celui-ci, Matt se dirigea vers la jeune femme.

Vous devriez partir.

Hé, faut qu’on me paie.

Levant les yeux au ciel, il prit son portefeuille et lui tendit un billet de vingt, c’était le premier qu’il avait trouvé et vu qu’il n’était pas des plus riches, c’était tout ce qu’il pouvait donner. Elle sembla s’en contenter et partit le sourire aux lèvres, sûrement ravie de ne pas avoir à passer la nuit avec cet ivrogne.

Hé ! C’est pas parce que tu fais rien que je dois jouer au moine comme toi ! Et je suis chez moi !

Le blond se tourna vers ce qui était théoriquement son père et le menaça du doigt. Il ne pouvait plus supporter cet homme et dans chaque mot qu’il prononçait, on ressentait cette amertume et cette colère.

A preuve du contraire, je paie le loyer, je remplis le frigo, je fais tout ce que je peux pour pas qu’on se retrouve à l’abri. Je pense que je suis plus chez moi que toi. Allez Darren, prends ton manteau, on y va.

Le petit alla chercher son vêtement sur le fauteuil presque en courant, comme s’il avait hâte de sortir. Enfin, avec une ambiance comme celle-ci, c’était logique. En passant non loin de Lance, ce dernier attrapa l’enfant par le poignet et ce dernier gémit et se débattit. A peine l’homme avait touché Darren que l’aîné l’attrapa par le col pour l’approcher de lui.

Lâche le maintenant.

Ses yeux commençaient à devenir noirs et il plissa des yeux, ne le relâchant que lorsque l’autre enleva sa main du poignet de l’enfant. Darren ouvrit la porte pour se mettre sur le pallier. Matt le suivit et claqua la porte avant de poser sa main sur l’épaule de son petit frère en souriant.

Une soirée tous les deux va nous faire du bien. J’ai un peu d’argent, on va en profiter.

**Fin du flash-back**

Pas de coups, pas de sang cette fois-ci. Et si les visions étaient en fonction du mental des protagonistes ? Matt se frotta la nuque en y pensant brièvement. Quelqu’un de malheureux ou haineux montrera des moments difficiles, douloureux, durs tandis que des gens mieux dans leur peau montreraient de jolis moments. Pourquoi pas après tout. Debout, Matt regardait son frère Démon dans les yeux avant de hocher des épaules.

Je ne pense pas qu’à 19 ans tu n’avais à devoir bosser pour nourrir un petit frère, payer un loyer pour avoir un toit et se serrer la ceinture tout le temps pour payer des petits moments loin de la maison. Je ne sais pas comment tu étais à cet âge, je ne veux pas le savoir mais tu vois, j’ai essayé d’être le grand frère que tu avais besoin. Je me demande parfois si tu sais tout ce que j’ai du sacrifier pour toi, ma vie a toujours tourné autour de toi. Mais tu sais quoi ? Tu auras beau me mépriser, dire que tu as rasé ton passé, ta vie mortelle de ton esprit, je ne regrette pas d’avoir fait ces sacrifices car tu étais un petit garçon plutôt bien tant que j’étais là. Et je sais que tu n’aurais pas tourné comme ça si je ne serais pas mort.

Tout en parlant, il s’était approché de son frère et la forme l’avait suivait, comme s’il se mettait toujours entre les deux « Ca, c’est bien vrai » La petite forme intervenait toujours pour être du côté de Matt, il y avait toujours cela de rassurant au moins.

Les souvenirs étaient plus difficiles à supporter pour Darren que pour son frère… Etrangement l’absence de sang, de violence lui faisait mal à la tête… mal au cœur même… malgré le fait que ce dernier eut été transpercé par la lame de Satan. Il porta une main à sa poitrine et se rendit compte qu’il saignait ! Pile à l’endroit où il avait cette affreuse cicatrice… Il sentait le poids du bonheur le tirer vers le bas… Il passa ses doigts sur son col comme s’il étouffait. Jamais une telle réaction ne lui était arrivée… Pour la première fois depuis leur rencontre, il souffrait moralement ! Une première… Les gouttes de sang tombaient sur le sol, il appuya sur la plaie béante, prisonnier de ces visions affreuses… Une pointe lui transperça les tempes lorsqu’il vit ce sourire innocent… convaincu, cette petite réaction qui marquait la satisfaction du jeune garçon… Celle de pouvoir échapper aux griffes du monstre, de passer une soirée avec son frère, son aîné son protecteur… Le seul qu’il aimait sur cette planète… Aimer… comment pouvait-il éprouver cela ? Il sentait son énergie fuir à travers la brèche dans sa poitrine. Comme si son essence vitale l’abandonnait… Il tomba à genou, le visage ruisselant de sueur, sa main forçait sur son thorax comme un barrage… Lorsque la vision cessa, il inspira profondément, sentant que la forme venait de lui faire payer sa cruauté. Il pointa sur elle un doigt d’où le sang coulait et lâcha :

- Tu ne pourras jamais me détruire, je serais toujours là… C’est toi qui m’as créé… lui ! Houston et Satan ! Je suis là car ils ont décidés de sacrifier quelque chose… Je suis immortel et jamais tu ne pourras me détruire avec le genre de sornettes que tu nous déballes ! Je ne laisserais pas un gamin, sortir vivant de cet affront… Jamais ! Il est temps d’arrêter tout ce cirque !

Il se leva, toujours chamboulé par ce qu’il venait de vivre… Il regarda son frère avec plein de haine et de colère et il se concentra. Sa rage décuplait ses forces… il voulait que tout cela cesse, il en avait assez ! Tout se passa si vite mais dans sa tête, ce fut un long chemin escarpé. Il sentit une barrière s’opposer à lui, celle de la forme mais elle se dissipa. Dans son accès de démence, il la dirigea alors contre son frère. Toute la télépathie dont il était capable, comme du poison dans un fleuve d’Inde… qui allait pourrir la chair de ses habitants. Il s’insinuait dans leurs poumons, leurs propres muscles, les paralysaient… les tuaient ! Une à une, les portes sautèrent… Matthew avait d’autant plus de mal à lui résister qu’il était surpris. « C’est à lui de se taire ! A toi ! A toutes ces choses ! Le peu de bonheur que nous avons pu avoir, je l’ai effacé ! Je n’en veux pas ! Garde toutes ces balivernes pour toi ! Disparais, toi et ta pourriture de frangin, cette forme ! Fais là partir, immédiatement ». Alors qu’il déversait sur lui sa colère froide, intérieure, inhumaine, la forme s’interposa, ralentissant sa progression… sa propagation… dans l’esprit de l’aîné… Darren poussa un cri vengeur et appuya plus fort, taillant, découpant, provoquant des douleurs intenses, plus els secondes défilaient plus il était puissant, il le sentait, ce souffle nouveau monter en lui… un courant d’air chaud, une vague de noirceur qui émanait… avec son lot de fumée, nocive… S’il continuait ainsi, il allait bientôt atteindre leur points sensibles à tous les deux les détruire…

Sa puissance était telle qu’elle les surpassait tous les deux, il était frénétique… Il injectait de la douleur, des morts, de la souffrance dans chaque pensée, chaque mouvement. Matthew était maintenant à genou, la tête entre ses mains tandis que l’intérieur était sous un étau imbrisable… broyant toute belle chose qu’il pouvait avoir connue. Il ne comptait plus, il ne savait plus ce qu’il faisait, il progressait inévitablement… « Il est temps pour vous de fermer votre clapet, de me laisser… remballez vos dernières idées d’optimisme, de joie… et pleurez devant tout ça… Sentez le gout du sang sur votre langue ! ». Un tremblement résonnait dans toute la pièce, les sismogrammes bougèrent… l’alerte était donnée… Les sirènes retentirent comme lors des séismes, sauf que la cause était loin d’être, naturelle… loin d’être la faille San Andrea. Il s’agissait de la puissance surnaturelle que le Bras Gauche accumulait au fur et à mesure et qui le menait droit à sa perte. La forme pris bientôt une couleur étrange, rouge, comme le sang… Elle se rapprochait de Matt et le toucha… puis elle fusionna. L’effet ne fut pas immédiat, l’esprit du Démon lacérait de ses griffes machiavélique chaque souvenir… Les verrous sautaient, ceux qu’ils n’avaient pas vus se reproduire… et puis, ce fut la douleur intense qui gagnait ses deux adversaires. Il arbora un sourire carnassier et fit exploser une porte solidement fermée, comme pour protéger à jamais ce qu’elle contenait…

* Début du flashback *
Darren était assis… il attendait son frère qui passait commande. Il n’était pas très fier de lui… Pendant que son aîné discutait avec la caissière, il avait fouillé dans la poche de sa veste pour en sortir un billet de dix dollars… Il savait bien que son frère n’avait pas d’argent… qu’il payait leur repas et qu’il bossait comme un pauvre diable pour le faire manger… Mais, lui non plus n’avait rien… et en voyant son frère compter, il avait bien vu que dix dollars étaient de trop… Pourquoi ne pouvait-il pas les prendre ? Il fourra le morceau de papier dans sa poche et attendit que Matt revienne avec deux plateaux. Le restaurant du coin était cher aussi, il se contentait d’une espèce de fast-food, mais plutôt sympa. Il était éclairé par des ampoules orangées qui donnaient à la salle une allure chaude, réconfortante. Au menu, une assiette convenable, même énorme pour les deux Roller. Petite salade en entrée, frites et steak en plat consistant.

- Et voilà… c’est tout prêt… Ce n’est pas grand-chose mais c’est bien mieux que rien, hein ?

- Oui… Tu n'as pas de salade… ils l’ont oublié ?

- Non… je n’avais pas assez pris et j’essaie d’économiser pour une prochaine sortie hors de la maison… Un cinéma par exemple.

Darren se sentit très mal… Avait-il bien fait de prendre cet argent ?

- Je vais chercher la sauce…

Matthew se leva, c’était le moment… il profita de l’absence de son frère pour sortir le billet et le glisser dans la poche de la veste de son frère. Il allait terminer de rectifier son erreur lorsqu’une main attrapa la sienne. C’était son frère qui ne semblait pas bien comprendre. Il sentit une peur naître et lui serrer le ventre. Il n’osa pas regarder dans les yeux son aîné et n’eut rien à dire sur l’instant…

- Darren mais qu’est-ce que tu…

Matthew sortit le billet de dix dollars et sembla comprendre… Mais vu l’expression qu’il affichait, il n’avait pas saisi le sens… en tout cas pas le bon… Son visage passa de l’incompréhension à une attitude dure… Darren bégaya :

- Ce n’est pas ce que tu crois, je ne voulais pas les prendre juste les remettre…

Mais en parlant ainsi il savait qu’il venait de commettre une deuxième erreur… il avait trahi son larcin… Son frère ne dit rien et son silence le renseignait bien plus que n’importe quel propos… Il semblait si déçu… trahi… Et Darren était si mal à l’aise. Pourquoi n’avait-il pas pu résoudre sa mauvaise action si simplement ? Le destin ne l’avait-il pas assez puni comme cela ? Il décida de tout avouer…

- Je… je ne voulais pas te le prendre, si… au début… j’ai vu qu’il te restait de l’argent… mais… je l’ai pris cinq minutes… c’est tout… et j’ai profité de ton absence pour le remettre dans ta poche… je pensais que tu ne le verrais pas… Je ne sais pas pourquoi j’ai fait ça mais je suis désolé… j’étais en train de te le rendre… je te le jure…

Sa voix tremblait… Il en avait tant fait de bêtises ces derniers temps que son frère n’allait surement pas le croire. Pourtant, il versa une larme… et le visage de Matthew se détendit. Il semblait accorder du crédit à ce qu’il lui disait… Darren tendit alors sa salade et lui dit, en essuyant les larmes de ses yeux :

- Pardon… prends-la… tu la mérites plus que moi…

- Non, garde-la…

Il venait donc de refuser son offre désespérée. Darren n’osait plus rien dire… Il se sentait si mal à l’aise, au fond de lui, il voulait que Matthew puisse voir ce qu’il s’était réellement passé. Ils mangèrent… dans un silence un peu pesant que le jeune homme brisa de sa voix douce :

- Je ne t’en veux pas… mais si tu veux quelque chose, tâches juste de me le demander à l’avenir… Tu sais bien qu’il ne faut pas voler…

- Oui…

A la fin, Darren débarrassa les plateaux pour les donner à la caissière. Il retourna s’asseoir et demanda d’une voix timide :

- Tu veux jouer aux cartes ?

Il sortit le jeu abîmé qu’il avait pu récupérer et le posa sur la table. Ils jouèrent deux bonnes heures… et leur discussion se fit plus conviviale. Vers 23 heures, ils quittèrent le restaurant pour rentrer. Darren, se tenait un peu à l’écart de son frère, toujours avec ce sentiment de culpabilité. Ils arrivèrent sur le pas de la porte de leur taudis, et l’adolescent se blottit contre son frère. Il esquissa un petit sourire… Il avait eu une soirée merveilleuse, c’était si rare… Avec tout la gratitude dont il était capable, il dit, un simple mot… mais qui pourtant bouleversa des évènements…

- Merci…
* Fin du Flashback *

- NON !!!

Le cri, déchirant, arracha Matthew à ce souvenir plutôt beau. La forme se tenait entre lui et Darren mais il pouvait voir à travers qu’elle l’avait enlacé. Et ce dernier hurlait de douleur. La flaque de sang se faisait plus grande… et la pression gigantesque qui avait manqué le pulvériser quelques instants plus tôt avait disparue… sans doute à jamais… La Bras Gauche saignait de la poitrine et du nez, il était à genou, recroquevillé sur lui-même, ne respirant que par saccades. Et comme si tout se remettait en place tranquillement, il ne put se lever, trop faible… La forme le lâcha et s’éloigna sur le coté… elle lança dans leurs esprits : « Tous ceux que tu as tué… que tu as fait souffrir… ils étaient malheureux… tu n’as jamais pu atteindre ceux qui se sentaient bien… tu vis de haine… mais tu t’affaiblis du bonheur des autres… ».

Le silence tomba… tout se passait si bien. Il était sur le point de faire cesser toute cette mascarade… mais une seule étreinte avait suffit à arrêter le tremblement de terre. Et le mot avait fait s’écrouler Darren de douleur. La forme avait raison, il ne s’était attaqué qu’aux plus faibles, à ceux qu’il était sûr de faire tomber… mais jamais aux gens heureux… bien dans leur tête et dans leur peau. Voilà pourquoi il ne pouvait pas atteindre la forme… elle représentait tout le bonheur qu’il avait pu vivre… Cette partie de lui qu’il croyait avoir cédée au néant lors de la chute… Il avait en face de lui son pire ennemi, celui qui vivait heureux… la boîte à souvenir dont Matt avait ouvert le couvercle… comme Pandore en son temps… Il ne pourrait jamais s’en prendre à elle… pas plus qu’à Houston… Il le comprenait à présent mais il était trop tard. Le petit garçon apparut clairement aux yeux des deux frères, il était toujours dans son halo. Il afficha un petit sourire à Matt et s’approcha… Il la toucha… Tandis que l’un ressentait un vague de bien-être, l’autre avait la peau qui brulait et la douleur insupportable lui arracha un cri. La forme lâcha de la même voix, sur le ton avec un regard identique le mot suivant :

- Merci.

Une douleur transperça Darren de part en part… comme si on venait de lui planter une lame chauffée à blanc en plein cœur. Le pire, c’est qu’il ne pouvait pas mourir… ni y mettre un terme… Il subissait… inexorablement. Il ne la voyait pas encore cette lueur d’espoir mais, elle existait… car leur histoire finirait mal… dans la souffrance… et cela lui permettrait de se relever…

Vous savez, la fatigue et l’épuisement rendait Matt un peu plus fragile et plus facile pour attaquer. Même s’il venait de se rendre compte que tout l’amour qu’il avait en lui. Depuis des années, on n’avait cessé de lui répéter mais rien n’y faisait vraiment. Il avait fallu ouvrir des portes qu’il ne fallait pas pour qu’enfin il comprenne. Si le Bras Droit aurait compris beaucoup plus tôt ce principe, il n’aurait pas eu à subir tout cela. Surtout cette douleur qui venait de la haine de son frère qui le prit au cœur et déversait sa rage. Sans vraiment eu le temps de résister, il tomba à genoux et sentit d’autres portes s’ouvrir en lui. Tout son corps se mit à trembler comme si le froid le prenait, du sang se mit à couler de son nez. Cela faisait si mal qu’il était incapable de bouger ou faire quoique soit d’autre que de porter ses mains à ses oreilles comme pour cesser d’entendre tout cela ou du moins l’espérer. Par une opération étrange, Darren était entré dans son esprit pour lui parler, lui hurler dessus et tout saccager dans son esprit. Comme si ce n’était pas assez le bordel dedans … Tout souffrait en lui, Matt avait l’impression de brûler, que l’intérieur était un bûcher géant qui le faisait horriblement souffrir. Pourtant, aucune larme ne coula, l’ange se refusait de pleurer devant un tel tortionnaire. Plutôt mourir … Drôle d’expression surtout que lui était immortel. Mais c’était encore plus horrible, il aurait préféré trépasser. Toutes ces douleurs, c’était insupportable pour quelqu’un de hiérarchie angélique aussi hautement placée. Evidemment, cela arrivait toujours à lui, personne ne pouvait le laisser tranquille quelques instants ? Apparemment non, rien n’était possible, à croire que la terre entière aimait remuer le couteau dans les multiples plaies du jeune homme sans jamais se lasser. Evidemment, le démon devait y prendre un certain plaisir malsain de déverser sa colère voire même sa rage contre son propre frère. Pourtant tout cela allait changer. Darren avait ouvert une mauvaise porte, pour lui en tout cas. Car pour Matthew, c’était sûrement un morceau de sa résurrection.

Ce souvenir. Quelque chose au début au goût de trahison. Un petit frère voleur qui a été pris sur le fait. Quand on apprend à celui à qui on tient le plus les belles valeurs et que celui-ci les bafoue, même si après il réparait ses fautes, cela ne faisait pas que du bien. Un grand frère ayant mal mais se disant que malgré tout, il n’était pas totalement coupable ni ayant un mauvais fond. On faisait tous des erreurs en étant enfant, c’était aussi pour cela qu’il lui pardonnait tout. Après tout, quand on aime, on fait confiance et on donne d’autres chances. Sinon, sur qui compter si ce n’était pas sur ceux qui était à cher à notre cœur ? Et puis, il y avait des moments qui finissaient bien. Tout n’était pas rouge comme le sang, tout ne faisait pas mal, tout n’était pas aussi horrible dans leur quotidien. Même si ce genre de moments était rare, ils étaient toujours bons pour le cœur. Matt ferait mieux de se souvenir de cela plutôt que des mauvaises choses qui le faisaient culpabiliser … Indirectement, on lui lançait des messages de se battre, de ne pas se laisser faire par le mal. Non, il n’était pas trop tard et après ce retour à la réalité. Le Bras Droit se releva, essuyant le reste de sang qui était sous son nez tandis que Darren tombait à genoux. Chacun leur tour, ils souffraient. L’un souffrait en voyant le malheur, l’autre c’était pendant le bonheur. Le bonheur de l’un faisait le malheur de l’autre. Drôle de théorie mais pourtant des plus plausibles en voyant la différence de statut, si opposés et pourtant pas tant que cela. Il y avait un silence entre eux, c’était la forme qui parlait pour eux. Pas besoin de mots pour comprendre ce qui se passait. Il suffisait de regarder l’homme face à lui, regarder dans ses yeux bleus froids, une lueur de lucidité passa dans ses yeux. Comme s’il avait compris quelque chose après ces paroles. Darren Roller allait il devenir raisonnable ou voyait il simplement un rêve s’effondrer ? Quoiqu’il en soit, jamais il n’a été aussi faible depuis le début de leur rencontre. Matt avait le dessus sans le vouloir, juste parce qu’il avait ouvert son cœur, des moments privilégiés dans le passé. Douces soirées entre frères qui les avaient fait échapper leur quotidien bien gris. La forme le toucha, il se sentit bien durant quelques instants, vraiment cela faisait tellement longtemps que cela ne lui était pas arriver. En fait il n’y avait que Houston qui arrivait à le calmer et ce dernier ne le faisait pas toujours alors les moments de douceur absolue arrivaient rarement. Sans comprendre vraiment pourquoi il faisait cela, Matt s’approcha de son frère et s’accroupit pour le regarder dans ce piteux état. D’un côté, il le méritait mais tout de même, cela lui faisait un peu mal au cœur.

Tu souffres de voir le bonheur ? Pourtant, tu l’appréciais à l’époque. Tu étais cet enfant plein de vie, adorable et tu savais ce qu’il fallait faire ou ne pas faire. Un frère avec qui j’aimais passer du temps, que je protégeais et que je choyais autant que je peux pour te donner un tant soit peu de bon temps pour que tu ne te souviennes pas seulement des coups qu’un sale type te donnait en mon absence. Apparemment, toi et moi on a gardé que les mauvais souvenirs de cette vie. Regarde où ça nous mène.

Ce ton. C’était toujours celui du grand frère qu’il gardait dans sa voix. Cet homme à terre qui saignait serait malgré tout toujours de sa famille quoiqu’il se passe, ils avaient traversé trop d’épreuves ensemble pour qu’ils soient séparés simplement par des divergences de vies. Mais si le malheur n’était pas le fort de Darren, le jeune homme en avait besoin.

Mais tu sais, je pense qu’il y a d’autres moments comme cela. Ne joue pas aux malheureux avec moi, tu n’es pas aussi mauvais. Je pense qu’on peut le prouver encore si tu veux.

Darren se leva légèrement et Matt posa sa main au niveau du cœur.

**début du flash-back**
Le soir tombait mais le sourire sur le jeune homme se sentait bien. En fait c’était jour de paie et avec les heures supplémentaires qu’il avait fait, la somme dans le porte-monnaie était plus que considérable pour une personne aussi fauchée, c’était vraiment une somme considérable. Mais évidemment, il fallait rentrer chez lui et là c’était autre chose. Car qui disait paie disait aussi payer tout le loyer, les charges et aussi donner de l’argent à Lance. C’était un accord passé avec lui, cela évitait les trop grands conflits. Et en ouvrant la porte de l’appartement, l’autre était là, trônant dans l’éternel canapé, comme s’il attendait son argent. Sans un mot, Matt déposa la somme convenue sur la table basse et se dirigea vers la chambre quand l’alcoolo l’interpella.

Hé, il manque de l’argent !

Non, c’est ce qu’on a convenu comme on a aussi passé un accord de ne pas se parler.

Lance se leva et l’attrapa par la manche de sa veste. Cet air à moitié imbibé d’alcool et à moitié de colère donnait une grimace terrifiante. Mieux qu’un masque d’Halloween, c’est pour dire.

Je sais que t’as bossé plus ! Je VEUX plus !

Sinon quoi ? T’auras rien de plus, t’as qu’à aller bosser à ma place.

Et voila comment tout pouvait déraper en un instant. Un poing partit de Lance pour aller dans le visage de Matthew. Evidemment, le jeune homme ne pouvait pas se laisser faire et les voila tous les deux entrain de se battre. Le beau visage de l’aîné se prenait pleins de coups mais ses poings en donnaient autant. Puis son père prit la bouteille, la cassa pour griffer son bras. Le jeune homme saignait abondamment mais dans un élan, il poussa violemment Lance contre le mur et celui-ci tomba à terre. Vite, il se dirigea vers la chambre où se trouvait Darren qui était assit sur le lit. Matt arriva en se tenant le bras qui saignait abondamment.

Darren, ouvre le tiroir à pharmacie. Va falloir que tu m’aides à me soigner. Lance a encore fait des siennes.

Hochant de la tête pour dire oui, le garçon se leva pour prendre tout le nécessaire de premiers soins pendant que l’aîné enleva sa veste pour montrer sa plaie. Pas très beau mais heureusement pas très profond. Au pire, cela laissera une cicatrice pendant quelques temps. Son frère semblait hésiter quant à faire les premiers soins.

Tu fais comme je t’ai montré. Je vais t’expliquer et tu fais, d’accord ?

Oui …

Et voila l’aîné guider le cadet sur ce qu’il fallait faire au niveau du bras, de la désinfection jusqu’au bandage. Darren s’en est sortit comme un chef et réitéra ça sur le visage légèrement tuméfié du jeune homme, qui saignait aussi un peu au niveau de la lèvre. Sans qu’on lui ait demandé quoique ce soit, le garçon sortit à toute vitesse de la chambre et revint quelques instants plus tard avec un gant et de la glace.

Tiens, tu m’as toujours dit que ça servait à désenfler.

Tu retiens bien. Si tu faisais pareil à l’école, tu irais plus loin que moi. Merci pour la glace.

La portant à son front, Matt se servit de sa main libre pour prendre son porte feuille dans sa veste et sortit un billet de 20$ pour le tendre à son frère. Ce dernier fit non de la tête en reculant.

J’ai pas fait ça pour l’argent, Matt.

Insistant, le jeune homme tendit toujours le billet.

Ca me fait plaisir, j’ai gagné un peu plus ce mois-ci. Prends.

Mais non, le garçon refusait de prendre quoique ce soit et même referma la main de son frère sur son propre billet pour qu’il le garde.

Ca va servir quand on partira.

Les actions désintéressées étaient le signe d’une bonne éducation, non ? C’était comme cela que Matt le prenait et n’insistant pas plus, remit le billet à sa place. Son petit frère était quelqu’un de bien et cela le fit sourire. Finalement, même en ayant rien, on pouvait réussir quelque chose. Il suffisait seulement d’un peu de bonne volonté et de courage. Pendant que le grand blond s’allongeait pour reprendre un peu ses esprits, Darren alla fermer la porte à double tour. C’était souvent une sécurité contre Lance, les jours où il a décidé de frapper ses deux fils sans vraiment de raison valable. Matt était allongé, tenant la glace d’une main et touchant sa chaîne de l’autre. Depuis quelques temps, il sortait avec Erin qui lui avait fait ce beau cadeau, une chaîne en argent avec une croix dessus.

Darren … merci.

**fin du flash-back**

Matt s’était relevé après ce souvenir. Il avait saigné un petit peu mais rien de bien important. Contrairement à lui, le Démon souffrait le martyre. Le changement de camp des forces se faisait si vite qu’il fallait en profiter tant que c’était son tour pour dire ce qu’il pensait avant qu’il ne soit trop tard. Le temps étaient déjà compté, le Bras Droit savait que dans les prochains souvenirs, il y aurait sa mort et que là, ce serait lui le plus faible.

Comment t’as pu autant changé ? Tu étais ce garçon gentil et si serviable, tu ne pensais pas à mal. On a tous fait des erreurs, je veux bien l’admettre, mais toi tu es tombé bien bas. En revoyant tout ça, je trouve que finalement, tu ressembles plus à Lance qu’à quiconque. Tu es devenu sans cœur, violent et abject, comme lui. Dans quelle famille étrange je suis tombée ? Celle où un père bat ses enfants et où maintenant le plus jeune des frères se retourne contre l’aîné qui lui a sauvé la vie, a tout fait pour qu’ils aient une vie normale.

Secouant la tête, le jeune homme recula en passant ses mains sur son visage. Maintenant qu’il était le plus fort, il pourrait entrer dans l’esprit de son frère, ouvrir certaines portes mais non, ce n’était pas son genre et puis les visions parlaient pour eux. Sans compter la forme, dont on pouvait aisément voir le visage enfantin de Darren entouré d’un halo, assit près du Démon en le regardant. « J’étais malheureux et je n’avais personne, j’étais seul, comment voulais tu que je m’en sorte ? Je n’avais pas le choix. » Matt resta silencieux un instant, baissant les yeux avant de les relever.

Il y avait l’argent dans la chambre et puis Erin avec le bébé … t’étais pas seul … Erin sait elle au moins aussi ce que je suis devenu ? On a toujours le choix dans sa vie, je te l'ai déjà dit.

- Tu me fais pitié… Après tout ce que je te dis depuis le début tu crois toujours en ma rédemption ? Tu ne m’écoutes pas quand je te parle… ou alors ton amour t’aveugle trop… Il est trop tard pour s’attarder sur ce que je suis devenu… Ta tentative restera vaine et sourde… Ce sale mioche est mort, il serait temps que tu t’y fasses… et ce n’était pas un enfant de chœur… tout comme tu n’es pas le Saint Patron des Justes ! Tu essaie de te donner un air important peut-être en me tendant la main… Souviens-toi, la dernière fois que je l’ai prise, tu es mort. Je n’ai aucune envie de finir comme toi, de suivre les ordres d’un débile à robe blanche… Je me plais comme je suis, cruel, vil, machiavélique… un meurtrier… Et ce n’est pas parce que ce bâtard de gosse de tu as connu se présente à nouveau dans nos esprits que je vais changer. On a toujours le choix, je fais celui de détruire tout ce que je n’ai jamais pu avoir, même si je devrais pour cela m’anéantir moi-même… Savais-tu que les gens les plus dangereux sont ceux qui n’ont rien à perdre ? Lance avait un point faible, c’est qu’il n’était pas immortel et qu’il buvait… Moi, je suis lucide, j’ai les idées parfaitement claires… et c’est ça qui t’effraie. Garde ta bonne parole de prêcheur évangélique pour toi ! Garde-la pour ta fille, à l’avenir elle en aura besoin !

Le souvenir l’avait terriblement affecté. Son nez saignait abondamment et il peinait à tenir sur ses deux jambes. Mais pourtant dans son regard d’un bleu glacé, Matthew pouvait y lire sa détermination, son absence totale de considération. Aucune trace de pitié ne l’avait jamais habité, à lui le Démon… Il était vide de tout bon sentiment à l’encontre de son frère, bien au contraire à travers ses yeux froids, il pourrait y lire toute la haine qu’il lui portait… Mais qu’elle aurait pu être l’issue de son combat maintenant qu’il savait qu’il ne pourrait pas le mener à bien ? Pourtant Dieu n’était pas invincible… il pouvait le détruire en grossissant les rangs des enfers. Une flamme lointaine s’alluma dans son regard. Il reprit sur un ton tranquille :

- Ce qui te différencie de moi, c’est cette réticence que tu montres… Je suis faible pour l’instant mais ça ne va pas durer, tu le sais… alors pourquoi n’as-tu pas pris l’initiative de pénétrer dans mon esprit pour y lire à livre ouvert ? Parce que tu es stupide… tant de question te tourmentent et il suffirait d’un simple coup d’œil pour y obtenir des réponses… Tu crois peut-être que cette… chose… te montre tout ? Tu te trompes lourdement, il y a tellement de choses qu’elle te cache… Elle ne te montre que le bel aspect des choses… ce que toi tu n’as jamais pu distinguer non plus, cette part d’ombre envahissante qui est désormais face à toi. J’ai gagné contre ce petit guerrier d’amour que tu as forgé… je gagnerais ce soir le privilège de te voir souffrir à nouveau.

Il plongea ses yeux dans le petit nuage et lâcha d’une voix cruelle :

- Et toi… de te voir mourir ! Avant de passer aux dernières volontés tous les deux, montre lui donc ce que le vrai garçon ressentait ! Au fond de lui… tu l’avais abandonné… tu t’en souviens ? Et il t’a fallu du temps pour rebâtir quelque chose sur toi. Allez, sale morveux montre lui la jalousie dont tu faisais preuve à son égard… le soir quand tu pleurais amèrement parce qu’il avait été le seul à s’en sortir… Tu chialais comme un bébé, c’était jouissif à voir… Et puis, lorsqu’il a trouvé Erin, souviens-toi de la petite fille sur qui tu t’es vengé à l’école ? Tu te souviens celle que tu as battu et qui s’est cassé la jambe en voulant s’enfuir ? Je sens que ce lourd fardeau te remonte… Il y avait aussi, ce petit chiot que tu avais trouvé dans le terrain vague… Tu as voulu le protéger comme Matt avec toi mais au final, tu l’auras fait mourir… Et ce jeune garçon de six ans que tu détroussais de son argent de poche ? Que tu as fait frapper tellement qu’il est sur chaise roulante ? De tout ça tu en fais abstraction dans ce que tu nous montres ! Mais rien ne m’étonne… tu as toujours voulu sembler pour ce que tu n’étais pas… un garçon modèle alors qu’en réalité tu es une ordure…

Le petit halo s’obscurcissait… Le Bras Gauche avait entièrement raison, c’est comme si la forme voulait montrer son plus beau côté pour combler son frère aîné d’amour… la chose qui a ses yeux était la plus importante. Darren afficha un sourire carnassier, il savait qu’il venait de remporter cette bataille. Pourtant, la forme ne changea pas d’avis pour autant et en écho de ce que Matt avait dit, elle articula clairement :

« Dans la vie comme dans la mort… on a toujours le choix… Et ce que j’ai choisi de lui montrer… car l’autre partie c’est toi qui la met au grand jour en te pavanant, en étant fier de ce que tu dis. Voici donc ce que je juge bon qu’il apprenne… j’ai choisi. »

Une lumière blanche éblouissante envahit la pièce et les aveugla.

*Début du flashback*
Minuit. Darren se leva de son lit et ouvrit le verrou de la porte qui le séparait de la folie de son père. Il se faufila discrètement dans le couloir. Tout le monde dormait sauf lui. Il entra dans la cuisine et ouvrit un buffet. Il avait faim… Terriblement faim. Il tomba sur un paquet de céréales dans lequel il picora. La pièce était plongée dans l’obscurité mais une petite lueur vacillait en provenance du salon. C’était la télé, dont le volume assez fort en disait long sur le genre de films que son père regardait à cette heure-ci… devant laquelle Lance était affalé dans son canapé, totalement ivre, sa bouche ouverte laissant échapper de la bave sur son t-shirt déjà cradingue… Darren ouvrit ce qui leur servait de frigo et pris un morceau de fromage qu’il avala avec délectation. Bien qu’ils aient, Matt et lui, une réserve d’argent pour s’acheter de la nourriture, Darren n’avait rien pu manger la veille. En effet son frère était rentré tard, suite aux heures supplémentaires qu’il se donnait tant de mal à accumuler pour gagner un peu plus. Lance, dont le taux d’alcoolémie devait frôler la limite du coma éthylique, l’avait surpris à chercher quelque chose à manger à midi.

Il lui vouait une haine si terrible, qu’il manqua l’étrangler en le plaquant sur le mur, et ce sans regret apparent. Darren ne comprenait pas ce qu’il se passait, il manquait d’air… Son père lui dit qu’il ne servait à rien ici à part le mettre en colère. Il lui interdit donc de manger et de parler de tout ça à Matt sous peine de mort… Le jeune Roller gardait toujours ce souvenir affreux de la voisine sur le sol, tué par le fusil de son géniteur… Il promit de se taire et quitta la maison sans rien demander d’autre. Il s’en était sorti avec quelques coups de poings au ventre et une claque derrière la tête. Il avait mal mais ce n’était rien comparé à d’habitude. Il avait le ventre vide et était énervé. C’est là qu’il vit une vieille dame avec un morceau de pizza dans les mains. Mais alors qu’il avait pris la résolution de lui chaparder et de s’enfuir avec, il fit demi-tour… Matthew n’aurait pas été fier de lui… Il erra dans les rues, faisant sécher ses cours, de toute façon, tout ça ne l’intéressait plus… Il mentait à son frère en lui disant qu’il allait s’améliorer, qu’il allait faire des efforts pour réussir. Il s’assit sur le rebord d’une clôture pendant de longues heures.

Il réfléchissait longuement à sa vie… au but de son existence. Il sentait bien depuis longtemps qu’il devenait un fardeau pour tout le monde. Sa mère en était morte, préférant l’abandonner… Lance le haïssait de toute son essence et sa voisine était morte en voulant le protéger. Il voulait partir loin de tout ça… Un jour, il le ferait, c’était obligé… Mais il cherchait la façon de s’évader de cet univers. Il espérait qu’un jour Lance le frappe et le tue net… Au moins, il ne pourrait plus sentir son père s’acharner sur son cadavre… Mais de telles pensées lui faisaient mal au cœur. Que dirait son frère s’il le savait ? Il allait encore décevoir quelqu’un et pas n’importe qui le seul qui n’est jamais eu de l’amour pour lui. Ce fut le froid qui le fit ce lever et remonter son cache nez… Il était dix-neuf heures et lorsqu’il rentra, il se hâta de rejoindre sa chambre sans manger pour éviter la bouteille vide que Lance lui lançait de son canapé. D’ailleurs, le volume de son père avait augmenté, il occupait presque deux places à lui tout seul, avait le teint rouge comme une tomate et les dents aussi pourries que son âme.

Non ce soir c’était festin ! Après tout, pourquoi ne pourrait-il pas manger pendant que ce sac à bibine pionçait sur son lieu préféré. Mais trop satisfait par la tablette de chocolat qu’il venait de trouver dans un tiroir et dont il faisait fondre les carrés un par un dans sa bouche en fermant les yeux, il ne vit pas l’ombre de son père se lever et ne l’entendit pas s’approcher. Il était le doc appuyé contre le frigo assis par terre à savourer son délicieux. Lance s’était levé pour prendre une bouteille de bière et qu’elle ne fut pas sa surprise et sa colère en apercevant Darren manger. Le jeune garçon toujours insouciant ne comprit guère la suite. La bouteille vide de whisky que son père tenait dans la main s’abattit sur son crâne qu’il en fut assommé. Lance devant le corps inerte de son gosse le tira par le col jusqu’au canapé, il s’arma de son fusil au cas où Matt viendrait mais l’aîné ne s’était pas réveillé… exténué après la journée de travail qu’il avait vécu. Il pointa l’arme sur son fils et appuya sur la détente. Rien n’en sortit pas même un « bang »… il n’était pas chargé. Fou de rage, il envoya alors la crosse en plein ventre de Darren qui revint à lui sous le coup de la douleur. Il voulait crier mais il avait le souffle coupé.

- Retournes te coucher… immédiatement… et n’oublie pas qui tient le fusil !

Darren se leva avec grande difficulté en se tenant l’abdomen. Il prit un coup de crosse sur la nuque ce qui lui donna un violent mal de tête. Toujours très silencieusement, il rejoignit sa chambre et ferma à double tour… Matt ne se réveilla pas. Il se coucha sur cette espèce de fauteuil qui lui servait de lit. Il essuya une larme et une sombre pensée lui traversa l’esprit… Pourquoi son frère ne s’était-il pas réveillé ? Pourquoi fallait-il qu’il prenne tout à chaque fois ? Il eut le sentiment d’être abandonné encore une fois mais une petite voix vint tempérer tout ça et lui permit de s’endormir : « Ce n’est pas de sa faute… il travaille et est toujours là pour moi… mais… bientôt… je partirais… loin… je ne serais plus un fardeau pour personne. »
*Fin du Flashback*

- Tiens… mais voilà que notre petit garçon attentionné nous montre son côté angoissé… inutile… qui avait raison, Matthew ? Ah si seulement, j’avais été là… mon petit frère n’aurait pas subi toutes ces tortures… Je ris de voir qu’après tant d’année tes blessures sont aussi ouvertes… C’est bientôt la fin, Matt… Tes forces s’épuisent déjà à mesure que l’heure fatidique arrive… Quel beau discours tu m’as tenu ! J’aurais pu y croire… enfin presque… un peu plus et ce je me faisais pousser des ailes immaculées dans le derrière.

Il lança un sourire effroyable, presque victorieux. Son état était toujours affaibli mais il arborait un air victorieux. Il savait que désormais, la dernière ligne droite se jouait… il n’avait qu’à laisser faire la forme. Celle-ci ne regardait plus personne. Elle avait pris la forme brumeuse de départ, seule sa voix, claire et douce s’éleva dans ce silence pesant.

- Je ne peux cacher la vérité plus longtemps… Oui, j’avais des doutes… oui j’ai eu des moments de faiblesses durant lesquels je me suis laissé emporter par la crainte, la jalousie… Mais, tout cela, je le regrette… sincèrement. Je n’ai d’ailleurs jamais été aussi dégouté par moi-même qu’à cet instant… vous vous en souvenez tous les deux… celui où a fini mon histoire…

Sa figure d’enfant apparut alors à travers le petit nuage lumineux. Il ignora les moqueries que Darren était en train de lui adresser et coupa l’ouïe de Matthew. Il s’approcha et versa une larme. Sa voix parla alors dans son esprit, à lui seul : « Il est temps… je sais que tu vas souffrir mais je ne peux pas partir sans que tu le revives… Pardonne-moi, pour tout. Mais n’aies aucune crainte… à l’issue de tout ça… tu seras le seul à être encore debout… Adieu Matt ». Une main sortit de la brume et les doigts du jeune garçon se posèrent sur le cœur de l’aîné Roller. Cette fois, il allait avoir besoin de toute sa puissance pour résister à la souffrance de cette porte… scellée d’une centaine de tours dans chacune des mille serrures dont jamais, il n’aurait pensé pouvoir rouvrir sans clé…

» Matt Roller
» Matt Roller -213 3370-0888-
» [Matt Roller] indies.dreams@losangeles.com